Distribution exclusive

 

Droit européen de la distribution

Selon le règlement 2022/720, le contrat de distribution exclusive est celui par lequel “le fournisseur alloue un territoire ou un groupe de clients à titre exclusif à lui-même ou à un nombre maximal de cinq acheteurs et restreint la possibilité de tous ses autres acheteurs de vendre activement sur le territoire exclusif ou au groupe de clients exclusif” (Règl. 2022/720, art. 1er, para. 1., pt h)). En d'autres termes, la distribution exclusive implique que “le fournisseur alloue un territoire ou un groupe de clients exclusivement à un seul acheteur, ou à un nombre limité d’acheteurs, tout en interdisant à tous ses autres acheteurs sur le territoire de l’Union de vendre activement sur le territoire exclusif ou au groupe de clients exclusif” (Lignes directrices, pt 117). L'exclusivité de fourniture mise à la charge du fournisseur est essentielle pour différencier la distribution exclusive de la distribution sélective. Les distributeurs exclusifs - qui peuvent être au nombre de cinq maximum - bénéficient, contrairement au revendeur agréé, d'un véritable monopole de vente des produits fournis sur le territoire ou au groupe de clients concédé. Le fournisseur s'interdit d'approvisionner sur ce territoire d'autres distributeurs ou clients, sous la seule réserve de la clientèle qu'il aurait pu se réserver. Cependant, l'exclusivité dont bénéficient les distributeurs exclusifs n'est pas absolue. Ainsi, bien qu'à l'abri des ventes actives des autres distributeurs du réseau sur leur territoire, ils sont exposés à leurs ventes passives, c'est-à-dire à celles qui répondent à la demande de consommateurs de leur territoire, sans que ceux-ci aient été démarchés par les revendeurs concurrents. Enfin, alors que par définition, le distributeur sélectif s'interdit toute vente à des non-membres du réseau, le distributeur exclusif n'est pas soumis à une telle limitation de ses ventes, sauf lorsque la tête de réseau a opté pour une combinaison des distributions exclusive et sélective.

Du point de vue concurrentiel, la distribution exclusive présente un bilan ambivalent : l'accroissement de la concurrence intermarques est obtenu au prix d'une diminution de la concurrence intramarque. La distribution exclusive restreint la concurrence tout en contribuant à la développer. Elle est donc susceptible d'échapper à la prohibition du droit des ententes, soit au titre de la règle de raison, soit sur le fondement d'une exemption.

L'accord vertical entre le distributeur exclusif et le fournisseur ne doit pas restreindre la liberté commerciale du revendeur, qui doit pouvoir fixer librement ses prix de revente. L'imposition directe ou indirecte de prix mimima de revente au consommateur est traditionnellement considérée comme une grave entorse aux règles de concurrence. La clause de prix imposé constitue une restriction de concurrence par son seul objet et ne peut en principe être exemptée. À la différence des prix maxima ou conseillés, l'imposition d'un prix minimum constitue une clause noire au sens du règlement 2022/720 (art. 4, a)).

Les importations parallèles peuvent être source de difficultés dans un réseau de distribution exclusive. Les conditions de vente ne sont pas nécessairement les mêmes dans l'ensemble des vingt-huit marchés de l'Union européenne et les membres d'un réseau national peuvent être concurrencés par les importations en provenance d'autres États membres. Aux termes de l'article 4 du règlement 2022/720, l'interdiction des importations parallèles, qui institue une protection territoriale absolue, constitue une restriction caractérisée, c'est-à-dire une clause noire insusceptible de bénéficier de l'exemption. Ainsi, un contrat de distribution exclusive qui ne comportait aucune interdiction de réexportation a été considéré comme constituant une entente anticoncurrentielle dès lors que les parties au contrat s'étaient concertées afin de restreindre les importations parallèles destinées à un revendeur non agréé.

