Au sommaire :
- Analyses des décisions significatives à la une
- Droit de la concurrence
- Droit de la consommation
- Droit européen des affaires
- Droit des sociétés
- Propriété industrielle
- Baux commerciaux
- Contrats d'affaires
- Procédures collectives
- Droit pénal des affaires
Retrouvez l'analyse de nos juristes des décisions significatives les plus récentes
Rupture brutale de relations commerciales établies : non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle
L'action en concurrence déloyale et l'action en rupture brutale de relations commerciales établies peuvent se cumuler, car la première, contrairement à la seconde, vise à réparer le gain manqué qui persiste postérieurement à l'expiration du préavis.
CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 6 novembre 2024, n° 23/14142
Actions ouvertes en cas d'abus de dépendance : clause attributive de compétence
Un distributeur qui a entretenu avec son fournisseur des relations commerciales pendant plus de quinze ans, en s’acquittant de factures contenant une référence claire à des conditions générales de vente (CGV), mises expressément à sa disposition et contenant une clause attributive de juridiction aux tribunaux d'Arnsberg pour tout litige découlant de ces CGV ou des contrats de vente conclus en vertu de celles-ci, et rappelées dans les listes de prix qui lui étaient adressées annuellement, est réputé les avoir tacitement acceptées, et, avec elles, l'attribution de compétence y figurant.
CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 13 novembre 2024, n° 23/00096
Actions ouvertes en cas d'abus de dépendance : spécialisation des juridictions
Lorsqu'un défendeur assigné devant une juridiction non spécialisée demande à titre reconventionnel l'application des dispositions de l'article L. 442-1, I, 2° du Code de commerce relatives au déséquilibre significatif, il y a lieu, lorsque cette requête est interdépendante de celle du demandeur, de renvoyer l'entier litige au juge spécialisé.
TJ Strasbourg, juge de la mise en état, 5 novembre 2024, n° 23/00765
Sanctions civiles : préjudice
La victime de pratiques anticoncurrentielles doit être indemnisée tant de son préjudice passé que du préjudice futur résultant des effets persistants des pratiques.
T. com. Paris, 9e ch. mixte, 21 octobre 2024, n° 2022039370
Concentrations : notion d'entrave significative à une concurrence effective
Il découle du libellé des dispositions l’article 2, paragraphes 2 et 3, du règlement 139/2004 que le critère essentiel pour examiner la compatibilité d’une concentration avec le marché intérieur réside dans la création d’une entrave significative à une concurrence effective (ESCE) dans celui-ci, l’utilisation de l’adverbe “ notamment ” indiquant que la création ou le renforcement d’une position dominante constitue l’un des scénarios dans lesquels une telle entrave peut être constatée, de sorte qu’une concentration créant ou renforçant une position dominante ne donne pas automatiquement lieu à une ESCE et qu'il n’existe aucune automaticité entre le critère de la position dominante et celui de l’ESCE.
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-58/20
Concentrations : incompatibilité de l'opération/déconcentration
La Commission ne peut déclarer une concentration incompatible avec le marché intérieur que si elle constate une entrave significative à une concurrence effective (ESCE), qui est la conséquence directe et immédiate de la concentration.
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-58/20
Constitution de la société : reprise des actes
Une société ne peut éventuellement reprendre, après son immatriculation, que les “engagements souscrits” par ses fondateurs, soit des actes juridiques, et non des faits juridiques, comme des actes de concurrence déloyale.
CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 6 novembre 2024, n° 23/14142
Apports partiels d'actifs : transmission universelle de patrimoine
Dès lors que l'apport partiel d'actif emporte, lorsqu'il est placé sous le régime des scissions, transmission universelle, de la société apporteuse à la société bénéficiaire, de tous les droits, biens et obligations de la société dépendant de la branche d'activité qui fait l'objet de l'apport, et que les parties ont expressément exclu toute solidarité entre elles au titre du passif de cette branche d'activités, la société apporteuse ne peut plus être tenue personnellement responsable à l'égard des tiers des fautes commises dans le cadre de l'opération.
Cass. com., 6 novembre 2024, n° 22-23.654
Garantie d'actif et de passif : délai
Des sociétés qui n'ont pas respecté le délai qui leur était contractuellement imparti pour informer le garant de la survenance d'un événement de nature à mettre en jeu sa responsabilité dans le cadre d'une garantie d'actif et de passif doivent voir leurs demandes rejetées.
