Prix prédateurs : jurisprudence et décisions

Flèche en arrière
Retour vers toutes les jurisprudences

Décisions

Icône représentant une décision de justice

COMMISSION DE LA CONCURRENCE, 2 octobre 1986

Conditions d'application du dernier alinéa de l'article 50 de l'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 à des pratiques d'abaissement sélectif de prix dans le secteur de la presse quotidienne d'information locale

…tarifaire, celle-ci n'affectant que la ou les éditions se trouvant en concurrence avec un journal particulièrement vulnérable ; - l'absence manifeste de lien entre le niveau du prix pratiqué dans une édition et le prix de revient de celle-ci, voire la fixation délibérée d'un  prix plus bas pour l'édition ayant le prix…

Icône représentant une décision de justice

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 17 mai 2023, n° 21/01033

Gaches Chimie (SAS) c. Univar Solutions (SAS)

Confirmation

…et 2005. La société Univar Solutions relève également le caractère inopérant des références faites par la société Gaches Chimie à un préjudice résultant de la mise en place de prétendus prix prédateurs ou de pratiques agressives des concurrents. À cet effet, elle observe que la société Gaches Chimie et le rapport du cabinet d'expertise économique Analysis Group font ...

Icône représentant une décision de justice

CJUE, 2e ch., 12 janvier 2023, n° C-57/21

České dráhy a.s., Česká republika, Ministerstvo dopravy c. RegioJet a.s.

Rejet

…la Commission a décidé d’ouvrir une procédure d’enquête formelle, en vertu de l’article 2, paragraphe 1, du règlement no 773/2004, afin d’apprécier l’existence de prix prédateurs prétendument pratiqués par České dráhy à l’occasion de la prestation de services de transport ferroviaire de personnes en République tchèque et, en particulier, sur la ligne Prague ...

Icône représentant une décision de justice

TUE, 6e ch. élargie, 14 septembre 2022, n° T-604/18

Commission européenne, BDZV – Bundesverband Digitalpublisher und Zeitungsverleger eV, Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC), FairSearch AISBL, Qwant, Seznam.cz, a.s, Verband Deutscher Zeitschriftenverleger eV c. Google LLC, Alphabet, Inc., Application Developers Alliance, Computer & Communications Industry Association, Gigaset Communications GmbH, HMD global Oy, Opera Norway AS

Annulation

…donné lieu à l’arrêt du 3 juillet 1991, AKZO/Commission (C 62/86, EU:C:1991:286), dans lequel la Cour a tenu compte de la sanction inédite de prix prédateurs pour réduire le montant de l’amende sans que cet aspect soit au demeurant le seul retenu à cette fin. 1104 Une lecture identique s’impose au regard…

Icône représentant une décision de justice

CJUE, 9e ch., 30 juin 2022, n° C-149/21 P

Commission européenne, République de Pologne c. Fakro sp. z o.o.

…infractions qui ressortaient de la plainte de Fakro. En premier lieu, elle a examiné les allégations concernant la politique tarifaire de Velux, et notamment celles concernant la discrimination par les prix, les rabais abusifs, la pratique de prix prédateurs et les promotions de vente à long terme.  En deuxième lieu, elle a analysé les allégations selon lesquelles les marques RoofLITE ...

Icône représentant une décision de justice

CJUE, 5e ch., 12 mai 2022, n° C-377/20

Autorità Garante della Concorrenza e del Mercato e.a. c. Servizio Elettrico Nazionale SpA, ENEL SpA, Enel Energia SpA

…jurisprudence relative aux pratiques tant tarifaires que non tarifaires. 80 S’agissant de la première de ces deux catégories de pratiques, qui comprend les rabais de fidélité, les pratiques de prix bas sous la forme de prix sélectifs ou de prix prédateurs ainsi que les pratiques de compression de marges, il ressort de la jurisprudence que celles-ci s’apprécient ...

