Netflix au cœur d'une controverse judiciaire suite à la sortie de son film « Sous la Seine »

Le réalisateur français Vincent Dietschy accuse la plateforme de parasitisme, affirmant que le film présente des similitudes troublantes avec son projet “Silure”, sur lequel il travaillait depuis plus de dix ans. 

Publié le 
27/7/2024
Netflix au cœur d'une controverse judiciaire suite à la sortie de son film « Sous la Seine »
 

Sorti le 6 juin dernier, le film “Sous la Seine”, dont Bérénice Béjo tient l’affiche, connaît un succès retentissant avec plus de 84 millions de vues selon les dires de Netflix. 

Selon le réalisateur, l'intrigue, le style et certains éléments narratifs de « Sous la Seine » sont très proches de son propre projet alors qu’il avait soumis son scénario à plusieurs professionnels du secteur sans que cela n'aboutisse.


La notion de parasitisme

La plateforme de vidéo à la demande, ainsi que les producteurs et le réalisateur de « Sous la Seine », ont fait l’objet d’une assignation en référé (procédure d’urgence) devant le tribunal judiciaire de Paris pour parasitisme commercial. La parasitisme est un acte de concurrence déloyale, désignant l’exploitation indue du travail d’autrui à des fins lucratives. 

Il consiste à se placer dans le sillage d'autrui, à s'appuyer sur les efforts et les initiatives d'un opérateur économique, concurrent ou non, pour conquérir une clientèle. Le parasite a un comportement suiveur qui se traduit généralement par la reprise de manière identique ou quasi identique des éléments ayant contribué au succès d'une entreprise afin d'en profiter “sans bourse délier”, c'est-à-dire sans consentir d'efforts financiers intellectuels, ou promotionnels.

La chambre commerciale de la Cour de cassation, dans sa décision n° 96-22.457 du 26 janvier 1999, en donne la définition suivante : 

« Le parasitisme économique se définit comme l'ensemble des comportements par lesquels un agent économique s'immisce dans le sillage d'un autre, afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire ».

Cette accusation repose sur l'idée que Netflix aurait utilisé les idées de Dietschy pour générer des revenus sans lui en attribuer le crédit ni les bénéfices correspondants.


L’affaire devant le TJ de Paris

Le litige a été examiné par le Tribunal judiciaire de Paris, où les deux parties ont présenté leurs arguments. Les avocats de Dietschy demandaient que le film soit retiré du catalogue de Netflix, mettant en avant les nombreuses similitudes (135 points de similitude ont été annoncés) entre les deux œuvres pour prouver le parasitisme. 

Netflix, de son côté, défendait que toute ressemblance était purement fortuite et insistait sur le caractère original de « Sous la Seine ». La plateforme souligne son engagement à respecter les droits d'auteur et affirme qu'aucune violation n'a été commise intentionnellement.


Verdict : Netflix ne doit pas retirer le film 

Le Tribunal judiciaire de Paris a donné raison à cette dernière et le film ne sera pas retiré de la plateforme pour une question procédurale. 

La juridiction a jugé irrecevable la demande du réalisateur français au motif qu’il n’a pas assigné la bonne entité. L’ordonnance de référé affirme effectivement que : 

« La société SAS Netflix France n’est pas l’exploitante, l’éditrice ni l’hébergeur de la plateforme Netflix qui apparaît être la société Netflix International BV ».

Cependant une procédure distincte existe à l’encontre des producteurs du film sur laquelle la justice n’a pas encore rendu son verdict. 

La distinction entre les oeuvres de l’esprit et les idées 

En France, la législation fait une distinction nette entre les œuvres de l'esprit et les idées. 

L’article L. 111-1 alinéa 1er du Code de la propriété intellectuelle dispose notamment que : 

L'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous.

Une œuvre de l'esprit telle qu'un film, un texte ou un tableau est donc protégée par le droit d'auteur dès lors qu'elle est jugée « originale ». En parallèle, les marques sont protégées par le droit de la propriété intellectuelle à condition que les « signes » qui les représentent soient suffisamment distinctifs. 

En revanche, les idées ne bénéficient d'aucune protection spécifique et sont considérées comme étant « de libre parcours ». C’est en tout cas ce qu’affirme la Cour de cassation dans un arrêt du 22 juin 2017 (n° 14-20.310) lorsqu’elle énonce que : 

“les idées et concepts sont de libre parcours et ne sont, en conséquence, susceptibles d'aucune appropriation”


La protection des idées originales 

Cette affaire soulève des questions sur la protection des idées originales dans l'industrie cinématographique, surtout à une époque où le contenu numérique se multiplie. 

Les créateurs peuvent se sentir davantage menacés par la possibilité de voir leurs idées exploitées sans leur consentement, tandis que les plateformes de streaming pourraient être amenées à renforcer leurs processus de vérification pour éviter des accusations similaires.

Et encore, il n'était pas question d'intelligence artificielle créant un œuvre à partir d'une idée originale dans cette affaire, mais il apparaît comme inéluctable que les litiges à ces sujets vont se multiplier à l'avenir.

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