Une avancée majeure dans la lutte contre les abus en ligne !

Le projet de loi pour la sécurisation et la régulation de l’espace numérique : la Commission spéciale examine le projet de loi en séance publique du 4 au 13 octobre 2023.

Publié le 
10/6/2024
Une avancée majeure dans la lutte contre les abus en ligne !
 

Une étape importante a été franchie après des mois de travail, de consultations et de réflexion sur les enjeux liés à l’espace numérique en France, et en particulier ses dangers pour les citoyens, les enfants, les entreprises et les collectivités. Ce billet analysera les principales propositions dudit projet de loi ainsi que les amendements apportés par la Commission spéciale.

1- Les principales propositions du projet de loi


1.1- Le cloud et les pratiques commerciales déloyales

Le projet de loi propose d'interdire aux prestataires de solutions cloud de facturer des frais aux clients pour le transfert de données vers d'autres infrastructures, locales ou concurrentes, à moins que ces frais ne soient directement liés aux coûts réels du transfert, et à condition que ces coûts soient clairement communiqués. De plus, il est recommandé de prohiber la pratique qui consiste à lier la vente d'un produit ou service à la souscription simultanée d'un contrat de services cloud, considérée comme une pratique commerciale déloyale. De même, l'octroi de crédits ou de services d'une durée supérieure à un an, susceptible de retenir les utilisateurs, serait également interdit.

Le projet de loi entend soumettre les fournisseurs de services cloud à trois exigences :

(i) Assurer l'interopérabilité sécurisée avec les services de l'utilisateur ou d'autres fournisseurs de cloud offrant des fonctionnalités similaires.

(ii) Permettre la portabilité sécurisée des actifs numériques vers les services de l'utilisateur ou d'autres fournisseurs de cloud proposant des fonctionnalités similaires.

(iii) Fournir gratuitement aux utilisateurs et aux fournisseurs de services tiers désignés par les utilisateurs les interfaces de programmation d'applications nécessaires à l'interopérabilité et à la portabilité, ainsi que des informations détaillées sur le service cloud pour faciliter la communication avec ce service.

1.2- La lutte contre les hypertrucages

Le projet de loi s’attaque aux « hypertrucages » ou « deepfakes » qui sont des contenus trompeurs créés par l’intelligence artificielle. Il entend sanctionner la diffusion de tels contenus sans consentement de la personne, sujet du deepfake, et sans mention de leur nature falsifiée. De plus, il prohibe la diffusion de montages pornographiques générés par logiciel, même si leur caractère falsifié est indiqué.

Une autre mesure-clé introduite par le projet de loi consiste dans la mise en place d’une peine complémentaire de bannissement des réseaux sociaux. Cette dernière pourrait être prononcée en cas de condamnation pour des infractions graves telles que la haine en ligne, le cyberharcèlement ou d’autres délits similaires. Par ailleurs, le Sénat a élargi le champ des infractions concernées, y compris les menaces et les intimidations envers les élus, et créé un « délit d’outrage en ligne » avec une amende forfaitaire délictuelle de 300 euros.

Le projet de loi se donne également pour objectif la régulation du cloud et la création d’une plateforme de données sur les meublés de tourisme. Une réglementation des jeux à objets numériques monétisables (JONUM) est aussi proposée.

1.3- La paralysie des sites pornographiques non conformes

Le rôle de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) est renforcé dans la lutte contre l’accès des mineurs aux sites pornographiques. En effet, le projet de loi prévoit de permettre à l’Autorité d’ordonner le blocage de sites pornographiques qui ne vérifient pas l’âge de leurs visiteurs sans autorisation préalable d’une décision judiciaire.

Par ailleurs, le projet de loi entend également lutter contre les tentatives d’escroqueries en ligne en proposant un filtre anti-arnaques qui avertira les utilisateurs des sites potentiellement malveillants.

2- Les principaux amendements proposés par la Commission spéciale  

La Commission spéciale a apporté des amendements significatifs au projet de loi initial, renforçant ainsi ses dispositions. Parmi ceux-ci :

  • L’établissement d’un cadre juridique strict et complet en matière de JONUM afin de soutenir le secteur du jeu tout en assurant une protection adéquate aux utilisateurs ;
  • Les sites pornographiques pourront être sanctionnés par des amendes allant jusqu’à 4% de leur chiffre d’affaires mondial en cas de non-respect des références pour la vérification de l’âge des utilisateurs ;
  • Les moteurs de recherche et les fournisseurs d’accès internet devront déréférencer les sites pornographiques non conformes dans un délai de 48 heures.
  • Des messages clairs et compréhensibles devront être affichés par les navigateurs afin d’avertir les utilisateurs de leur arrivée sur des sites malveillants ;
  • La peine complémentaire de bannissement des réseaux sociaux pourra être prononcée pour des infractions telles que la diffamation, les injures publiques discriminatoires et l’entrave à l’avortement ;
  • En début d’année scolaire, seront adressés aux parents d’élèves des mesures d’information et de sensibilisation à la citoyenneté numérique, au cyberharcèlement, aux contenus illicites ainsi qu’aux risques de manière générale liés aux écrans.

3- L’approbation par la Commission européenne du projet de loi

La Commission européenne a donné son accord à la majeure partie du projet de loi, bien qu'elle ait noté que certains éléments se chevauchent avec les réglementations de l'Union européenne. Elle a émis des réserves concernant deux points spécifiques : premièrement, elle s'oppose à l'obligation d'afficher un avertissement avant d'accéder à des contenus pornographiques simulant des actes criminels ou délictueux, et deuxièmement, elle est d'avis que la responsabilité de rechercher les comptes sur les réseaux sociaux des cyberharceleurs condamnés à une suspension temporaire devrait exclusivement incomber à l'autorité administrative.

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