Icône représentant une décision de justice

TUE, 4e ch. élargie, 26 janvier 2022, n° T-286/09 RENV

Commission européenne, Union fédérale des consommateurs – Que choisir (UFC – Que choisir) c. Intel Corporation, Inc., Association for Competitive Technology, Inc

Rejet

Le seul document qu’Intel ait fourni serait un document ad hoc rédigé par un de ses cadres aux fins de la procédure administrative et contenant des informations que viendrait contredire, au moins partiellement, un document datant de l’époque des faits et rédigé par le même cadre d’Intel. La Commission affirme que, pour cette raison, la décision…

Icône représentant une décision de justice

TUE, 9e ch. élargie, 10 novembre 2021, n° T-612/17

Commission européenne, République fédérale d’Allemagne, Autorité de surveillance AELE, Bureau européen des unions de consommateurs , Infederation Ltd, Kelkoo, Verband Deutscher Zeitschriftenverleger eV, Visual Meta GmbH, BDZV – Bundesverband Digitalpublisher und Zeitungsverleger eV, Twenga c. Google LLC, Alphabet, Inc., Computer & Communications Industry Association

Rejet

voir également, en ce sens, arrêt du 26 septembre 2018, Infineon Technologies/Commission, C‑99/17 P, EU:C:2018:773, point 198). 675 En l’occurrence, au considérant 743 de la décision attaquée, la Commission a justifié le fait de retenir 10 % comme proportion de la valeur des ventes, en exposant que les marchés nationaux concernés de la…

Icône représentant une décision de justice

ADLC, 22 juin 2021, n° 21-D-13

Relative à des pratiques mises en oeuvre dans le secteur de  l’hébergement d’entreprises

L’Autorité de la concurrence (vice-présidente statuant seule), Vu la lettre enregistrée le 13 décembre 2019 sous le numéro 19/0085 F, par laquelle la société Actiburo a saisi l’Autorité de la concurrence de pratiques mises en oeuvre dans le secteur de l’hébergement d’entreprises ; Vu le livre IV du code de commerce ; Vu les autres pièces ...

Icône représentant une décision de justice

ADLC, 18 février 2021, n° 21-D-03

Relative à une demande de mesures conservatoires présentée par la société Plüm Énergie dans le secteur de la fourniture d’électricité en France

L’Autorité de la concurrence (section V), Vu les lettres enregistrées le 14 septembre 2020 sous les numéros 20/0088 F et 20/0089 M par lesquelles les sociétés Plüm Énergie et Plüm Entreprises & Collectivités ont saisi l’Autorité de la concurrence de pratiques mises en œuvre par la société Électricité de France, et a sollicité le prononcé de mesures ...

Icône représentant une décision de justice

CJUE, 8e ch., 28 janvier 2021, n° C-466/19 P

Commission européenne c. Qualcomm Inc., Qualcomm Europe Inc.

LA COUR (huitième chambre), 1 Par leur pourvoi, Qualcomm Inc. et Qualcomm Europe Inc. demandent l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 9 avril 2019, Qualcomm et Qualcomm Europe/Commission (T‑371/17, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2019:232), par lequel celui-ci a rejeté leur recours tendant à l ...

Icône représentant une décision de justice

TUE, 7e ch., 16 décembre 2020, n° T-515/18

Commission européenne c. Fakro sp. z o.o., République de Pologne

Rejet

La seconde branche du premier moyen est tirée d’une erreur manifeste d’appréciation en ce que la Commission a conclu que l’étendue des investigations nécessaires serait probablement disproportionnée au regard de cette probabilité limitée. 126 Lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, la requérante a confirmé que l’étendue du premier moyen se…

Voir plus de décisions de justice


Législation / Articles de loi

Icône représentant un document type article de loi

Avis n° 05-A-23 du Conseil de la concurrence du 5 décembre 2005

Dispositif envisagé pour permettre aux industries électro-intensives de bénéficier de conditions spécifiques de prix d'achat de l'électricité

…pas interdits "per se" par le droit de la concurrence, et ce, même s'ils sont mis en ouvre par un opérateur en position dominante. C. LE NIVEAU DE PRIX DES CONTRATS A LONG TERME 66. L'analyse concurrentielle du dispositif doit examiner le niveau de  d'achat d'électricité dont bénéficieront les industriels actionnaires…

Icône représentant un document type article de loi

Rapport de l'Autorité de la concurrence du 1 janvier 2012

Ont participé à la réalisation de cet ouvrage : Coralie Anadon, Gillian Arnoux, Antoine Babinet, Patricia Basset, Virginie Beaumeunier, Liza Bellulo, Charles Bertin, Séverine Bertrand, Gautier Duflos, Romain Galante, Jocelyne Gaumet, Laure Gauthier, Simon Genevaz, Céline Guibé…

