
Action du ministre de l'Economie : règles de preuve
Il ne peut être reproché aux agents de la DGCCRF d’avoir eu recours à un procédé déloyal pour obtenir les pièces produites ensuite par le ministre chargé de l’Économie au soutien de son action formée au titre de L. 442-1, I, 2°, du Code de commerce, dès lors que les tableaux standardisés, adressés aux fournisseurs des sociétés poursuivies, à titre de demandes d'informations complémentaires, n'avaient pas pour finalité de confirmer les conclusions provisoires des enquêteurs quant à l'existence de pratiques restrictives de concurrence, mais de les compléter, et que leurs destinataires, qui, par leur appartenance à des grands groupes multinationaux, étaient particulièrement avertis et aptes à mesurer les enjeux de la procédure, ont conservé toute leur liberté de réponse.
Cass. com., 29 janvier 2025, n° 23-15.828
Sanctions civiles : action en réparation
Une action en réparation du dommage concurrentiel introduite plus de cinq années après la décision de l’Autorité de la concurrence, qui fait courir le délai de prescription, est prescrite nonobstant l'acte antérieur de saisine du Conseil de la concurrence, qui, s’il figure bien parmi les actes visés par l’article L. 462-7 du Code de commerce comme pouvant avoir un effet interruptif, est survenu bien avant le départ du délai de prescription, de sorte qu’il ne peut interrompre un délai qui n’a pas commencé à courir.
CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 22 janvier 2025, n° 23/04477
Sanctions civiles : action de groupe
En application de l’article 101 TFUE, lu conjointement avec l’article 2, point 4, l’article 3, paragraphe 1, et l’article 4 de la directive 2014/104, ainsi que l’article 47, premier alinéa, de la Charte, une législation nationale ne peut interdire aux victimes présumées d’une infraction au droit de la concurrence de céder leurs droits à réparation à un prestataire de services juridiques, pour que celui-ci les fasse valoir, de manière groupée, dans le cadre d’une action en dommages et intérêts autonome, lorsque le droit national n’offre aucune autre forme de regroupement des demandes individuelles garantissant l’effectivité du droit à réparation, et que l’exercice individuel de ces actions s’avère, compte tenu des circonstances, impossible ou excessivement difficile, compromettant ainsi leur droit à une protection juridictionnelle effective.
CJUE, gr. ch., 28 janvier 2025, n° C-253/23
Aides d'Etat : parties intéressées
Il ne peut être inféré de la seule participation de la requérante à la procédure administrative qu'elle est individuellement concernée par la décision attaquée, quand bien même elle aurait joué un rôle important dans cette procédure administrative.
TUE, 4e ch. élargie, 29 janvier 2025, n° T-334/22
Marques : signe identique ou similaire et produits ou services identiques ou similaires
Des produits complémentaires aux services visés par une marque antérieure sont par là-même similaires, le consommateur étant conduit à leur attribuer une origine commune.
CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 17 janvier 2025, n° 23/14600
Contrat de mandat : preuve du mandat
Le vendeur d'espaces publicitaires qui a conclu un contrat de vente avec le mandataire d'un annonceur, bénéficie d'une action directe en paiement contre ce dernier s'il justifie du principe de sa créance et du pouvoir du mandataire lors de la conclusion du contrat de vente d'espaces publicitaires, sans être tenu d'apporter la preuve que le mandat a été conclu par écrit.
Cass. com., 29 janvier 2025, n° 23-19.341

Dénigrement : critique excessive
Les sociétés qui, dans un communiqué largement diffusé, faisant état d’études réalisées par leurs avocats, affirment, de manière péremptoire et catégorique, sans employer le mode conditionnel, que la poche d'additivation distribuée par une société concurrente, nommément désignée, ne constitue pas une invention brevetable au sens du Code de la propriété intellectuelle, alors même que leur concurrente détient un brevet enregistré à l’INPI, tout en accompagnant leurs propos d'une critique virulente de la communication commerciale de cette dernière laissant croire qu'elle utiliserait des procédés illégaux afin de tenter de dissuader ses clients d'acheter un produit non protégé par un brevet, se sont rendues coupables d’un acte de dénigrement.
