Prix prédateurs

 

Droit français de la concurrence

Pour définir les conditions auxquelles des prix peuvent être qualifiés de prédateurs et constituer un abus au sens de l'article L. 420-2 du Code de commerce, l'Autorité de la concurrence adopte les critères posés par la Cour de justice : la vente à un prix inférieur au coût moyen variable constitue nécessairement un prix de prédation alors que la pratique de prix inférieurs aux coûts moyens totaux mais supérieurs aux coûts moyens variables n'est abusive qu'à la condition qu'il soit démontré qu'elle s'inscrit dans une stratégie d'éviction. La position des autorités européennes a connu par la suite une certaine évolution qui n'a pas manqué d'influencer les autorités françaises.

Dans ses lignes directrices relatives aux abus d'exclusion, la Commission définit la prédation par un test destiné à évaluer si un concurrent hypothétique aussi efficace que l'entreprise dominante risque de se voir exclu par des pratiques de prix abusives, et notamment de prédation. Même si la Commission ne se réfère pas au coût moyen variable ou au coût moyen total, auxquels elle préfère le coût moyen évitable (CME) et le coût marginal moyen à long terme (CMMLT), la différence n'est que relative. Le test de prix d'éviction est positif lorsque le CME ou le CMMLT n'est pas couvert par le prix de vente pratiqué par l'entreprise en position dominante. En principe, seule la fixation de prix inférieurs au CMMLT est considérée comme susceptible d'évincer des concurrents aussi efficaces du marché. Toutefois, la prédation sera aussi établie lorsque la preuve est apportée que l'entreprise dominante supporte des pertes ou renonce à des bénéfices à court terme délibérément, afin d'évincer ou de pouvoir évincer un ou plusieurs de ses concurrents réels ou potentiels, en vue de renforcer ou de maintenir son pouvoir de marché. A cette fin, la Commission cherchera à démontrer que l'entreprise concernée a consenti un sacrifice ou poursuivi une stratégie de prédation qui ont produit des effets d'éviction anticoncurrentiels préjudiciables aux consommateurs. Selon la Commission, un comportement prédateur peut se manifester de différentes manières, notamment par construction d'une réputation d'agressivité : le prédateur, qui craint l'entrée de plusieurs concurrents sur des marchés distincts, choisit parmi eux une proie et met en oeuvre une politique de prix agressive en tarifant très en dessous de ses coûts, afin de dissuader les concurrents potentiels d'entrer sur les autres marchés, par crainte que le prédateur y adopte le même comportement agressif.

La Cour de cassation estime que l'adoption d'une stratégie de prédation par construction d'une réputation d'agressivité sur un marché autre que le marché dominé n'est pas établie en l'absence de circonstances particulières de nature à établir un lien entre le comportement abusif et la position dominante. Dans le cas particulier d'une entreprise chargée d'un service public mais exerçant simultanément une activité concurrentielle, le Conseil de la concurrence avait précisé que “le concept de coût pertinent à prendre en compte pour évaluer si le prix des prestations offertes en concurrence est abusif est celui du coût incrémental”, c'est-à-dire les dépenses supplémentaires dues à l'exercice de l'activité concurrentielle. Le fait que les prix pratiqués par l'entreprise en position dominante se situent à un niveau inférieur aux coûts totaux moyens, mais supérieurs aux coûts incrémentaux moyens, afférents à l'activité, ne peut être considéré comme abusif que si cette politique conduit, sans justification objective, à l'éviction effective ou probable de ses concurrents. Il convient de déterminer si la disparition de concurrents relève d'une mauvaise politique de gestion interne ou de facteurs extérieurs, ou si elle est imputable à la pratique tarifaire mise en oeuvre par l'entreprise dominante dans la mesure où ces concurrents seraient considérés comme étant aussi efficaces qu'elle. La Cour d'appel de Paris adopte pour sa part une approche stricte de la prédation par les prix et considère qu'en l'absence de comparaison pertinente entre un prix et un coût pour une même catégorie de biens ou services, l'existence d'une telle pratique ne peut être établie. Dans le cas d'une entreprise multi-services, elle exige notamment que l'Autorité de la concurrence tienne compte de l'intérêt public dans l'analyse des seuils de coûts évitables.

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