…en oeuvre par la société Chep France (09-D-33 du 10 novembre 2009) qui illustre l'approche par les effets conduite par l'Autorité en matière de prix prédateurs. Le groupe de travail sur la lutte contre les cartels Le groupe de travail sur la lutte contre les cartels constitue un forum de discussion pratique entre les…

Icône représentant un document type article de loi

Rapport de l'Autorité de la concurrence du 1 janvier 2011

Ont participé à la réalisation de cet ouvrage : Coralie Anadon, Gillian Arnoux, Patricia Basset, Virginie Beaumeunier, Liza Bellulo, Charles Bertin, Hélène Bourguignon, Ingalill d'Armaillé, Laure Durand-Viel, Jocelyne Gaumet, Laure Gauthier, Simon Genevaz, Virginie Guin…

…la vente sur le marché de gros à un moment opportun), permettait de démontrer l'absence de sacrifice du bénéfice et donc d'exclure l'existence de prix prédateurs. Jumelage Dans une décision 11?MC?01 du 12 mai 2011 relative à la demande de mesures conservatoires présentée par les sociétés Kiala France et Kiala SA, l'…

Icône représentant un document type article de loi

Rapport de l'Autorité de la concurrence du 1 janvier 2010

Ont participé à la réalisation de cet ouvrage : Coralie Anadon, Gillian Arnoux, Virginie Beaumeunier, Liza Bellulo, Gaël Bernicot, Charles Bertin, Séverine Bertrand, Hélène Bourguignon, Ingalill d'Armaillé, Isabelle Douillet, Laure Durand- Viel, Jocelyne Gaumet…

…presse, à la fois cliente, partenaire, concurrente et potentiellement fournisseur de Google, qui, outre les griefs déjà mentionnés ci-dessus, s'estimait victime de pratiques de parasitisme et de prix prédateurs aggravant la situation du secteur. L'Autorité a rappelé que la mission "Création et Internet", confiée à MM. Patrick Zelnik, Jacques Toubon et Guillaume Cerutti, avait fait…

Icône représentant un document type article de loi

Rapport de l'Autorité de la concurrence du 1 janvier 2009

Ont participé à la réalisation de cet ouvrage : Gillian Arnoux, Virginie Beaumeunier, Liza Bellulo, Gaël Bernicot, Isabelle Douillet, Laure Durand-Viel, Jocelyne Gaumet, Laure Gauthier-Lescop, Virginie Guin, Ghislaine Jaillon, Anne Krenzer, Yannick Le Dorze…

…un nouvel opérateur qui proposait des prix prédateurs inférieurs à ceux résultant de l'entente et menaçait la répartition convenue, les partenaires de l'entente avaient pratiqué des prix prédateurs afin d'évincer ce perturbateur. La répartition de marchés allait de pair avec l'éviction des concurrents par la pratique de prix prédateurs.

Icône représentant un document type article de loi

Avis n° 08-A-13 du Conseil de la concurrence du 10 juillet 2008

Relatif à une saisine du syndicat professionnel UniCiné portant sur l'intervention des collectivités locales dans le domaine des salles de cinéma

Il faut toutefois souligner que le droit de la concurrence s'applique à toute activité économique, indépendamment du statut et des conditions de financement d'un opérateur, ce qui conduit à ne pas exclure par principe qu'un service public administratif puisse intervenir comme opérateur économique sur un marché. Ainsi, le Conseil de la concurrence a…

Icône représentant un document type article de loi

Avis n° 08-A-11 du Conseil de la concurrence du 18 juin 2008

Relatif à une demande d'avis de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en application de l'article L. 37-1 du Code des postes et communications électroniques, portant sur l'analyse des marchés de détail et de gros de la téléphonie fixe

Dans les zones non dégroupées, le prix de l'offre de gros de France Télécom "ADSL nu" reste trop élevé (20 € par mois) pour qu'il soit rentable pour un opérateur alternatif de proposer une offre de voix sur IP exclusivement dédiée à la téléphonie. 20. En conséquence, malgré la part désormais très significative des accès VLB…

