Pour rappel, la loi n°2017-399 du 27 mars 2017 a pour objectif la responsabilisation des entreprises composées d’au moins cinq mille salariés, y compris dans leurs filiales directes et indirectes, dont le siège social est fixé en France. Ces dispositions sont codifiées par les articles L. 225-102-4 et L. 225-102-5 du Code de commerce.
Cette loi renforce donc le devoir de vigilance des grandes entreprises, en matière de prévention des atteintes graves aux droits de l’Homme, à la santé, et à la sécurité des personnes. L’obligation de vigilance concerne tant les obligations de la société mère que celles de ses filiales, de ses sous-traitants et fournisseurs, dès lors qu’ils entretiennent une relation commerciale établie.
Le présent jugement a la particularité d’être le premier donnant injonction à la société mère d’appliquer le devoir de vigilance, et permet alors de mieux délimiter le plan de vigilance, et particulièrement la cartographie des risques.
En effet, il a été jugé que La Poste n’a pas respecté son devoir de vigilance en établissant une cartographie des risques trop peu précise :
« La cartographie des risques est très imprécise et ne permet pas de mesurer la stratégie d’évaluation indiquée par le plan de vigilance ni de déterminer s’il est conforme à la gravité des atteintes »
La cartographie des risques est dès lors définie comme un élément essentiel du devoir de vigilance, et doit nécessairement permettre l’identification des risques prioritaires. Elle apparaît ici comme une pierre angulaire permettant par la suite à La Poste de mettre en place un mécanisme de recueil des signalements, assorti d’un dispositif de suivi des mesures mises en place.
En l’espèce, La Poste avait mise en place des contrôles relatifs au travail illégal, au permis des chauffeurs et à leur alcoolémie sans que ces procédures d’évaluation et les risques associés ne figurent dans la cartographie des risques. Le Tribunal enjoint dès lors le renforcement de la cartographie des risques, afin de permettre leur identification précise, leur analyse et une priorisation pertinente.
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Le mécanisme d’alerte et le dispositif de suivi ont été, eux aussi, jugés insuffisants.
Toutefois, si le Tribunal renforce l’importance et l’étendue de la cartographie des risques, les demandes de l’organisation syndicale Sud PTT allant au-delà de l’obligation de vigilance telle que définie dans la loi du 27 mars 2017 sont rejetées notamment celle tendant à obtenir la liste des sous-traitants et fournisseurs avec lesquels est entretenue une relation commerciale établie.
La demande d’injonction d’établir des mesures de sauvegarde concernant la prévention du travail dissimulé par les sous-traitants, du marchandage, du prêt illicite de main d’œuvre, des risques psychosociaux et du harcèlement a également été refusée.
Enfin, le Tribunal ne fait pas droit à la demande de l’organisation syndicale de mettre en œuvre des mesures de vigilance en matière de lutte contre le harcèlement, le travail forcé et la sous-traitance illicite, ces thèmes ne figurant pas dans le devoir de vigilance établi par la loi du 27 mars 2017.