CA Nîmes, 4e ch. com., 17 janvier 2025, n° 23/00729
Dénigrement : procédure judiciaire
L'exception de vérité n'est pas applicable en matière de dénigrement, de sorte qu’il est indifférent que le juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Paris ait dans une autre instance considéré que la vraisemblance de la validité du brevet dénigré n'était pas établie.
CA Nîmes, 4e ch. com., 17 janvier 2025, n° 23/00729
Parasitisme : usurpation du travail d'autrui
Le comportement parasitaire d’un animateur de réseau de pharmacies est établi lorsqu’un procès-verbal réalisé à la suite du prononcé d’une ordonnance sur requête dans ses locaux fait état dans ses fichiers informatiques de documents concernant les relations clients et les prix pratiqués par un réseau concurrent.
CA Bordeaux, 4e ch. com., 20 janvier 2025, n° 23/00274
Rupture brutale de relations commerciales établies : stabilité de la relation
Même si les relations nouées dans le secteur d'activité de l'audiovisuel n'ont pas vocation à s'inscrire habituellement dans la stabilité, la multiplicité des contrats à durée déterminée conclus entre les parties sans clause de tacite reconduction, mais dont l'exécution s'est étalée, sans interruption aucune, durant près de dix-neuf ans, en donnant lieu à un courant d'affaires particulièrement significatif, permet d'établir que leur relation commerciale présentait un caractère suivi, stable, significatif et établi, nonobstant l’absence de clause d'exclusivité ou de garantie de chiffre d'affaires.
CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 17 janvier 2025, n° 22/13998
Rupture brutale de relations commerciales établies : imprévisibilité
La “ provision pour arrêt d'émission ” inscrite dans les comptes d'une société qui se prétend victime d'une rupture brutale de relation commerciale établie ne permet pas d'induire une absence de croyance en la pérennité de la relation, mais démontre uniquement la volonté de ses dirigeants d'anticiper les risques éventuels de l'arrêt de l'émission.
CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 17 janvier 2025, n° 22/13998
Rupture brutale de relations commerciales établies : durée du préavis
La société, qui, alors que la durée de la relation commerciale établie était de dix-neuf années au jour de la rupture, a accordé à son partenaire, au lieu des dix mois, jugés nécessaires, un préavis de 2,25 mois, qui ne tenait pas compte de l'ancienneté de leur relation, s’est rendue coupable d'une rupture brutale de la relation commerciale établie ouvrant droit à indemnisation.
CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 17 janvier 2025, n° 22/13998
Rupture brutale de relations commerciales établies : lien de causalité
Lorsque la décision d'un animateur de cesser d'animer l’émission qu’il co-produit entraîne la décision de la chaîne de télévision de ne pas renouveler l'émission, en raison du caractère indissociable de la personnalité de l'animateur et du concept de l'émission, le préjudice subi par l’autre producteur, en lien direct avec la décision de l'animateur, consiste dans la perte d'une marge, même si cette marge provenait de la vente des programmes à la chaîne de télévision.
CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 17 janvier 2025, n° 22/13998
Actions ouvertes en cas d'abus de dépendance : spécialisation des juridictions
La Cour d’appel de Bordeaux ne peut déclarer irrecevable l’appel formé contre le jugement du Tribunal de commerce de Bordeaux, juridiction visée à l’article D. 442-2 du Code de commerce, au motif que la demande excède son pouvoir juridictionnel, alors que la règle d’ordre public découlant de l'application combinée de ce texte et des articles L. 442-4, III et L. 442-1, I et II, du même code, selon laquelle la Cour d’appel de Paris est seule compétente pour connaître des décisions rendues en matière de pratiques restrictives de concurrence, institue une règle de compétence d’attribution et non une fin de non-recevoir.
