Injonction

 

Droit français de la concurrence

Pouvoir d'injonction de l'Autorité de la concurrence

L'Autorité de la concurrence peut enjoindre aux intéressés de mettre fin à la pratique anticoncurrentielle dans un délai déterminé et, depuis l'ordonnance de transposition de la directive ECN+, imposer toute mesure corrective de nature structurelle ou comportementale proportionnée à l'infraction commise et nécessaire pour la faire cesser effectivement (C. com., art. L. 464-2, I).

Mesures comportementales et mesures structurelles

L'Autorité a toujours disposé du pouvoir d'imposer des mesures comportementales, sous forme d'injonctions de faire ou de ne pas faire. Elle peut ainsi enjoindre à une entreprise de cesser d'intervenir dans la fixation des prix de ses distributeurs ou d'appliquer des conditions de vente discriminatoires, de mettre fin à un boycott ou de s'abstenir d'insérer dans ses contrats de distribution une clause de protection territoriale absolue. L'Autorité peut ordonner la suppression d'une clause de non-concurrence ou la réduction de sa durée, ou la modification de contrats de distribution sélective, notamment pour qu'il soit clairement stipulé que les distributeurs ont le droit de vendre en ligne. Elle a également la possibilité de soumettre l'entreprise à une obligation d'information. Pour remédier à des pratiques d'éviction de prix commises dans des circonstances exceptionnelles, elle peut recourir, alternativement et non cumulativement avec une sanction pécuniaire, à une injonction dès lors que cette solution est la plus apte au rétablissement d'une concurrence efficace sur le marché mais aussi à son maintien dans la durée. En revanche, l'Autorité peut cumuler une amende et une injonction de modifier les clauses litigieuses du règlement intérieur d'un groupement dans un délai de deux mois lorsqu'au cours de la procédure celui-ci ne s'est pas engagé à le faire compte tenu de son souhait d'en contester le caractère anticoncurrentiel.

Limites du pouvoir d'injonction

Ce pouvoir d'injonction de l'Autorité de la concurrence n'est pas illimité. Ainsi, elle n'a pas le pouvoir d'ordonner pour l'avenir la surveillance systématique d'un secteur. Si elle peut imposer aux parties de mettre fin aux accords illicites ou de les modifier, elle n'est pas autorisée à annuler une convention. En effet, ce pouvoir relève de la compétence exclusive des juridictions judiciaires en vertu de l'article L. 420-3 du Code de commerce.

Extension des pouvoirs par la directive ECN+

L'ordonnance de transposition de la directive ECN+ aligne les pouvoirs des autorités nationales de concurrence sur ceux de la Commission. Un pouvoir d'injonction spécifique avait été introduit par la loi LME en 2008, pour régler, à l'article L. 752-26 du Code de commerce, les cas d'exploitation abusive d'une position dominante ou d'un état de dépendance économique de la part d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises exploitant un ou plusieurs magasins de commerce de détail en métropole. Du fait de la portée générale du nouveau pouvoir d'imposer des mesures structurelles prévu à l'article L. 464-2, l'article L. 752-26 du Code de commerce est abrogé. Le considérant 37 de la directive ECN+ précise que les autorités nationales de concurrence doivent être dotées “de moyens efficaces leur permettant de rétablir la concurrence sur le marché en imposant des mesures correctives de nature structurelle et comportementale, proportionnées à l'infraction commise et nécessaires pour faire cesser l'infraction”. Comme le souligne la directive, le principe de proportionnalité implique que, lorsqu'elles doivent choisir entre deux mesures correctives d'efficacité égale, les autorités nationales de concurrence optent pour la solution la moins contraignante pour l'entreprise.

Nature et interprétation de l'injonction

L'injonction constitue par nature une mesure contraignante pour celui qui la subit. D'interprétation stricte, elle doit être formulée en des termes clairs, précis et exempts d'incertitude quant à son exécution et ne concerne que les entreprises auxquelles elle s'adresse. Si l'article L. 464-2 n'impose aucun délai aux parties pour exécuter les injonctions de l'Autorité, le juge considère cependant qu'elles doivent être exécutées dans un délai raisonnable à compter de leur notification. L'Autorité de la concurrence a même estimé que l'injonction étant immédiatement exécutoire, les parties doivent s'y conformer sans délai. Le délai raisonnable s'apprécie concrètement eu égard aux circonstances de l'espèce, et notamment des caractéristiques propres à l'entreprise et au secteur concerné.

Vérification et sanction du non-respect de l'injonction

L'Autorité est compétente pour vérifier le respect de l'injonction. La procédure de vérification obéit à des règles plus souples que celle de poursuite de l'infraction. Il n'est, en effet, pas nécessaire qu'une notification des griefs précède la rédaction du rapport et sa notification. L'Autorité ne peut cependant se prononcer sur le non-respect d'une mesure d'injonction que si elle a été saisie de cette question dans les conditions définies à l'article L. 462-5 du Code de commerce. En cas de non-respect de l'injonction, l'article L. 464-3 du Code de commerce permet à l'Autorité de prononcer une sanction pécuniaire dans les limites de l'article L. 464-2.

Application spécifique dans les collectivités d'outre-mer

Dans les collectivités relevant de l'article 73 de la Constitution et dans les collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, des îles Wallis et Futuna et de Saint-Pierre-et-Miquelon, l'article L. 752-27 permet à l'Autorité, lorsqu'une entreprise ou un groupe d'entreprises exploitant un ou plusieurs magasins de commerce de détail détiennent une position dominante, qui soulève des préoccupations de concurrence du fait de prix ou de marges élevés, de faire connaître ses préoccupations de concurrence à l'entreprise ou au groupe d'entreprises en cause, qui peut dans un délai de deux mois lui proposer des engagements dans les conditions prévues par l'article L. 464-2. A défaut de proposition d'engagements ou si ceux-ci sont insuffisants pour mettre un terme aux préoccupations de concurrence, l'Autorité peut lui enjoindre de modifier, compléter ou résilier, dans un délai déterminé qui ne peut excéder deux mois, tous accords et tous actes par lesquels s'est constituée la puissance économique qui permet les pratiques constatées en matière de prix ou de marges. Elle peut également lui enjoindre de procéder à une cession d'actifs si cette dernière constitue la seule solution pour garantir une concurrence effective. L'Autorité peut prononcer une injonction sous astreinte dans la limite de 5 % du chiffre d'affaires journalier moyen et par jour de retard à compter de la date que l'Autorité fixe.

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