Cass. com., 6 novembre 2024, n° 23-15.254
SARL : expert de gestion
Ni la consultation ou la demande de communication préalable d'éléments comptables ni le fait de poser au gérant une question écrite relative à la gestion de la société ne constituent des conditions préalables à une demande d'expertise fondée sur les dispositions de l'article 145 du Code de procédure civile.
CA Toulouse, 3e ch., 6 novembre 2024, n° 23/03476
Liquidation judiciaire : dessaisissement du débiteur
Un établissement de crédit commet une faute en accordant un prêt à l'associé d'une société en nom collectif sans vérifier, par une simple demande auprès du greffe des tribunaux de commerce ou consultation du site internet “Infogreffe” si celui-ci n'est pas soumis à une procédure de liquidation judiciaire et dessaisi de ce fait de la gestion de son patrimoine.
Cass. com., 23 octobre 2024, n° 23-12.638
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Action en concurrence déloyale : préjudice
Le préjudice consécutif à un détournement de clientèle, indemnisable dans le cadre d'une action en concurrence déloyale, réside dans le gain manqué et dans la perte subie découlant directement de la perte définitive des revenus générés à l'occasion de la relation rompue, peu important la soudaineté de sa cessation.
CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 6 novembre 2024, n° 23/14142
Action en concurrence déloyale : litige international
Une demande de dommages-intérêts pour concurrence déloyale qui ne peut s’analyser comme “ tout litige découlant des CGV ” pour entrer dans le champ d’application de la clause attributive de compétence doit être portée, en application de 7.2 du règlement Bruxelles I bis, devant la juridiction du lieu de production des faits dommageables allégués de concurrence déloyale, lieu du siège de l’une des sociétés défenderesses, de sorte que le jugement doit être infirmé en ce qu’il a déclaré le Tribunal de commerce de Marseille incompétent.
CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 13 novembre 2024, n° 23/00096
Débauchage : existence d'une désorganisation
Le débauchage simultané de cinq salariés, sur un effectif total de trente-deux, ne permet pas de caractériser un acte de concurrence déloyale, en dehors de leur poste dédié aux produits de leur nouvel employeur, dès lors que la société plaignante n’expose pas en quoi ces salariés occupaient des postes stratégiques au regard de l’organisation de l’entreprise et de son activité, ni en quoi leur départ était de nature à la désorganiser, ni ne justifie de difficultés particulières pour leur remplacement.
CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 13 novembre 2024, n° 23/00096
Délais de paiement : harmonisation européenne
Le caractère non-transfrontalier d’une transaction commerciale n'exclut pas l’application de la directive 2011/7 relative aux délais de paiement.
CJUE, 6e ch., 14 novembre 2024, n° C-643/23
Délais de paiement : harmonisation européenne
Une personne physique qui exerce à titre indépendant et de manière habituelle la profession d’actrice contre rémunération, sans toutefois disposer d’installations propres, ni de personnel, ni d’outils ou d’équipements affectés à son activité professionnelle, relève de la notion d’ “entreprise”, au sens de l’article 2, point 3, de la directive 2011/7 relative aux délais de paiement.
CJUE, 6e ch., 14 novembre 2024, n° C-643/23
Clauses abusives entre professionnels : champ d'application rationae materiae
Les contrats de location financière conclus par les établissements de crédit et sociétés de financement ne sont pas soumis à l'article L. 442-1, I, 2° du Code de commerce relatif au déséquilibre significatif.
TJ Nancy, Pôle civ. sect. 4, 17 octobre 2024, n° 21/01170
Actions ouvertes en cas d'abus de dépendance : action de nature délictuelle ou contractuelle
En présence d'une relation commerciale établie depuis de longues années, se manifestant par une succession de ventes assorties de conditions générales, qui permettent de caractériser une relation contractuelle, fût-elle tacite, les critères de compétence juridictionnelle applicables sont ceux de la matière contractuelle au sens du règlement 1215/2012.
CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 13 novembre 2024, n° 23/00096
Sanctions civiles : compétence
Un groupe établi en Irlande ne peut être assigné en France, lieu du siège de l’une de ses filiales, en vertu de l’article 8, paragraphe 1 du règlement Bruxelles I bis, lorsqu’il n’est pas établi que celle-ci ait joué un rôle actif dans la commission des pratiques anticoncurrentielles à l’origine du dommage dont il est demandé réparation.