Cass. com., 29 janvier 2025, n° 23-15.842
Action du ministre de l'Economie : règles de preuve
Les agents de la DGCCRF n'ont pas utilisé un procédé déloyal pour obtenir les pièces ensuite produites par le ministre chargé de l'économie au soutien de son action formée au titre de L. 442-1, I, 2°, du Code de commerce en soumettant, une nouvelle fois, lors des auditions leur analyse des pratiques en cause aux fournisseurs concernés, alors que l'enquête était très avancée, dès lors que ce procédé n'est pas en soi condamnable puisque les affirmations des enquêteurs s'appuyaient sur une lecture d'éléments objectifs, que les réponses des fournisseurs étaient clairement distinguées et que ces derniers avaient à nouveau manifesté leur aptitude à répondre librement, en contredisant, le cas échéant, leur interlocuteur ou en soulignant leur incapacité à commenter les indications ainsi soumises à leur appréciation.
Cass. com., 29 janvier 2025, n° 23-15.828
Imputabilité de l'infraction : restructuration de l'auteur
Il incombe à la personne physique ou morale qui dirige l'entreprise au moment où l'infraction aux règles de concurrence est commise de répondre de celle-ci, même si, au jour de l'adoption de la décision constatant l'infraction, l'exploitation de l'entreprise a été placée sous la responsabilité d'une autre personne, de sorte qu’une société ne saurait prétendre avoir depuis apporté à sa filiale les branches complètes et autonomes ainsi que les droits, biens et obligations afférents aux activités concernées pour s'exonérer de sa responsabilité au titre de pratiques anticoncurrentielles, alors en outre que le périmètre de la transmission n'est pas délimité de manière précise.
CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 22 janvier 2025, n° 23/04477
Concentrations : parts de marché cumulées
Conformément à la pratique décisionnelle de l’Autorité de la concurrence concernant les magasins ayant vocation à être exploités sous un format hors maxi-discompte, il a été examiné dans les zones dans lesquelles la part de marché de la nouvelle entité est supérieure à 50 %, ou bien comprise entre 25 % et 50 % mais en l’absence de trois enseignes concurrentes, s’il existait des alternatives crédibles et suffisantes en mesure de concurrencer efficacement les magasins de la nouvelle entité, en tenant compte des caractéristiques et de la configuration de la zone, mais aussi d’éléments supplémentaires comme par exemple, l’implantation des divers magasins et leur proximité géographique avec le magasin cible, leur positionnement tarifaire ou la répartition démographique et sociologique de la population des zones concernées, ce dont il a résulté l’identification de risques d’atteinte à la concurrence par le biais d’effets horizontaux sur le marché aval de la distribution à dominante alimentaire dans onze zones de chalandise.
ADLC, 28 novembre 2024, n° 24-DCC-255
Procédure de la concurrence : principe d'autonomie procédurale
L’article 4, paragraphe 5, et l’article 13, paragraphe 1, de la directive 2019/1 ainsi que l’article 102 TFUE, lus à lumière du principe d’effectivité, s’opposent à une réglementation nationale qui, lors d’une procédure visant la constatation d’une pratique anticoncurrentielle menée par une autorité nationale de concurrence, d’une part, impose à cette autorité d’ouvrir la phase d’instruction contradictoire de cette procédure par la communication des griefs à l’entreprise concernée dans un délai de 90 jours à compter du moment où elle a connaissance des éléments essentiels de l’infraction alléguée, ceux-ci étant susceptibles de se limiter au premier signalement de cette dernière, et, d’autre part, sanctionne la méconnaissance de ce délai par l’annulation intégrale de la décision finale de ladite autorité à l’issue de la procédure d’infraction ainsi que par la déchéance du pouvoir de cette dernière d’ouvrir une nouvelle procédure d’infraction concernant la même pratique.