Si le contrat de distribution exclusive protège le distributeur des ventes actives, les ventes passives sont traditionnellement admises au sein d'un réseau de distribution exclusive et leur interdiction jugée anticoncurrentielle par les autorités de concurrence. Le règlement 2022/720 exclut l'exemption en cas d'interdiction des ventes passives (art. 4 pt b)). La notion de vente active a fait l'objet d'une clarification par le règlement 2022/720, qui prend désormais en considération le ciblage actif des clients par internet (art. 1, para. 1, pt l). Il est notamment devenu possible de restreindre les ventes actives du distributeur exclusif sur un autre territoire mais également celles de ses clients directs (clause de “pass on") (art. 4, pt b, i)).

Par ailleurs, le nouveau règlement autorise expressément le recours à des systèmes de distribution différents selon les pays. Dans ce cas, une protection des distributeurs exclusifs contre les ventes actives des autres distributeurs libres ou sélectifs et de leurs clients directs est admise.

L'interdiction des rétrocessions, qui consistent en des ventes croisées entre distributeurs d'un même réseau, est par nature restrictive de concurrence car elle limite la concurrence au sein de la marque, contrecarrant par là même l'objectif de réalisation du marché intérieur. Si la distribution exclusive n'est pas combinée à la distribution sélective, l'interdiction des rétrocessions enfreint le principe de liberté des ventes des distributeurs. Lorsque le système de distribution est à la fois exclusif et sélectif, elle est contraire au principe de liberté des rétrocessions entre membres du réseau inhérente à la distribution sélective. Le règlement 2022/720, qualifie l'interdiction des rétrocessions entre distributeurs sélectifs de restriction caractérisée (art. 4, pt c), ii)).

Lorsque ni la part de marché du fournisseur ni celle de l'acheteur n'excède 30 %, l'accord de distribution est exempté, même s'il est assorti d'autres restrictions verticales non caractérisées, comme une obligation de non-concurrence limitée à cinq ans. L'exemption est exclue en cas de clauses noires, telles que l'imposition d'un prix minimum de vente ou de restrictions territoriales ou de clientèle. Le bénéfice de l'exemption par catégorie est, enfin, soumis à certaines conditions destinées à garantir l'accès au marché ou prévenir la collusion, listées à l'article 5 du règlement. L'obligation de non-concurrence postcontractuelle doit, pour être valable, être limitée à une durée d’un an à compter de l'expiration de l'accord et aux locaux et terrains à partir desquels l'acheteur a opéré pendant la durée du contrat, concerner des biens et services en concurrence avec les biens et services contractuels, et être indispensable à la protection du savoir-faire. L'obligation de non-concurrence contractuelle, qui, insérée au sein du contrat de distribution exclusive, prend souvent la forme d'une obligation d'approvisionnement exclusif, ne peut excéder cinq années ou être à durée indéterminée si elle porte sur 80 % (Règl. 2022/720, art. 1er, f))) des achats du distributeur auprès du fournisseur ou d'une entreprise agréée (Règl. 2022/720, art. 5, para. 1., a)). La durée peut être supérieure si les biens ou services sont revendus par l'acheteur à partir de locaux et terrains qui sont la propriété du fournisseur (art. 5, para. 2.).

L'accord qui tombe sous le coup de l'article 101 TFUE, paragraphe 1, et qui ne bénéficie pas d'une exemption par catégorie, peut toujours être individuellement exempté sur le fondement de l'article 101 TFUE, paragraphe 3. S'il appartient à la Commission d'établir l'effet sensible de l'accord, il revient aux entreprises, une fois cet effet établi, de démontrer l'existence de gains d'efficacité susceptibles de satisfaire aux conditions posées à l'article 101 TFUE, paragraphe 3. La Commission tient compte, pour évaluer les gains d'efficacité apportés par un accord de distribution exclusive, des investissements réalisés pour protéger ou bâtir l'image de marque, de la diminution des coûts de logistique générés par les économies d'échelle relatives au transport et à la distribution, et de l'effet de l'affaiblissement de la concurrence intramarque sur la concurrence intermarques. La position détenue sur le marché par le fournisseur et ses concurrents est à cet égard particulièrement importante. Si les concurrents sont forts, l'affaiblissement de la concurrence intramarque sera compensé par la concurrence intermarques. En revanche, si les concurrents détiennent des parts de marché similaires et sont en faible nombre sur le marché, un risque de collusion existe. Las clauses susceptibles d'être qualifiées de restrictions caractérisées ont peu de chance d'être exemptées.

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