T. com. Paris, 9e ch. mixte, 21 octobre 2024, n° 2022039370
Sanctions civiles : faute
Une pratique qualifiée d’anticoncurrentielle par l’Autorité de la concurrence pour la période postérieure à la transposition de la directive 2014/104 est présumée fautive également pour la période antérieure à cette transposition.
T. com. Paris, 9e ch. mixte, 21 octobre 2024, n° 2022039370
Sanctions civiles : préjudice
Le taux d'actualisation du préjudice démontré doit être limité au taux légal + 0,5 point lorsque la victime ne justifie pas de projets manqués du fait de la pratique et que le taux de l'emprunt qu’elle allègue avoir dû souscrire résulte d’un choix actionnarial et non industriel.
T. com. Paris, 9e ch. mixte, 21 octobre 2024, n° 2022039370
Concentrations : disparition d'un opérateur
L’allégation de la requérante selon laquelle le cumul des parts de marché et la valeur de l’indice Herfindahl-Hirschman (IHH) sur le marché MDU seraient très élevés est indifférente pour contester la conclusion de la Commission selon laquelle les produits commercialisés par les parties à la concentration n’étaient, en pratique, pas en concurrence directe, dès lors que ces données n’ont pas vocation à démontrer l’existence d’une concurrence directe entre deux parties à une concentration préalablement à celle-ci, l'indice IHH, utilisé pour mesurer les degrés de concentration sur un marché, ne pouvant donner une première indication que des pressions concurrentielles s’exerçant à l’issue d'une concentration.
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-69/20
Concentrations : disparition d'un opérateur
Des entreprises qui ne se livrent pas une concurrence directe peuvent néanmoins se trouver dans un rapport de concurrence indirecte, notamment lorsqu’elles subissent des pressions concurrentielles similaires de la part d’autres entreprises que chacune d’entre elles concurrence directement ou lorsque d’autres facteurs, tels que les exigences imposées par les clients, limitent de façon comparable leurs possibilités de fixer leurs prix et conditions commerciales.
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-69/20
Concentrations : disparition d'un opérateur
Lorsque la Commission constate, premièrement, que l’entreprise concernée n’a accompli aucune démarche pour entrer sur le marché dans un laps de temps suffisamment court calculé à la lumière des caractéristiques du marché, deuxièmement, que ladite entreprise ne considère pas qu’il est économiquement rationnel et intéressant pour elle d’entrer sur le marché et donc, troisièmement, que ladite entreprise n’envisage pas d’entrer sur le marché à l’avenir d’une manière significative, elle peut, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, conclure que l’entreprise en cause n’est pas un concurrent potentiel de l’autre partie à la concentration.
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-69/20
Concentrations : disparition d'un opérateur
De simples analyses comparatives commerciales visant à surveiller et éventuellement à imiter les meilleures pratiques dans le secteur ne sauraient être qualifiées de pressions concurrentielles indirectes entre les parties à la concentration.
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-64/20
Concentrations : notion d'entrave significative à une concurrence effective
La circonstance qu’une opération de concentration entre deux entreprises cause une augmentation des ressources de l’entité issue de la concentration en termes de synergies ou de réductions de coûts, même si elle est avérée, n’est pas suffisante, en soi, pour déclarer ladite opération incompatible avec le marché intérieur, il faut encore démontrer que cette augmentation des ressources donne lieu à une entrave significative à une concurrence effective (ESCE).
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-69/20
Concentrations : notion d'entrave significative à une concurrence effective
Même si à l’issue de l’analyse de la compatibilité d’une opération de concentration avec le marché intérieur, au regard d’un ensemble d’éléments, tels que la structure des marchés en cause, la concurrence réelle ou potentielle d’entreprises, la position ainsi que la puissance économique et financière des entreprises concernées, les possibilités de choix des fournisseurs et des utilisateurs, l’existence de barrières à l’entrée ainsi que l’évolution de l’offre et de la demande, la Commission a constaté une augmentation de la puissance financière de l’entité issue de la concentration, propre à celle-ci, une telle constatation ne suffit pas, à elle seule, à conclure à une entrave significative à une concurrence effective (ESCE).