CJUE, 2e ch., 30 janvier 2025, n° C-511/23
Sanctions civiles : action de groupe
Une action groupée en recouvrement d'un préjudice résultant d’une entente ne saurait être exclue par la législation d'un Etat membre si celui-ci ne prévoit aucune autre voie collective de regroupement des prétentions individuelles des personnes lésées et que l’exercice d’une action individuelle en dommages et intérêts s’avère impossible ou excessivement difficile.
CJUE, gr. ch., 28 janvier 2025, n° C-253/23
Aides d'Etat : parties intéressées
Le recours en annulation doit être rejeté dès lors que même à supposer que le bénéficiaire de l'aide ait profité des injections de capital mentionnées dans l'accord validé par la Commission et qu'il était en concurrence avec la requérante sur le marché des services postaux dans l'Etat membre en cause et dans les pays nordiques, la requérante n'a pas établi que sa position concurrentielle était susceptible d'être substantiellement affectée par les injections de capital.
TUE, 4e ch. élargie, 29 janvier 2025, n° T-334/22

Agents commerciaux : critère d'appréciation du préjudice subi
Pour fixer l'indemnité compensatrice de rupture du contrat d'agent commercial, une cour d'appel ne peut retenir que ce contrat ne comporte aucune clause de non-concurrence, que l'agent a retrouvé un emploi dans la même branche presqu'immédiatement et qu'il ne produit aucun élément sur les commissions qu'il a perçues depuis la rupture du contrat, alors que le préjudice résultant de la cessation du contrat d'agence commerciale est constitué par la perte pour l'avenir des revenus tirés de l'exploitation de la clientèle commune.
Cass. com., 29 janvier 2025, n° 23-21.527

Pratiques commerciales déloyales : principe d'effectivité
Les articles 11 et 13 de la directive 2005/29 s’opposent à une réglementation nationale qui, lors d’une procédure visant la constatation d’une pratique commerciale déloyale menée par une autorité nationale chargée de veiller à l’application de la législation en matière de protection des consommateurs, d’une part, impose à cette autorité d’ouvrir la phase d’instruction contradictoire de la procédure par la communication des griefs à l’entreprise concernée dans un délai de 90 jours à compter du moment où elle a connaissance des éléments essentiels de l’infraction alléguée, ces derniers étant susceptibles de se limiter au premier signalement de celle-ci, et, d’autre part, sanctionne la méconnaissance de ce délai par l’annulation intégrale de la décision finale de l'autorité à l’issue de la procédure d’infraction ainsi que par la déchéance du pouvoir de cette dernière d’ouvrir une nouvelle procédure d’infraction concernant la même pratique.
CJUE, 2e ch., 30 janvier 2025, n° C-510/23
Contrats conclus hors établissement : bénéficiaires de la protection
Une société civile d’exploitation agricole qui a conclu des bons de commande ainsi que des contrats de location hors établissement portant sur la fourniture et l'installation d'une batterie de condensateurs et d'un kit d'éclairages à LED, alors qu’elle n'avait pas de connaissance professionnelle particulière dans le domaine de ces contrats, dont l'économie n'apparait pas indispensable à l'exercice de son activité d'exploitant agricole et d'éleveur de porcs, bénéficie des règles protectrices du Code de la consommation relatives aux contrats conclus hors établissement.
CA Rennes, 2e ch., 14 janvier 2025, n° 22/03746
Contrats conclus hors établissement : droit de rétractation
Le fait que le nombre de modules ait été fixé suivant la taille des bâtiments de l'exploitation agricole ne saurait constituer une personnalisation au sens de l'article L. 221-28 du Code de la consommation excluant le bénéfice du droit de rétractation, alors même que tous les éléments vendus sont des produits industriels fabriqués en série.
CA Rennes, 2e ch., 14 janvier 2025, n° 22/03746
Contrats conclus hors établissement : sanctions civiles
Un contrat conclu hors établissement doit être accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5, sous peine de nullité.
