Très attendue, cette ordonnance vise à mettre en conformité la loi du 9 juin 2023 avec le droit européen.
Le contexte de l’adoption de l’ordonnance
Pour rappel, la loi du 9 juin 2023 a posé un cadre juridique pour l’activité d’influence commerciale par voie électronique.
Cette loi entrant dans le cadre de la société de l’information définie par le droit européen, certaines dispositions avaient été notifiées à la Commission européenne en mai 2023. Celle-ci a formulé, en août 2023, des observations, indiquant que certaines de ces dispositions empiétaient sur les règles de l’Union européenne, et notamment le Digital Services Act.
De plus, certains acteurs du secteur avaient soulevé le manque de clarté de la loi.
Dans ce contexte, le gouvernement français a intégré l’influence commerciale au sein de la loi du 22 avril 2024 portant diverses dispositions d’adaptation du droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole, dite loi DDADUE.
Ainsi, l’article 3 de cette loi a :
- Abrogé les articles 10,11,12, 15 et 18 de la loi du 9 juin 2023 ;
- Habilité le gouvernement à réécrire par voie d’ordonnance les autres articles (1er, 2, 4, 5, 8 et 9)
Sur le fondement de cet article, l’ordonnance n°2024-978 du 6 novembre 2024 a été adoptée.
Les apports de l’ordonnance
Une précision des interdictions
Au sein de l’article 4 portant sur les activités dont la promotion est interdite :
- Est ajouté une précision au point I : Est interdite […] toute promotion, directe ou indirecte, des actes, des procédés, des techniques et des méthodes à visée esthétique pouvant présenter des risques pour la santé des personnes mentionnées à l’article L.1151-2 du code de la santé publique ;
- Est ajouté une précision au point II : Est interdite aux personnes exerçant l'activité d'influence commerciale par voie électronique toute promotion, directe ou indirecte, de produits, d'actes, de procédés, de techniques et de méthodes non thérapeutiques présentés comme comparables, préférables ou substituables à des actes, des protocoles ou des prescriptions thérapeutiques ;
- Est ajoutée l’interdiction de toute vente ou offre promotionnelle d’un produit ou toute rétribution en échange d’une inscription à des actions mentionnées à l’article L.6323-6 du code du travail.
De plus, l’ordonnance précise les sanctions.
Un assouplissement des obligations en matière de transparence
Tout d’abord, les mentions imposées par la loi, détaillées ci-après, n’ont plus à être indiquées « sur l’image ou la vidéo » et « durant l’intégralité du visionnage » ou « de la promotion ». Désormais, l’ordonnance indique seulement que la mention doit être claire, lisible et compréhensible sur tout support utilisé.
S’agissant des contenus comprenant des images ayant fait l’objet :
- d’une modification par tout procédé de traitement visant à affiner, épaissir la silhouette ou modifier l’apparence ou
- d’une production par tout procédé d’intelligence artificielle visant à représenter un visage ou une silhouette.
S’il est prévu ces contenus doivent être accompagnés, respectivement, de la mention « Images retouchées » ou « Images virtuelles », l’ordonnance ajoute que ces mentions peuvent être remplacées par une mention équivalente à condition qu’elle soit adaptée aux caractéristiques de l’activité d’influence et au format du support de communication utilisé.
Ces modifications visent notamment à garantir la pérennité de la disposition dès lors que la technologie et les normes juridiques dans ce secteur évoluent rapidement.
S’agissant des mentions visant à indiquer l’intention commerciale :
Initialement, la promotion de biens, de services ou d’une cause quelconque devait être indiquée exclusivement, par la mention « Publicité » ou la mention « Collaboration commerciale ».
Désormais, l’ordonnance admet que soit indiquée une mention équivalente, adaptée aux caractéristiques de l’activité de l’influence et au format du support de communication utilisé.
Également, alors que le texte indiquait que l’absence d’indication de la véritable intention commerciale, constitue une pratique commerciale trompeuse par omission, l’ordonnance apporte plus de réserve en indiquant qu’il n’y aura pratique commerciale trompeuse que dans les conditions prévues par l’article L.121-3 du code de la consommation et si l’intention commerciale ne ressort pas déjà du contexte. Ainsi, la pratique n’est pas caractérisée per se.
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Une clarification sur l’obligation de désigner un représentant sur le territoire européen.
Au sein de l’article 9, est ajouté une précision impliquant que, les influenceurs non établis sur le territoire d’un Etat membre de l’Union européenne, de la Confédération suisse ou de l’Espace économique européen, mais ciblant un public en France, sont tenus de désigner un représentant légal au sein de l’Union européenne et de souscrire à une assurance civile dans l’Union européenne.
Une clarification du champ d’application des articles 4 et 5
Le nouvel article 5-1 de l’ordonnance apporte des clarifications sur l’application du principe du pays d’origine, imposé par les directives 2000/31/CE du 8 juin 2000 sur le commerce électronique et 2010/13/UE du 10 mars 2010 sur les services de médias audiovisuels.
Dans l’hypothèse où un influenceur serait (i) qualifié de fournisseur de média audiovisuel au sens de la directive 2010/13/UE et (ii) relèverait de la compétence de la France, les points I, II et III de l’article 4 s’appliquent.
En revanche, si l’influenceur relève d’un autre Etat membre de l’Espace Economique Européen (EEE), ces points ne s’appliquent pas, sauf dérogation.
Sous réserve de ces hypothèses, les dispositions des articles 4 et 5 ne s’appliquent pas aux personnes établies dans un autre État partie à l’Espace économique européen.
Les points non abordés par l’ordonnance
Contrairement à ce qui était évoqué, et souhaité par certains acteurs, l’ordonnance n’a pas modifié la définition de l’influence commerciale.
De plus, aucune modification n’est apportée sur l’obligation de mettre par écrit le contrat et d’indiquer des mentions obligatoires. A ce titre, le seuil de valeur de produits, en dessous duquel l’obligation ne s’applique pas, n’est toujours pas défini.
Et après ?
Dans un délai de trois mois suivant la publication de l’ordonnance, un projet de loi de ratification devrait être déposé devant le Parlement.
De plus, doivent être adoptés deux décrets au titre des articles 5-1 et 9-1 ajoutés aux décrets devant déjà être adoptés au titre de la loi.