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-58/20
Concentrations : notion d'entrave significative à une concurrence effective
Une entrave significative à une concurrence effective (ESCE), qui découlerait des décisions futures de l’entité issue de la concentration, ne peut être considérée comme une conséquence directe et immédiate de la concentration la rendant incompatible avec le marché intérieur que si ce comportement futur est rendu possible et économiquement rationnel par la modification des caractéristiques et de la structure du marché causée par la concentration.
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-58/20
Concentrations : pouvoir de la Commission
La requérante n’est fondée à soutenir que la Commission n’a pas respecté le point 15 de la communication concernant les mesures correctives en acceptant un engagement comportemental, en vue de remédier à un problème de concurrence de nature horizontale, même si dans cette communication, la Commission affiche une préférence pour les engagements structurels, en particulier en raison de la facilité de leur mise en œuvre, dès lors que c’est principalement le caractère approprié et suffisant des engagements pour résoudre le problème de concurrence identifié, ainsi que la certitude que lesdits engagements pourront être mis en œuvre, qui gouverne l’acceptation de ces derniers.
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-69/20
Aides d'Etat : recours en carence
La Commission ne prend pas une position claire et définitive, au sens de l’article 265 TFUE, sur l’invitation à agir lorsqu'elle avance qu'elle n'est pas compétente pour adopter une décision au titre du règlement 2015/1589 en réponse aux plaintes dont elle est saisie, mais que, à titre subsidiaire, sa lettre doit tout de même être considérée comme une lettre fondée sur l’article 24, paragraphe 2, deuxième alinéa, de ce règlement.
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-141/23
Aides d'Etat : recours en carence
N’ayant entrepris, en ce qui concerne les aides nationales dénoncées, aucune démarche ni a fortiori adopté de décision au titre du règlement 2015/1589, alors qu’elle était tenue de le faire, la Commission s’est trouvée en situation de carence à l’expiration du délai de deux mois suivant l’invitation à agir, de sorte que les griefs des requérants visant à démontrer que la Commission a manqué à son obligation d’agir au titre du règlement 2015/1589 sont fondés.
TUE, 7e ch. élargie, 13 novembre 2024, n° T-141/23
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Pratiques commerciales déloyales : pratiques commerciales agressives
La pratique commerciale consistant à proposer simultanément au consommateur une offre de prêt personnel et une offre d’un produit d’assurance non lié à ce prêt ne constitue pas une pratique commerciale agressive en toutes circonstances, au sens de la directive 2005/29.
CJUE, 5e ch., 14 novembre 2024, n° C-646/22
Pratiques commerciales déloyales : pratiques commerciales agressives
La directive 2005/29 ne s’oppose pas à une mesure nationale qui permet à une autorité nationale, une fois constaté le caractère “ agressif ” ou plus généralement, le caractère “ déloyal ” d’une pratique commerciale adoptée par un professionnel donné, d’imposer à ce professionnel d’accorder au consommateur un délai de réflexion raisonnable entre les dates de la signature du contrat d’assurance et du contrat de prêt, à moins qu’il n’existe d’autres moyens moins attentatoires à la liberté d’entreprise qui soient tout aussi efficaces pour mettre fin au caractère “ agressif ” ou, plus généralement, “ déloyal ” de ladite pratique.
CJUE, 5e ch., 14 novembre 2024, n° C-646/22
Obligation d'information et de conseil : professionnel
Le devoir de conseil du vendeur informatique qui consiste à rechercher une solution qui soit adaptée aux besoins du client et à le mettre en garde contre les difficultés que présente l'implantation et l'exploitation d'un équipement présentant une certaine complexité, a pour corollaire l’obligation de collaboration de l’acheteur, qui doit fournir les éléments nécessaires pour apprécier ses besoins, et notamment procéder à la réalisation d'un cahier des charges.
CA Douai, 2e ch. sect. 2, 17 octobre 2024, n° 23/01696
Contrats conclus hors établissement : droit de rétractation
La société qui a conclu hors établissement un contrat portant sur la création d'un site internet et qui a rempli un formulaire de renonciation à son droit de rétractation au moment de sa signature “ en application de l’article L. 221-25 du Code de la consommation ” ne saurait être privée de ce droit, dès lors que la possibilité de renonciation offerte par ce texte ne peut s'appliquer qu'aux contrats portant sur la fourniture d'eau, de gaz ou d'électricité ou la fourniture de chauffage urbain.
