Clause de non-concurrence - Jurisprudence et législation

La notion de clause de non-concurrence en droit français de la distribution

Les contrats de distribution contiennent fréquemment des clauses de non-concurrence post-contractuelles visant à éviter que l'ancien distributeur ne profite de l'expérience ou du savoir-faire acquis au sein du réseau pour concurrencer le fournisseur à l'expiration de la relation.

L'existence d'une contrepartie financière à la clause n'est formellement prévue que pour les VRP, à l'article 17 de leur accord national interprofessionnel. En vertu de ce texte, “pendant l'exécution de l'interdiction, l'employeur versera au représentant une contrepartie pécuniaire mensuelle spéciale dont le montant sera égal à deux tiers de mois si la durée en est supérieure à un an et à un tiers de mois si la durée en est inférieure ou égale à un an [...]”. Depuis une série d'arrêts rendus par la Cour de cassation en juillet 2002, la contrepartie financière constitue une condition de validité de la clause de non-concurrence imposée au VRP, mais, aussi, plus largement, à tous les salariés. L'exigence a ultérieurement été étendue aux gérants de succursale, qui, bien qu'ils ne répondent pas formellement à la définition du salarié, peuvent prétendre à l'application du droit du travail.

De nombreux franchisés ont tenté, avec plus ou moins de succès, de profiter de cet avantage. Mais, comme le souligne la jurisprudence, contrairement au salarié lié par une clause de non-concurrence qui le prive de sa liberté de travailler, le franchisé est un commerçant indépendant qui conserve sa liberté et sa clientèle à l'issue du contrat. L'agent commercial ne peut pas non plus prétendre à une contrepartie pécuniaire, car selon la Cour de cassation, “le législateur n'a pas entendu que l'obligation de non-concurrence soit indemnisée lorsque la clause qui la stipule est conforme aux dispositions de l'article L. 134-14 du Code de commerce”.


Clause pénale/Indemnité de rupture, de l'ouvrage "Droit français de la distribution" de Louis Vogel et Joseph Vogel

Le contrat d'approvisionnement prévoit en règle générale le paiement d'une pénalité en cas d'inexécution par le distributeur de son obligation d'approvisionnement. Lorsque le contrat comporte une clause pénale, il ne peut être alloué à son bénéficiaire une somme plus forte, ni moindre. Le montant de la clause pénale ne doit, en outre, être ni excessif ni dérisoire. Si tel est le cas, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine (C. civ., art. 1231-5. - Pour une illustration, Cass. com., 26 février 1991, 89-12.081, qui souligne que le juge ne modère la peine que si elle est excessive.), sans avoir à motiver spécialement sa décision (Cass. com., 14 décembre 2004, 03-11.631.). Le caractère excessif de la clause pénale s'apprécie, au regard de l'ampleur du préjudice subi par le créancier de l'obligation, à la date de la décision du juge et pas à celle à laquelle la pénalité est exigible (Metz, 19 septembre 2013, 09-03538.). Une clause pénale qui s'élève à une année de chiffre d'affaires, alors que le préjudice du fournisseur s'apprécie en termes de perte de marge (Lyon, 22 mars 2007, 05-05982. - Contra, Besançon, 5 janvier 2016, 14/01662, déclarant licite une clause pénale sanctionnant la violation d'une obligation d'achat exclusif par une indemnité d'un montant équivalent à une année de chiffre d'affaires.), qui conduit à verser au brasseur une indemnité d'un montant quasi égal (Paris, 11 octobre 2018, 17-10041.) voire supérieur (Reims, 19 mars 2019, 18-00471.) à celui de son engagement principal ou de son bénéfice prévisible (Paris, 7 décembre 2012, 11-07987), ou encore qui impose le paiement des hectolitres de bière restant à acheter alors que les objectifs étaient irréalisables et que le brasseur ne s'est jamais plaint de leur non-réalisation (Colmar, 17 juin 2013, 12-03155 ; Aix-en-Provence, 15 novembre 2012, 11-11057. Sur la réduction de la clause en raison du caractère irréalisable des objectifs, V. aussi Colmar, 20 septembre 2011, 10-02125.), apparaît manifestement excessive. Les clauses qui prévoient le paiement d'une indemnité forfaitaire de 20 % du chiffre d'affaires à réaliser jusqu'au terme du contrat, initialement condamnées (Dijon, 9 octobre 1992, 01700-91 ; Colmar, 13 mars 2013, 12-01256), ont ensuite été validées (Paris, 5 avril 2002, 2001-00919 ; 14 mars 2003, 2001-00584 ; 22 mai 2003, 2001-16037 ; 14 décembre 2016, 14-10002 ; 3 juillet 2019, 17-21047 ; Limoges, 9 novembre 2020, 19/00245 .). Elles ne sont cependant pas admises par la jurisprudence si le fournisseur a toléré les inexécutions du distributeur (Aix-en-Provence, 15 novembre 2012, 11-11057) , notamment en ne le mettant jamais en demeure de s'exécuter (Caen, 17 janvier 2013, 11-02841), si l'engagement du débitant apparaît disproportionné par rapport à ses capacités d'écoulement (Colmar, 9 janvier 2013, 10/05704 ; 13 mars 2013, 12-01256 ; 29 janvier 2014, 12-03281 ; 27 mars 2024, 21/02855.) ou s'il établi que le fournisseur n'a pas subi un préjudice à la mesure du montant réclamé au titre de leur application (Pau, 28 juin 2019, 18-00530).

