La Commission inflige une amende de 15,9 millions d'euros à International Flavors & Fragrances pour avoir supprimé des messages WhatsApp lors d'une inspection en matière de pratiques anticoncurrentielles

Le 24 juin 2024, la Commission européenne (“Commission”) a sanctionné International Flavors & Fragrances Inc. (“IFF”) pour avoir supprimé des messages WhatsApp durant une inspection.

Publié le 
18/7/2024
La Commission inflige une amende de 15,9 millions d'euros à International Flavors & Fragrances pour avoir supprimé des messages WhatsApp lors d'une inspection en matière de pratiques anticoncurrentielles
 

Pour la première fois, la Commission a infligé une amende pour la suppression de messages échangés via des applications de médias sociaux sur un téléphone portable.

L’inspection dans les locaux d’IFF

Dans le cadre de ses inspections dans les locaux des entreprises, la Commission peut examiner ou saisir entre autres des documents, des e-mails, mais aussi des téléphones portables.

IFF est une société dont le siège social est situé aux Etats-Unis et qui fabrique des parfums pour l’industrie de la parfumerie et des arômes pour l’industrie alimentaire. 

Lors d'une inspection dans les locaux d'IFF la Commission a demandé à examiner les téléphones mobiles de plusieurs employés d’IFF. Dans ce cadre, la Commission a découvert qu'un salarié cadre avait supprimé des messages WhatsApp échangés avec un concurrent.

Ces messages contenaient des informations d’ordre commercial. La suppression a eu lieu après que cet employé eut été informé de l'inspection, constituant ainsi une entrave directe à l'enquête.

Une amende réduite en raison de la coopération d'IFF

En vertu du règlement nº 1/2003, la Commission peut infliger des amendes pouvant aller jusqu'à 1 % du chiffre d'affaires total d'entreprises qui, de propos délibéré ou par négligence, font obstacle à une enquête en matière de pratiques anticoncurrentielles. Pour fixer le montant d'une amende, la Commission tient compte à la fois de la gravité et de la durée de l'infraction.

IFF ayant reconnu les faits et coopéré de manière proactive, la Commission a réduit l'amende initialement fixée à 0,30 % à 0,15 % du chiffre d'affaires total de l'entreprise, soit 15,9 millions d'euros.

Cette sanction vise à dissuader toute future tentative de suppression de communications (entretenues notamment avec d’autres concurrents) durant des enquêtes.

Les implications pour les services de messageries

Cette décision de la Commission européenne établit un précédent important, indiquant que toute entrave à une inspection antitrust est sévèrement réprimée par la Commission européenne. Elle traduit la possibilité future de l’exercice du pouvoir de sanction de la Commission pour tout autre service de messagerie.

D'autres décisions en matière d'entrave aux inspections

Lorsqu’elles ne sont pas formées et alertées sur la gravité de l’entrave à une enquête de la Commission, qui peut aussi leur valoir une sanction pénale, certaines personnes peuvent être tentées de détruire des preuves. Cette pratique a déjà pu être sanctionnée par la Commission comme l’illustrent deux affaires :

  • Le 30 janvier 2008, la Commission inflige une amende de 38 millions d'euros à E.ON pour bris de scellés lors d'une inspection. 

Il avait notamment été retenu que lorsque la Commission a établi d'une manière suffisante l'existence d'un bris de scellé correctement placé à l'aide de preuves correspondantes (modification de l'état du scellé, procès-verbaux, déclarations de témoins, photos, rapports d'experts, etc.), la simple mention d'une éventuelle autre explication ne saurait suffire à renverser cette preuve.

  • Le 28 mars 2012, la Commission inflige une amende de 2.5 millions d'euros aux entreprises tchèques du secteur de l'énergie Energetický a průmyslový et EP Investment Advisors pour entrave au cours d'une inspection. 

Cette amende a même été confirmée par le Tribunal de l’Union dans une décision du 26 novembre 2014.

Le Tribunal avait jugé que le non-respect, par l'entreprise, des instructions des enquêteurs quant à l'accessibilité des messageries du personnel pendant le déroulement des mesures d'investigation constitue une violation grave de ses obligations procédurales eu égard à la facilité particulière de manipulation des données informatiques, qui justifie l'infliction d'une amende d'un montant dissuasif. 

Des sanctions importantes

Toutes ces décisions en matière d’entrave aux enquêtes de la Commission soulignent la détermination de la Commission à imposer des sanctions sévères en la matière. 

A ce sujet, l'amende récente imposée à IFF réaffirme l'importance de la transparence et de la coopération lors des inspections antitrust et rappelle aux entreprises la nécessité de se conformer pleinement aux règles durant les enquêtes.

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