CA Douai, 2e ch. sect. 2, 17 octobre 2024, n° 23/01154
Contrats conclus hors établissement : droit de rétractation
Le contrat prévoyant la création d'un site vitrine “ standard ” (menu, articles, photos), incluant un formulaire de contact, la création et l'hébergement d'une adresse e-mail et d'une base de données ainsi qu'un suivi de référencement trimestriel, les options flash-info, diaporama, newsletter, et témoignages ayant été cochées, ne constitue pas un contrat portant sur la fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés, au sens de de l'article L. 221-28, 3°, du Code de la consommation, exclu en tant que tel du champ d’application du droit de rétractation, dès lors que le professionnel ne justifie ni d’un cahier des charges, ni de la transmission d’instructions particulières.
CA Douai, 2e ch. sect. 2, 17 octobre 2024, n° 23/01154
Clauses abusives : préavis
La clause qui prévoit un mécanisme conventionnel de déchéance du terme après mise en demeure préalable, mais sans préciser la durée du délai convenu pour régulariser les impayés, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur, ainsi exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement.
CA Aix-en-Provence, ch. 1-9, 17 octobre 2024, n° 23/09731
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Droit européen des affaires : applicabilité directe du droit européen
Même si une directive laisse aux États membres une certaine marge d’appréciation lorsqu’ils adoptent les modalités de sa mise en œuvre, une disposition de cette directive peut être considérée comme ayant un caractère inconditionnel et précis dès lors qu’elle met à la charge des États membres, dans des termes non équivoques, une obligation de résultat précise et qui n’est assortie d’aucune condition quant à l’application de la règle qu’elle énonce.
CJUE, 1re ch., 14 novembre 2024, n° C-230/23
Droit européen des affaires : applicabilité directe du droit européen
L’article 5, paragraphe 2, a) et b), de la directive 2001/29, qui impose aux États membres qui choisissent d’appliquer des exceptions ou limitations au droit de reproduction des obligations concrètes pour veiller à ce qu’une compensation équitable soit assurée aux titulaires de droits, est doté d’un effet direct, de sorte qu'en l’absence de transposition correcte de cette disposition, un particulier peut l’invoquer, en vue d’écarter l’application de règles nationales l’obligeant à payer une rémunération pour compensation équitable imposée en violation de ce texte.
CJUE, 1re ch., 14 novembre 2024, n° C-230/23
Consommation : pratiques commerciales déloyales
La notion de “ consommateur moyen ”, au sens de la directive 2005/29, définie par référence à un consommateur normalement informé ainsi que raisonnablement attentif et avisé, n’exclut pas que la capacité de décision d’un individu est susceptible d’être altérée par des contraintes, telles que des biais cognitifs.
CJUE, 5e ch., 14 novembre 2024, n° C-646/22
Procédures d'insolvabilité : compétence judiciaire
Les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel la procédure d’insolvabilité a été ouverte sont compétentes pour connaître de toute action qui découle directement de la procédure d’insolvabilité et qui y est étroitement liée.
CJUE, 2e ch., 14 novembre 2024, n° C-394/22
Compétence judiciaire : exclusion des faillites
Si l’existence d’un certain lien entre l’action intentée et la procédure d’insolvabilité ne saurait être niée, dès lors que cette action a été introduite après la mise en insolvabilité de la société débitrice dans le cadre de laquelle la partie requérante au principal a produit une déclaration de créance dans la masse de l’insolvabilité pour la même créance que celle visée par cette action, la seule identité entre la créance réclamée devant la juridiction de renvoi et celle produite devant les curateurs de l’insolvabilité n'est pas suffisante pour faire relever cette même action de l’exclusion visée à l’article 1er, paragraphe 2, b), du règlement 1215/2012.
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Constitution de la société : reprise des actes
Une vente qui n'a pas été souscrite au nom d'une société en formation mais par la société elle-même, à une date où cette dernière n'était pas encore immatriculée, ne peut être mise à sa charge sans que le juge caractérise si l'intention commune des parties à la vente était qu'elle fût conclue au nom ou pour le compte de la société.
Cass. 3e civ., 17 octobre 2024, n° 22-21.616
Constitution de la société : reprise des actes
Une société ne peut être tenue de régler une facture impayée par ses fondateurs s'il n'est pas établi qu'en signant la lettre de mission du prestataire, ces derniers aient agi au nom ou pour le compte de la société.