CA Paris, Pôle 5 ch. 10, 20 janvier 2025, n° 22/16582
Contrats conclus hors établissement : sanctions civiles
Un contrat de vente ou de fourniture d'un bien ou service conclu hors établissement doit, à peine de nullité, indiquer, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 221-5, L. 111-1 et L. 111-2 du Code de la consommation, sans que l'acquéreur, qui a réceptionné sans réserve l'installation, n’ait à justifier du préjudice résultant des irrégularités invoquées.
Cass. 1re civ., 22 janvier 2025, n° 23-12.537
Contrats conclus hors établissement : sanctions civiles
Un contrat de vente conclu hors établissement doit comporter, à peine de nullité, une mention relative à la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI du Code de la consommation, ainsi que les coordonnées du ou des médiateurs de la consommation compétents dont le professionnel relève en application de l'article L. 616-1.
Cass. 1re civ., 22 janvier 2025, n° 23-12.537
Clauses abusives : clause de résiliation
La clause qui prévoit la résiliation de plein droit du contrat de prêt après une mise en demeure de régler une ou plusieurs échéances impayées sans préavis d'une durée raisonnable, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ainsi exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement.
CA Reims, 1re ch. sect. jex, 14 janvier 2025, n° 24/01218
Garantie des vices cachés : délai biennal
L’acheteur ne peut sérieusement soutenir qu'il n'a eu connaissance de la gravité du vice affectant le véhicule vendu que lors du dépôt du rapport d'expertise judiciaire le 26 mai 2021, alors même qu'il avait fait procéder au remplacement de son châssis près d'un an avant, soit le 22 juin 2020, et qu’il n'a fait signifier une assignation en référé expertise que trois mois plus tard, le 21 septembre 2020, dès lors qu’il avait une connaissance suffisante du vice dès la réunion d'expertise amiable contradictoire du 16 avril 2018 et que s’il y en était résulté un doute sur le fait que l'importante corrosion atteignant l'ensemble du soubassement puisse présenter tous les caractères requis d'un vice caché, il lui était alors loisible de solliciter une mesure d’expertise judiciaire, de sorte que le délai de prescription avait expiré le 16 avril 2020 avant qu'il n'agisse en référé expertise.
CA Nancy, 1re ch., 13 janvier 2025, n° 23/01873
Responsabilité du fait des produits défectueux : gestionnaire d'un réseau de distribution d'électricité
Le gestionnaire d'un réseau de distribution d'électricité doit être considéré comme un producteur au sens de l'article, 1245-5 alinéa 1er, du Code civil lorsque les dommages allégués proviennent d'un défaut de sécurité du produit consistant en une surtension électrique, de sorte que le régime de la responsabilité du fait des produits défectueux étant seul applicable au litige, c'est à tort que les premiers juges ont appliqué le régime de la responsabilité contractuelle.
CA Versailles, ch. com. 3-1, 22 janvier 2025, n° 23/03705
Responsabilité du fait des produits défectueux : évaluation du préjudice
Le droit au remboursement des frais de remise en état d'un bien endommagé du fait d'un produit défectueux a pour limite la valeur de remplacement du bien, laquelle ne correspond pas à sa valeur à neuf mais à celle qui résulte de son état.
CA Versailles, ch. com. 3-1, 22 janvier 2025, n° 23/03705

Primauté du droit européen : principe d'équivalence et d'effectivité
En se bornant à prévoir, à son article 5, paragraphe 1, que les pratiques commerciales déloyales “sont interdites”, la directive 2005/29 laisse aux États membres une marge d’appréciation quant au choix des mesures nationales destinées à lutter, conformément à ses articles 11 et 13, contre ces pratiques, à la condition qu’elles soient adéquates et efficaces et que les sanctions prévues soient effectives, proportionnées et dissuasives.
CJUE, 2e ch., 30 janvier 2025, n° C-510/23
Primauté du droit européen : devoirs du juge national
L’obligation d’interprétation conforme impose à une juridiction nationale de modifier, le cas échéant, une jurisprudence établie lorsque celle-ci repose sur une interprétation du droit interne incompatible avec les objectifs d’une disposition du droit de l’Union et, à cet effet, de laisser inappliquée, de sa propre autorité, toute interprétation retenue par une juridiction supérieure, voire suprême, qui s’imposerait à elle, en vertu de son droit national, si cette interprétation n’est pas compatible avec le droit de l’Union.