Si la peine peut être modérée lorsque la résiliation est imputable aux deux parties (Douai, 14 novembre 2002, 00-05727), il n'en est pas ainsi lorsque le prêt souscrit par le distributeur a été remboursé, dès lors que la clause pénale a pour seule justification l'inexécution de l'obligation d'approvisionnement exclusif (Cass. com., 3 mars 2004, 02-15.007 et 02-15.008. - V. aussi Paris, 14 décembre 2016, 14-10002, retenant que le remboursement du crédit consenti par le fournisseur n'exerce aucune influence sur l'appréciation du caractère excessif d'une clause pénale qui figure non dans le contrat de prêt, mais dans le contrat d'approvisionnement exclusif.).

La clause pénale ne peut être mise en œuvre lorsque la résiliation du contrat d'approvisionnement exclusif ne cause aucun préjudice au fournisseur (Cass. com., 16 juillet 1991, 89-19.080) ou est prononcée aux torts de celui-ci (Paris, 22 mars 1996, 95-013110). La disparition du fonds de commerce du distributeur ne s'analyse pas en une inexécution justifiant la mise en œuvre de la clause pénale (Nancy, 18 novembre 1991, 2204-90.).

Le contrat d'approvisionnement peut également stipuler une indemnité de rupture en réparation du préjudice résultant de la rupture anticipée. Cette indemnité peut être calculée sur le fondement des quantités de produits qui auraient été livrées si le contrat avait été conduit à terme (Toulouse, 11 décembre 2003, 02-05299). Elle doit être prise en charge par le distributeur bénéficiaire à l'origine de la convention (Cass. com., 9 janvier 2001, 98-14.063), et le cas échéant in solidum, par le fournisseur, qui l'a sciemment aidé à transgresser ses engagements contractuels et s'est comporté comme un tiers complice (Besançon, 5 janvier 2016, 14/01662). Elle n'est pas due lorsque le contrat d'approvisionnement exclusif est rendu caduc par la procédure collective du tiers dépositaire désigné par le fournisseur (Cass. com., 25 juin 1996, 94-15.322).


Les décisions de justice pertinentes associées à la notion de "Clause de non-concurrence" en droit français de la distribution


Contenus juridiques associés :

Décisions de justice

Icône représentant une décision de justice

Cass. soc., 5 octobre 2016, n° 15-22.730

Ortega c. Distribution Casino France (SAS) - Clause de non-concurrence - Une clause de non-concurrence qui ne comporte pas de contrepartie financière est nulle et peut être la source d'un préjudice pour le gérant non salarié de succursale de commerce de détail alimentaire, même s'il n'est pas un salarié et si le mandant a manifesté l'intention de ne pas s'en prévaloir. Protection sociale - Les gérants non salariés de succursales de commerce de détail alimentaire, peuvent se prévaloir des dispositions des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du Code du travail relatifs à l'obligation de reclassement.

Icône représentant une décision de justice

Cass. soc., 27 mars 2013, n° 12-12.892

Distribution Casino France (Sté) - Clause de non-concurrence - La clause de non-concurrence prévue par un contrat de gérance non-salariée doit être assortie d'une contrepartie financière. Déficit d'inventaire - Les gérants non-salariés, qui relèvent, en vertu de l'article L. 7322-1 du Code du travail, des dispositions protectrices des salariés, ne peuvent se voir imposer des clauses contractuelles qui prévoient des cas de rupture sans préavis ni indemnité allant à l'encontre de ces dispositions.

Icône représentant une décision de justice

Cass. soc., 28 septembre 2011, n° 10-21.294

Rodriguez c. Groupe Casino (Sté) - Clause de non-concurrence - La clause de non-concurrence contenue dans un contrat de gérant non salarié de succursale de maison d'alimentation est nulle si elle n'est pas assortie d'une contrepartie financière.