Cass. com., 9 octobre 2024, n° 23-12.401
Garantie d'actif et de passif : conditions de mise en oeuvre
Le cessionnaire des actions d'une SAS qui s'est mépris sur l'étendue de ses droits lorsqu'il a demandé à bénéficier de la garantie de passif, ne peut se voir reprocher une mise en oeuvre de mauvaise foi de celle-ci, dépassant le droit d'agir.
Cass. com., 6 novembre 2024, n° 23-13.815
Garantie d'actif et de passif : délai
Lorsque l'opposition du cédant n'intervient pas dans le délai prévu par la clause de garantie d'actif et de passif, ce dernier se trouve déchu de son droit à contestation et est réputé avoir accepté la réclamation du cessionnaire.
CA Paris, Pôle 5 ch. 9, 17 octobre 2024, n° 22/10195
Garantie d'actif et de passif : étendue
L'acceptation par le garant de la réclamation émise par le bénéficiaire ne saurait, en soi, priver d'effet les autres stipulations de la convention, en particulier la clause instituant un plafond de garantie, dont la portée est distincte de la mise en œuvre proprement dite de la garantie.
CA Paris, Pôle 5 ch. 9, 17 octobre 2024, n° 22/10195
Groupe de sociétés : co-emploi
Un courriel par lequel le responsable des relations humaines d'une société demande à voir la salarié d'une autre société appartenant au même groupe ne suffit pas à établir l'immixtion permanente de la première dans la gestion économique et sociale de la seconde, et la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière.
CA Paris, Pôle 6 ch. 3, 6 novembre 2024, n° 21/07676
SNC : qualité de commerçant
L’associé d'une société en nom collectif, qui répond indéfiniment et solidairement des dettes sociales, possède nécessairement la qualité de commerçant.
Cass. com., 23 octobre 2024, n° 23-12.638
SARL : responsabilité
L'action en responsabilité délictuelle de deux co-gérants de SARL au titre d'actes de concurrence déloyale commis après l'immatriculation de la société est prescrite lorsqu'elle est engagée plus de trois ans après la connaissance des faits par leur victime.
CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 6 novembre 2024, n° 23/14142
SARL : expert de gestion
Il ne peut être demandé à l'expert désigné sur le fondement de l'article 145 du Code de procédure civile de se prononcer sur la “régularité” de certaines opérations, en se livrant à une analyse en droit qui entre dans l'office exclusif d'une juridiction, ni d'apprécier la pertinence de dépenses ou de l'usage de certains biens.
CA Toulouse, 3e ch., 6 novembre 2024, n° 23/03476
SAS : assemblées générales
La décision prise par l’associé majoritaire d’une SAS de passer outre le refus du président en soumettant de lui-même au vote de l'assemblée générale une résolution relative à la révocation de ce dernier, en contravention avec les dispositions statutaires, est source d'un trouble manifestement illicite en raison du risque sérieux d'annulation de cette résolution au visa de l'article L. 227-9 du Code de commerce.
CA Pau, 2e ch. sect. 1, 28 octobre 2024, n° 24/00737
Sociétés civiles : associés
Conformément aux articles 1005 et 1014 du Code civil, le légataire des parts sociales d’une SCI qui n'a engagé aucune action en exécution de son legs après en avoir obtenu la délivrance n'apparaît pas pleinement propriétaire de ces parts et n’est, par conséquent, pas fondé à se prévaloir de la qualité d'associé de la société qui n'appartient qu'au nu-propriétaire.
CA Paris, Pôle 1 ch. 2, 10 octobre 2024, n° 24/01499
Retrouvez l'analyse de nos juristes des décisions les plus récentes en droit de la propriétéindustrielle
Marques : droit d'interdire l'usage dans la vie des affaires
En application du principe de spécialité, des modèles réduits de personnages, d’animaux et d’éléments mobiliers représentatifs de l’univers du cirque ne sont ni similaires ni identiques à ceux pour laquelle la marque en cause a été enregistrée (articles de papeterie ou de publicité, matériel de travaux manuels ou créatifs), de sorte qu'il ne peut être interdit à la titulaire du signe qui les revêt d'en faire usage dans la vie des affaires.