CJUE, 2e ch., 30 janvier 2025, n° C-510/23
Consommation : pratiques commerciales déloyales
Une autorité nationale chargée de veiller à l’application de la législation en matière de protection des consommateurs doit disposer de la possibilité de repousser temporairement l’ouverture de la phase d’instruction contradictoire dans une procédure donnée, alors qu’elle a déjà établi l’existence des éléments essentiels de l’infraction alléguée, afin d'être en mesure de traiter adéquatement toutes les procédures d’infraction dont elle est saisie.
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Cession de participations : détermination par les parties
Le créancier dispose de l'action paulienne, dont le succès n'est pas subordonné à la preuve de l'appauvrissement du débiteur, lorsque la cession, bien que consentie au prix normal, a pour effet de faire échapper un bien à ses poursuites en le remplaçant par des fonds plus aisés à dissimuler.
Cass. com., 26 janvier 2025, n° 23-20.836

Marques : risque de confusion ou d'association
Le risque de confusion entre les marques opposées et le signe dont l'enregistrement était sollicité est établi dès lors que compte tenu du caractère dominant du mot “Alliance” dans les deux signes, de son caractère distinctif pour les produits et services visés, des ressemblances relevées et de l'identité ou de la similarité des services et produits, le consommateur sera amené à percevoir le signe contesté comme une variation des marques antérieures dans le domaine de la logistique, quelle que soit leur notoriété.
CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 17 janvier 2025, n° 23/14600
Brevets d'invention : certificat complémentaire de protection
Pour faire l'objet d'un certificat complémentaire de protection, le produit, c'est-à-dire le principe actif ou la composition de principes actifs d'un médicament, doit être protégé par un brevet de base en vigueur et avoir obtenu, en tant que médicament, une autorisation de mise sur le marché en cours de validité, celle-ci devant être la première pour le produit.
CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 17 janvier 2025, n° 23/13461
Brevets d'invention : description claire et complète
L'exigence de suffisance de description, qui a pour finalité de garantir la possibilité pour l'homme du métier d'exécuter l'invention, sans effort excessif mais de manière néanmoins constructive, grâce aux informations fournies par l'ensemble du brevet comprenant les revendications, la description et les dessins et ses propres connaissances techniques, est satisfaite dès lors que la description indique les moyens qui donnent à l'homme du métier, doté des capacités et des connaissances que l'on est en droit d'attendre de lui, la possibilité d'identifier les mesures d'ordre technique nécessaires pour résoudre le problème sous-jacent au brevet en cause et d'exécuter ou de mettre en oeuvre l'invention par de simples mesures d'exécution, comme des essais de routine, ou moyennant un effort raisonnable de réflexion.
CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 17 janvier 2025, n° 22/15057

Baux commerciaux : contrat verbal ou écrit
L’application du statut des baux commerciaux n’est pas subordonnée à l’existence d’un bail écrit, lequel peut également être verbal.
CA Nouméa, ch. civ., 23 janvier 2025, n° 23/00192
Baux commerciaux : nécessité d'un bail
Le contrat oral ne peut être qualifié de bail commercial que s’il est démontré que le bailleur et le preneur se sont accordés sur l’objet de la location, à savoir l’occupation d’un local commercial ainsi que le paiement de sommes, correspondant à des loyers, au titre de cette occupation, étant précisé qu’il est nécessaire d’apporter la preuve de l’existence de règlement à échéances successives.
CA Nouméa, ch. civ., 23 janvier 2025, n° 23/00192
Loyer : obligations respectives des parties
L'augmentation des charges supportées par les bailleurs, à raison de leurs obligations légales, qui, cumulées, ont abouti à une baisse du revenu locatif de 27,97 % au cours du bail expiré, constitue une modification notable des obligations des parties au cours du bail expiré.