Icône représentant une décision de justice

Cass. soc., 9 janvier 2013, n° 11-26.418

Thomas (Epoux) c. Distribution Casino France (SAS) - Clause de non-concurrence - La stipulation d'une clause de non-concurrence dans un contrat de gestion non salariée de succursale de maison d'alimentation de détail cause nécessairement un préjudice au gérant lorsqu'elle n'est pas assortie d'une contrepartie financière, même si le contrat n'a pas été rompu. Conditions de validité - Une clause de non-concurrence, insérée dans un contrat de gestion non salariée de succursale de maison d'alimentation de détail, cause nécessairement un préjudice au gérant lorsqu'elle ne prévoit pas de contrepartie financière, même si le contrat n'a pas été rompu.

Icône représentant une décision de justice

Cass. soc., 9 janvier 2013, n° 11-26.417

Verdavaine (Epoux) c. Distribution Casino France (SAS) - Clause de non-concurrence - La stipulation d'une clause de non-concurrence dans un contrat de gestion non salariée de succursale de maison d'alimentation de détail cause nécessairement un préjudice au gérant lorsqu'elle n'est pas assortie d'une contrepartie financière, même si le contrat n'a pas été rompu. Conditions de validité - Une clause de non-concurrence, insérée dans un contrat de gestion non salariée de succursale de maison d'alimentation de détail, cause nécessairement un préjudice au gérant lorsqu'elle ne prévoit pas de contrepartie financière, même si le contrat n'a pas été rompu.

Icône représentant une décision de justice

Cass. soc., 9 janvier 2013, n° 11-26.419

Boyer (Epoux) c. Distribution Casino France (SAS) - Clause de non-concurrence - La stipulation d'une clause de non-concurrence dans un contrat de gestion non salariée de succursale de maison d'alimentation de détail cause nécessairement un préjudice au gérant lorsqu'elle n'est pas assortie d'une contrepartie financière, même si le contrat n'a pas été rompu. Conditions de validité - Une clause de non-concurrence, insérée dans un contrat de gestion non salariée de succursale de maison d'alimentation de détail, cause nécessairement un préjudice au gérant lorsqu'elle ne prévoit pas de contrepartie financière, même si le contrat n'a pas été rompu.

Icône représentant une décision de justice

CA Lyon, 3e ch. A, 19 octobre 2023, n° 20/03520

Le Store Circelli (SAS) c. Biossun (SAS) - Champ d'application ratione materiae - Le distributeur exclusif qui commercialise des produits concurrents de ceux du concédant avant l'arrivée du terme du contrat s'expose à une rupture immédiate des relations à ses torts. Transmission d'un savoir-faire - En l'absence de transmission d'un savoir-faire, les parties à un contrat de de distribution ne sont pas liées par un contrat de franchise. Ventes directes sur le territoire concédé - La présence du fournisseur sur le stand d'une foire à laquelle le distributeur exclusif n'a pas souhaité participer ne caractérise pas une violation de l'exclusivité.

Icône représentant une décision de justice

CA Montpellier, ch. com., 6 juin 2023, n° 22/05488

P&M Distribution (SARL) c. Abris Conseil (SARL) - Champ d'application ratione materiae - Le recours au stratagème consistant à faire appel aux services de faux clients pour vérifier si le distributeur exclusif a manqué à son obligation de non-concurrence constitue une atteinte à la loyauté dans l'administration de la preuve qui justifie la mise à l'écart des pièces obtenues. Volume de commandes - La non-atteinte, par un distributeur exclusif, de ses objectifs contractuels ne peut être constatée six mois avant l'expiration de la période de référence.

Icône représentant une décision de justice

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 2 mars 2022, n° 19/07757

ACBI (SARL) c. Horizontal (Sté) - Champ d'application ratione materiae - Le distributeur qui viole son obligation d'approvisionnement exclusif doit indemniser son fournisseur du préjudice subi. Preuve de la faute - Le donneur d'ordres qui rompt sans préavis le contrat en raison de problèmes techniques dont il ne démontre pas qu'ils présentent un caractère suffisamment grave et sur lesquels il n'a jamais attiré l'attention de l'agent technico-commercial, engage sa responsabilité sur le fondement de l'article L. 442-1, II du Code de commerce. État de dépendance - La rupture de relations de seize années, qui représentent la quasi-totalité du chiffre d'affaires…