Icône représentant un document type article de loi

Avis n° 08-A-03 du Conseil de la concurrence du 31 mars 2008

Relatif au fonctionnement des services téléphoniques à valeur ajoutée

En deuxième lieu, que l'opérateur en monopole sur le marché amont soit ou non intégré, le droit commun de la concurrence prohibe la pratique de prix abusivement élevés (décisions n° 00-D-27 du 13 juin 2000, Prison d'Osny, et n° 05-D-15 du 13 avril 2005, société Regal Pat contre Électricité de Strasbourg…

Icône représentant un document type article de loi

Rapport du Conseil de la concurrence du 1 janvier 2008

L'Autorité de la concurrence rend public le dernier rapport d'activité du Conseil de la concurrence. Cette obligation légale est aussi une façon, pour l'institution, de s'inscrire dans la continuité de sa devancière.

La cour a confirmé l'existence de l'entente générale reprochée aux trois grands groupes de BTP Bouygues, Vinci et Eiffage, qui s'étaient concertés pour se répartir, soit directement, soit par l'intermédiaire de filiales, les marchés publics de travaux de la région Île-de-France, depuis la fin de l'année 1991 jusqu ...

Icône représentant un document type article de loi

Avis n° 07-A-08 du Conseil de la concurrence du 27 juillet 2007

Relatif à une demande du Conseil d'Etat à propos des tarifs de vente du gaz naturel en distribution publique de Gaz de France

C'est une pratique mise en œuvre par une entreprise en situation dominante, sur le marché qu'elle domine ou sur un marché connexe. Elle consiste en ce que l'entreprise dominante décide, pour un temps limité, de pratiquer des prix qui génèrent des pertes afin d'écarter ses concurrents du marché, ou de les…

Voir plus d'articles de loi



Prix prédateurs

Droit de la concurrence
Droit français

Pour définir les conditions auxquelles des prix peuvent être qualifiés de prédateurs et constituer un abus au sens de l'article L. 420-2 du Code de commerce, l'Autorité de la concurrence adopte les critères posés par la Cour de justice : la vente à un prix inférieur au coût moyen variable constitue nécessairement un prix de prédation alors que la pratique de prix inférieurs aux coûts moyens totaux mais supérieurs aux coûts moyens variables n'est abusive qu'à la condition qu'il soit démontré qu'elle s'inscrit dans une stratégie d'éviction. La position des autorités européennes a connu par la suite une certaine évolution qui n'a pas manqué d'influencer les autorités françaises.

Dans ses lignes directrices relatives aux abus d'exclusion, la Commission définit la prédation par un test destiné à évaluer si un concurrent hypothétique aussi efficace que l'entreprise dominante risque de se voir exclu par des pratiques de prix abusives, et notamment de prédation. Même si la Commission ne se réfère pas au coût moyen variable ou au coût moyen total, auxquels elle préfère le coût moyen évitable (CME) et le coût marginal moyen à long terme (CMMLT), la différence n'est que relative. Le test de prix d'éviction est positif lorsque le CME ou le CMMLT n'est pas couvert par le prix de vente pratiqué par l'entreprise en position dominante. En principe, seule la fixation de prix inférieurs au CMMLT est considérée comme susceptible d'évincer des concurrents aussi efficaces du marché. Toutefois, la prédation sera aussi établie lorsque la preuve est apportée que l'entreprise dominante supporte des pertes ou renonce à des bénéfices à court terme délibérément, afin d'évincer ou de pouvoir évincer un ou plusieurs de ses concurrents réels ou potentiels, en vue de renforcer ou de maintenir son pouvoir de marché. A cette fin, la Commission cherchera à démontrer que l'entreprise concernée a consenti un sacrifice ou poursuivi une stratégie de prédation qui ont produit des effets d'éviction anticoncurrentiels préjudiciables aux consommateurs. Selon la Commission, un comportement prédateur peut se manifester de différentes manières, notamment par construction d'une réputation d'agressivité : le prédateur, qui craint l'entrée de plusieurs concurrents sur des marchés distincts, choisit parmi eux une proie et met en oeuvre une politique de prix agressive en tarifant très en dessous de ses coûts, afin de dissuader les concurrents potentiels d'entrer sur les autres marchés, par crainte que le prédateur y adopte le même comportement agressif.