Cass. 3e civ., 23 janvier 2025, n° 23-14.887
Prescription : point de départ
L’assignation en intervention forcée d'un bailleur, aux fins de le voir condamner à prendre en charge la quote-part des travaux de sécurité incendie lui incombant, constitue un litige relatif à la fixation du loyer renouvelé soumis à la prescription quinquennale à compter de la date de réception du rapport de la commission de sécurité, l’avis favorable de l’administration étant requis à peine de fermeture de l’établissement.
CA Bordeaux, 4e ch. com., 20 janvier 2025, n° 22/05210

Contrat d'entreprise : responsabilité en cas d'inexécution
La responsabilité de plein droit du garagiste réparateur qui trouve sa source dans un contrat d'entreprise et découle de l'article 1231 du Code civil s'étend aux dommages causés par le manquement à son obligation de résultat et il incombe à celui qui l'assigne de prouver que les dysfonctionnements allégués sont dus à une défectuosité déjà existante au jour de l'intervention du garagiste ou sont reliées à celle-ci, sans qu'il soit utile de prouver une faute du garagiste.
CA Paris, Pôle 5 ch. 10, 20 janvier 2025, n° 23/18235
Contrat d'entreprise : responsabilité en cas d'inexécution
Un long délai nécessaire pour la réparation d'un véhicule, s’agissant d’un dysfonctionnement ayant affecté le moteur, n'est pas en lui-même constitutif d'une violation par le garagiste de son obligation de réparation, de sorte que seuls le retard et le manque de diligence peuvent engager la responsabilité du garagiste réparateur.
CA Paris, Pôle 5 ch. 10, 20 janvier 2025, n° 23/18235
Contrat de construction : élément adjoint à l'existant
Les désordres, quel que soit leur degré de gravité, affectant un élément non destiné à fonctionner, adjoint à l'existant, relèvent exclusivement de la responsabilité contractuelle de droit commun du constructeur ou réputé constructeur.
CA Versailles, ch. civ. 1-4 construction, 20 janvier 2025, n° 21/05673

Redressement judiciaire : notion d'état de cessation des paiements
Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.
CA Toulouse, 2e ch., 21 janvier 2025, n° 24/01114
Liquidation judiciaire et rétablissement professionnel : confusion des patrimoines
Dès lors qu'il est établi qu'il y a eu un mélange patrimonial avec transfert d'actif de la société vers l'une des associée, que le déséquilibre patrimonial a été significatif, avec absence de contrepartie pour la société et que le caractère anormal et systématique de ces relations financières s'est poursuivies sur plusieurs années sans aucun intérêt pour la société appauvrie, il convient de retenir que ces relations anormales caractérisent une confusion des patrimoines, même si elles pourraient constituer également des fautes de gestion en cas de gérance de fait.
CA Nîmes, 4e ch. com., 17 janvier 2025, n° 24/02309
Liquidation judiciaire et rétablissement professionnel : arrêt des poursuites individuelles d'exécution
Il résulte de l'article L. 622-21 du Code de commerce que l'action introduite par le crédit-bailleur avant la mise en liquidation judiciaire de la société du débiteur, en vue de faire constater la résiliation du contrat pour défaut de paiement des loyers échus antérieurement au jugement d'ouverture ne peut, dès lors qu'elle n'a donné lieu à aucune décision passée en force de chose jugée, être poursuivie après ce jugement.
CA Paris, Pôle 1 ch. 8, 17 janvier 2025, n° 24/08874
Responsabilités et sanctions : faillite personnelle et autres mesures d'interdiction
Des dirigeants de droit et de fait qui ont utilisé sans vergogne les fonds de la société en s'octroyant des revenus étrangers à l'intérêt social de la société, s'illustrant ainsi par un comportement de prédateurs vis-à-vis de la société et ce, de manière systématique et assumée pendant plusieurs années, doivent être sanctionnés proportionnellement à la gravité des fautes commises par une mesure de faillite personnelle de 15 ans.