Icône représentant une décision de justice

CA Douai, 2e ch. sect. 1, 13 janvier 2022, n° 19/06780

French Childrens Wear Limited (SARL) c. Jacadi (SAS) - Champ d'application ratione loci - Un concédant ne peut imputer à son concessionnaire une violation de la clause de non-concurrence post-contractuelle lorsque celle-ci n'est pas limitée dans l'espace. Engagement exclusif ou quasi-exclusif - L'article L. 330-3 du Code de commerce, texte d'ordre public, s'applique à un contrat de distribution exclusive conclu avec un partenaire étranger pour la distribution des produits contractuels dans son Etat d'établissement, lorsque les parties ont convenu que la loi française lui serait applicable. Responsabilité civile - L'éventuel manquement du concédant à son obligation d'information précontractuelle ne peut être indemnisé…


Législation / Articles de loi

Icône représentant un document type article de loi

Avis n° 16-9 de la Commission d'examen des pratiques commerciales du 12 mai 2016

relatif à une demande d'avis d'un groupement d'intérêt public sur la validité d'une clause de non concurrence insérée dans des contrats entre une société et des hôteliers La Commission d'examen des pratiques commerciales, Vu la lettre enregistrée le 11 janvier 2016 sous le numéro 16-4, par laquelle une personne morale de droit public souhaite recueillir l'avis de la Commission sur la conformité au droit d'une clause de non-concurrence insérée dans les contrats conclus avec les établissements hôteliers par une ...

Icône représentant un document type article de loi

Communication n° 2022/C 248/01 de la Commission européenne du 30 juin 2022

Lignes directrices sur les restrictions verticales ... en cause situés en amont. La vente liée peut être combinée à d’autres restrictions verticales qui ne sont pas des restrictions caractérisées au sens du règlement, telles qu’une clause de non-concurrence ou un quota d’achat concernant le produit liant, ou un approvisionnement exclusif. Le reste de la présente section (8. 2. 8) donne des orientations pour ...

Icône représentant un document type article de loi

Fiche pratique n° 11 de la Cour d'appel de Paris du 1 avril 2020

Quelles réparations liées aux obligations de non-concurrence ? ... de vue de la réparation, deux situations doivent être distinguées selon que les préjudices trouvent leur source dans la violation d’une clause de non-concurrence (1) ou dans une clause de non-concurrence nulle (2). 1. Préjudices causés par la violation d’une clause de non-concurrence En cas de violation d’une clause de non-concurrence, le créancier ...

Icône représentant un document type article de loi

Article L 811-7-1 du Code de commerce

... recevoir un acte ou d'accomplir une mission lorsque cet acte ou cette mission lui paraissent contraires à sa conscience ou susceptibles de porter atteinte à son indépendance. Toute clause de non-concurrence est réputée non écrite. L'administrateur salarié ne peut avoir de mandat à titre personnel. Le présent livre est applicable à l'administrateur judiciaire ...

Icône représentant un document type article de loi

Article L 812-5-1 du Code de commerce

... recevoir un acte ou d'accomplir une mission lorsque cet acte ou cette mission lui paraissent contraires à sa conscience ou susceptibles de porter atteinte à son indépendance. Toute clause de non-concurrence est réputée non écrite. Le mandataire judiciaire salarié ne peut avoir de mandat à titre personnel. Le présent livre est applicable au mandataire judiciaire salarié, sauf ...

Icône représentant un document type article de loi

Article R 242-65 du Code rural et de la pêche maritime

Clause de non-concurrence et pluralité de domiciles professionnels. Lorsqu'une clause de non-concurrence existe dans le contrat de travail et lorsque le vétérinaire en cause a exercé pour le compte d'un vétérinaire ou d'une société d'exercice vétérinaire au sein de plusieurs domiciles professionnels d'exercice, les contractants déterminent le domicile ...

Icône représentant un document type article de loi

Article R 242-68 du Code rural et de la pêche maritime

Cessation d'activité. Le vétérinaire qui cesse son activité professionnelle en informe dans les meilleurs délais le conseil régional de l'ordre en faisant connaître, le cas échéant, le nom de son successeur et les conditions de la clause de non-concurrence lorsqu'elle existe.

Icône représentant un document type article de loi

Rapport de l'Autorité de la concurrence du 1 janvier 2015

... du Groupe Bertrand, de BKF et de ses filiales. Burger King France s'est également engagée à se désister sans contrepartie, ni pénalité, de tout droit reposant sur la clause de non-concurrence ou de toute autre clause contractuelle en vertu du contrat de franchise. Cet engagement, d'une durée de 10 ans pendant laquelle le groupe Bertand ...

Flèche en arrière
Retour vers les matières du droit des affaires

Vous souhaitez bénéficier d'une démonstration de la plateforme Livv ?

Dans vos bureaux ou en visio, nos équipes s'adaptent à vos besoins. Vous pouvez également nous contacter via notre formulaire de contact.

Prendre RDV pour une démo