TJ Paris, 3e ch. sect. 1, 7 novembre 2024, n° 22/10431
Retrouvez l'analyse de nos juristes des décisions les plus récentes en baux commerciaux
Formation du contrat de bail : société en formation
Dès lors que le siège de la société sous-locataire doit s’établir à l’adresse des locaux pris à bail, la signature du contrat de sous-location litigieux, par le gérant désigné au terme de l’acte constitutif, s’analyse comme un acte préparatoire d’une société en cours de formation, de sorte que ce contrat est valable.
Cass. com., 6 novembre 2024, n° 23-20.089
Résiliation du bail : perte de la chose louée
L’impossibilité d’exploiter ne peut être assimilée à une perte de la chose donnée à bail au sens de l’article 1722 du Code civil dès lors que le preneur dispose librement des locaux et peut ouvrir au moins partiellement ces derniers pour permettre l’exploitation de son activité, d’autant plus que la destination commerciale est extrêmement large, que l’activité de salle d’escalade et de sport n’est pas exclusive et qu’il peut parfaitement pratiquer une activité de restauration à emporter ou de location de salles.
CA Toulouse, 2e ch., 29 octobre 2024, n° 21/03143
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Contrat de vente : devoir de conseil
L’acquéreur, pourtant professionnel dans le secteur de l'agro-alimentaire, qui s'est abstenu de suivre les recommandations du fabricant et d'effectuer les tests qui lui auraient permis de révéler l'incompatibilité de l'opercule avec le ketchup doit voir son action pour manquement à l’obligation de conseil rejetée, dès lors que la société venderesse, qui ne connaissait pas la destination finale du produit, a délivré les informations réclamées avec toute la prudence nécessaire et donné tous les conseils utiles en indiquant qu'en théorie, la spécification utilisée était adaptée, qu'au besoin elle avait une autre spécification pour des conditions d'acidité encore plus extrêmes, que le test de migration effectué était conforme pour une solution d'acide acétique de 3 %, que pour déterminer la durée de conservation, la réalisation de tests selon une procédure standard était recommandée, et que la responsable de la qualité, dont les coordonnées étaient communiquées, était joignable pour plus d'informations.
CA Caen, 2e ch. civ., 17 octobre 2024, n° 23/00893
Contrat de vente : obligation de délivrance conforme
Le manquement de la société venderesse à son obligation de délivrance conforme n'est pas démontré dès lors que la société acquéreuse ne l'avait pas préalablement informé de la nature du produit (ketchup) destiné à être conditionné avec les opercules achetés et que ceux-ci répondent à la caractéristique spécifiée par l’acheteur lors de la commande, à savoir un produit compatible avec des contenus gras et acides présentant un Ph de 3,6, comme l'indique l'expert judiciaire.
CA Caen, 2e ch. civ., 17 octobre 2024, n° 23/00893
Contrat de vente : garantie des vices cachés
Malgré une épaisseur apparemment mal contrôlée de la couche de polyéthylène du système trois couches de l'opercule, l’expert judiciaire et le sapiteur n'indiquent ni qu'il y ait une insuffisance d'épaisseur du film, ni que l'hétérogénéité relevée constituerait une défectuosité de l'opercule ou serait la cause du désordre lié à la migration du ketchup à travers l’opercule, de sorte que la société acquéreuse qui n'a pas mis en oeuvre les tests de vieillissement recommandés par la société venderesse qui auraient permis de montrer dans le temps l'incompatibilité de l'emballage avec le ketchup, n’est pas fondée à invoquer la garantie des vices cachés.
CA Caen, 2e ch. civ., 17 octobre 2024, n° 23/00893
Contrat de construction : garantie décennale
Le maître de l'ouvrage-vendeur qui, dès sa prise de possession, a livré le bien immobilier aux acquéreurs, donné par ces derniers le jour même à bail, qui a établi une attestation d'achèvement des travaux et installé, à ses frais, un groupe électrogène destiné à assurer l'alimentation en électricité de la villa, a clairement voulu prendre possession et accepter, sans équivoque, l'ouvrage, de sorte qu'il s'en déduit une réception tacite à cette date.