La Cour de cassation estime que l'adoption d'une stratégie de prédation par construction d'une réputation d'agressivité sur un marché autre que le marché dominé n'est pas établie en l'absence de circonstances particulières de nature à établir un lien entre le comportement abusif et la position dominante. Dans le cas particulier d'une entreprise chargée d'un service public mais exerçant simultanément une activité concurrentielle, le Conseil de la concurrence avait précisé que “le concept de coût pertinent à prendre en compte pour évaluer si le prix des prestations offertes en concurrence est abusif est celui du coût incrémental”, c'est-à-dire les dépenses supplémentaires dues à l'exercice de l'activité concurrentielle. Le fait que les prix pratiqués par l'entreprise en position dominante se situent à un niveau inférieur aux coûts totaux moyens, mais supérieurs aux coûts incrémentaux moyens, afférents à l'activité, ne peut être considéré comme abusif que si cette politique conduit, sans justification objective, à l'éviction effective ou probable de ses concurrents. Il convient de déterminer si la disparition de concurrents relève d'une mauvaise politique de gestion interne ou de facteurs extérieurs, ou si elle est imputable à la pratique tarifaire mise en oeuvre par l'entreprise dominante dans la mesure où ces concurrents seraient considérés comme étant aussi efficaces qu'elle. La Cour d'appel de Paris adopte pour sa part une approche stricte de la prédation par les prix et considère qu'en l'absence de comparaison pertinente entre un prix et un coût pour une même catégorie de biens ou services, l'existence d'une telle pratique ne peut être établie. Dans le cas d'une entreprise multi-services, elle exige notamment que l'Autorité de la concurrence tienne compte de l'intérêt public dans l'analyse des seuils de coûts évitables.

Prix prédateurs

Droit de la concurrence
Droit européen

Les autorités européennes estiment, à l'instar du juge américain appliquant la théorie Areeda-Turner, qu'une stratégie de prix de prédation, c'est-à-dire de prix anormalement bas destinés à éliminer un rival, peut sous certaines conditions tomber sous le coup de l'article 102 TFUE. Selon la Cour de justice, des prix inférieurs à la moyenne des coûts variables sont nécessairement abusifs : une entreprise dominante ne peut avoir d'autre intérêt de pratiquer de tels prix que celui d'éliminer ses concurrents, avant de relever ensuite ses prix en tirant profit de sa situation monopolistique, puisque chaque vente représente pour elle la perte de la totalité des coûts fixes et d'une partie des coûts variables. En revanche, des prix inférieurs à la moyenne des coûts totaux mais supérieurs à la moyenne des coûts variables ne peuvent être considérés comme abusifs que dans la mesure où ils sont fixés dans le cadre d'un plan ayant pour but d'éliminer un concurrent. Depuis la jurisprudence Brook Group vs Brown Williamson Tobacco Corp., la Cour suprême américaine complète le test Areeda-Turner par le “test de récupération des pertes “("recoupment test") aux termes duquel une stratégie de prédation ne peut pas être considérée comme rationnelle, et doit donc être exclue, en l'absence de possibilité pour l'entreprise dominante de récupérer ses pertes. Les autorités européennes adoptent une approche inverse puisqu'elles affirment expressément que la possibilité de récupération des pertes ne constitue pas un préalable à la constatation de prix prédateurs.