Cass. 3e civ., 7 novembre 2024, n° 22-22.793
Contrat de construction : garantie décennale
Lorsqu'à la suite de la constatation par commissaire de justice de l'abandon du chantier, d'inachèvements et de non-façons, le maître d'ouvrage inscrit au passif de l'entrepreneur la somme correspondant aux chiffrages des reprises listées dans ce constat, cette déclaration de créances ne manifeste pas la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir les travaux dans leur état d'avancement à la date de l'abandon du chantier.
Cass. 3e civ., 7 novembre 2024, n° 23-13.283
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Sauvegarde : champ d'application de l'action en revendication
Les articles L. 624-10 et R. 624-14 du Code de commerce relatifs à la demande en restitution n'imposent pas au crédit-bailleur, dont le contrat a été publié, de délai pour l'exercice de l'action en restitution devant le juge-commissaire.
CA Basse-Terre, 2e ch., 2 octobre 2024, n° 22/00919
Liquidation judiciaire : notion d'état de cessation des paiements
La débitrice, qui, à la suite d'une procédure judiciaire, a bénéficié d'une indemnisation importante lui permettant de faire face à son passif, ne se trouve pas en état de cessation de paiements au jour où le juge statue, de sorte que son placement en liquidation judiciaire ne se justifie plus.
CA Paris, Pôle 5 ch. 8, 8 octobre 2024, n° 24/04793
Liquidation judiciaire : redressement manifestement impossible
Est manifestement impossible, le redressement de la société qui ne justifie pas de capacités de remboursement de nature à apurer ses dettes, dès lors qu'au vu de ses résultats passés et en l'absence de restructuration ou de réorientation de son activité ou encore de nouveaux contrats ou carnets de commande, la probabilité qu'elle atteigne les objectifs fixés dans un prévisionnel d'exploitation très optimiste, ni validé par un expert-comptable, ni étayé par des explications ou des éléments circonstanciés, est inexistante.
CA Paris, Pôle 5 ch. 8, 8 octobre 2024, n° 24/04793
Liquidation judiciaire : droits propres
Le débiteur dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, qui conserve néanmoins le droit propre de défendre aux instances relatives à la détermination de son passif et aux mesures subséquentes affectant directement son patrimoine, peut intervenir volontairement à l'instance entreprise par le liquidateur judiciaire, ayant pour objet la nullité de l'opposition au paiement du prix de vente du lot appartenant à la société, afin d'obtenir le règlement des charges de copropriété qu'il conteste.
CA Rouen, 1re ch. civ., 23 octobre 2024, n° 24/01484
Liquidation judiciaire : droits propres
Dès lors que l'action en paiement à l'encontre du débiteur a été introduite antérieurement au jugement prononçant la liquidation judiciaire, ce dernier dispose d'un droit propre à se défendre dans le cadre de l'instance reprise, laquelle ne peut tendre désormais qu'à la fixation de sa créance au passif du débiteur, que le liquidateur judiciaire se soit ou non constitué dans le cadre de cette procédure.
CA Paris, Pôle 5 ch. 6, 6 novembre 2024, n° 24/01587
Liquidation judiciaire : caractère immédiatement exécutoire
Une société ne peut obtenir la suspension de l'exécution provisoire de la décision prononçant sa liquidation judiciaire au motif qu'un redressement de son entreprise serait possible dès lors que le montant de son passif, même diminué, demeure toujours important, que le caractère recouvrable des créances invoquées ne paraît pas assuré et que son bilan prévisionnel, présageant d'une très significative augmentation d'activité, n'est pas crédible.
CA Toulouse, 1er président, 18 octobre 2024, n° 24/00109
Soutien abusif : immixtion dans la gestion
Une clause contractuelle qui a pour seul objet le contrôle de l'emploi des fonds prêtés ne correspond pas à la notion d'immixtion dès lors qu'elle n'est pas susceptible de conférer à la banque un pouvoir de direction sur l'activité de son client, à plus forte raison lorsque l'affectation convenue n'a pas été respectée par le débiteur, qui démontre de ce fait avoir conservé son autonomie de décision.
CA Rennes, 3e ch. com., 8 octobre 2024, n° 24/00598
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Escroquerie : emploi de manoeuvres frauduleuses
Une cour d'appel ne peut retenir le délit d'escroquerie sans caractériser l'existence de manœuvres frauduleuses ayant trompé la victime sur la réalité de travaux réalisés sur ses biens immobiliers et l'ayant conduite à remettre elle-même des fonds au prévenu.