Dans sa communication relative aux priorités à retenir lors de l'application de l'article 102 TFUE aux abus d'exclusion, la Commission préconise, de manière générale, le recours au test du prix d'éviction à l'égard des abus d'exclusion en matière de prix, et notamment de prédation. Pour vérifier si un concurrent hypothétique aussi efficace que l'entreprise dominante risque de se voir évincer par des pratiques de prix abusives, la Commission recherche si l'entreprise dominante applique des prix de vente inférieurs à ses coûts. Le test de prix d'éviction se réfère soit au coût évitable moyen (CEM), qui correspond à la moyenne des coûts qui auraient pu être évités si l'entreprise n'avait pas produit une unité supplémentaire, à savoir les coûts variables ainsi que les coûts fixes de court terme supportés pendant la période examinée, soit le coût marginal moyen à long terme (CMMLT) qui équivaut à la moyenne de tous les coûts, variables et fixes, qu'une entreprise supporte pour fabriquer un produit déterminé. Le prix constitue un prix d'éviction dès lors que le CEM ou le CMMLT n'est pas couvert par le prix pratiqué par l'entreprise dominante. En principe, seule la fixation de prix inférieurs au CMMLT est susceptible d'évincer des concurrents aussi efficaces du marché. Pour établir une pratique de prédation, la Commission apprécie aussi le sacrifice supporté par l'entreprise dominante et l'éviction anticoncurrentielle qu'il entraîne. La Commission considère qu'il y a sacrifice “si l'entreprise dominante, en fixant un prix inférieur pour l'ensemble ou pour une partie spécifique de sa production au cours de la période considérée, ou en développant sa production durant cette même période, a subi ou subit des pertes qui auraient pu être évitées”. L'application de prix inférieurs au CEM par l'entreprise dominante, pour une partie ou la totalité de sa production, constitue un indice clair de sacrifice. Il y a également sacrifice si les agissements prédateurs présumés conduisent à court terme à des recettes nettes inférieures à celles qu'on aurait pu attendre, si un autre comportement raisonnable avait été adopté. La Commission précise qu'il est possible, dans certains cas, de s'appuyer sur des documents de l'entreprise dominante établissant une stratégie prédatrice. Selon le Tribunal de l'Union, le test du concurrent aussi efficace permet de vérifier l'hypothèse d'un accès au marché rendu impossible, mais non d'écarter l'éventualité d'un accès rendu plus difficile. Pour démontrer l'éviction anticoncurrentielle, outre le test de prix d'éviction, la Commission apprécie si les agissements prédateurs présumés réduisent la probabilité que les concurrents exercent une concurrence effective. La sortie effective du marché de concurrents n'est pas nécessaire à la démonstration d'effets d'éviction anticoncurrentiels, l'entreprise prédatrice pouvant privilégier l'alignement de ses concurrents sur ses prix à leur évincement pur et simple du marché. L'entreprise dominante peut adopter un comportement de prédation par signal ou construction d'une réputation d'agressivité ou se livrer à de la prédation financière. Dans le premier cas, le prédateur, grâce à ses connaissances des conditions du marché ou des coûts, manipule l'information de ses concurrents relative à la rentabilité du marché afin de les dissuader d'y entrer. Dans le second, le prédateur, soumis à la menace d'entrée de plusieurs concurrents sur des marchés différents, choisit l'un d'entre eux et se comporte avec celui-ci si agressivement en tarifant en-dessous de ses coûts que les concurrents potentiels s'abstiendront d'entrer sur les autres marchés. Dans le troisième, le prédateur choisit un concurrent dont le financement extérieur dépend des performances, et, par ses agissements prédateurs, diminue la performance de ce dernier, de façon à décourager les investisseurs de le financer. Concernant l'impact des pratiques de prédation sur le bien-être des consommateurs, la Commission estime qu'il est probable que les consommateurs soient lésés dès lors que l'entreprise prédatrice retire un avantage de son sacrifice.

Lorsqu'une entreprise en charge d'un service d'intérêt économique général se trouve en situation de monopole sur un marché et en situation de concurrence sur un autre, les autorités de concurrence se réfèrent au coût incrémental qui permet de mesurer les dépenses supplémentaires engagées par l'entreprise pour son activité concurrentielle, dans la mesure où certains coûts (notamment fixes) sont communs avec son activité réservée, et d'établir incidemment une pratique de prédation par subventions croisées. Dans une affaire où le coût incrémental constituait le coût de référence, la Cour de justice a précisé qu'une politique de prix ne peut être qualifiée de pratique d'éviction abusive au seul motif que le prix appliqué par l'entreprise dominante à un seul client se situe à un niveau inférieur aux coûts totaux moyens, correspondant aux capacités logistiques dédiées à la fois à l'activité concurrentielle et à celle sous monopole, imputés à l'activité concernée, mais supérieur aux coûts incrémentaux moyens afférents à celle-ci, sous réserve cependant de vérifier que cette politique de prix n'a pas pour résultat l'éviction effective ou probable du concurrent, au détriment du jeu de la concurrence et, de ce fait, des intérêts des consommateurs.

Prenez rendez-vous pour une démo Livv !

Nos équipes sont à votre disposition pour vous présenter Livv dans ses détails.

Accédez à la connaissance du droit économique en quelques clics

Inscrivez-vous gratuitement sur Livv et bénéficiez de notre expertise en droit économique.

Essayer gratuitement pendant 15 jours