Position dominante individuelle

 

Droit français de la concurrence

L'article L. 420-2, alinéa 1, du Code de commerce prohibe “l'exploitation abusive [...] d'une position dominante sur le marché intérieur ou dans une partie substantielle de celui-ci”. La position dominante peut être individuelle ou collective. Elle est individuelle lorsqu'elle est détenue par une seule entreprise. En présence de produits différenciés, l'Autorité de la concurrence considère que les ventes en valeur et la part de marché correspondante donnent la meilleure idée de la position et de la puissance relatives de chaque fournisseur. Toutefois, elle déclare que “si la part de marché peut constituer un indice de l'existence d'une position dominante, [...] cette donnée est, dans bien des cas, insuffisante”. Le plus souvent, l'Autorité recourt, pour établir la domination d'une entreprise, à une “analyse multicritères”.

Lorsque la part de marché de l'entreprise revêt une certaine importance, elle peut constituer un indice suffisant de l'existence d'une position dominante. À l'inverse, la détention d'une part de marché limitée exclut la qualification d'entreprise dominante. Entre ces deux extrêmes, la part de marché ne représente qu'un critère relatif qu'il faut compléter par d'autres indices. Lorsqu'elle est corroborée par d'autres facteurs, une part de marché supérieure à 50 % suffit généralement à fonder une position dominante, alors qu'une part de marché inférieure à 40 % est en principe insuffisante.

Selon l'Autorité de la concurrence, lorsqu'une entreprise contrôle la totalité ou la quasi totalité d'un marché concerné, cette seule circonstance suffit à établir une position dominante. Toutefois, en présence d'un service d'intérêt général, la segmentation du marché prend une dimension spécifique. Si le fait de fournir un service public crée une présomption de position dominante, cette présomption n'a de sens que si le marché pris en considération inclut les périodes, les modalités et autres circonstances de l'activité de service public. Le principe selon lequel le contrôle de la totalité ou de la quasi totalité du marché concerné établit la position dominante s'étend aux hypothèses de quasi monopole.

La disproportion relative des parts de marché des entreprises concernées peut constituer un critère déterminant de la position dominante. L'entreprise qui contrôle 32 % d'un marché peut être déclarée en position dominante dès lors que la part de marché de son principal concurrent n'excède pas la moitié de la sienne. Il en est a fortiori ainsi pour l'entreprise dont la part de marché s'établit entre 74 et 89 % alors que celle du second opérateur avoisine 7 %.

La part de marché ne représente généralement qu'un critère relatif qu'il faut compléter par d'autres indices :

  • structure du marché : la position de leader de l'entreprise dépend de l'intensité de la concurrence existant sur le marché, de sa contestabilité et de la possibilité pour les concurrents d'y accéder. Une entreprise ne peut pas adopter un comportement indépendant, s'il existe un concurrent d'une puissance équivalente à la sienne. La pression tarifaire exercée par l'autoConsommation n'est, en principe, significative que si les biens autoproduits sont suffisamment substituables à ceux de l'entreprise en position dominante et si les coûts de cette autoproduction sont suffisamment bas. Un marché caractérisé par son étroitesse et son isolement favorise la domination du premier groupe de distribution sur le territoire national. De même, l'opérateur historique, détenteur d'une part de marché de 97 %, qui se maintient sur un marché sur lequel aucun des leaders du secteur n'est parvenu à entrer, est en position dominante. La situation de repli technologique et commercial de ses concurrents directs établit également la dominance de l'entreprise qui détient 60 % de part de marché. À l'inverse, l'entreprise qui se trouve sur un marché animé par une vive concurrence et dont la part de marché passe de 49,5 à 48,25 % alors que ses deux concurrents, dont l'un en forte progression, atteignent respectivement 35,60 % et 16,25 %, n'est pas en position dominante. La forte présence de marques distributeurs permet également d'écarter l'existence d'une position dominante dans le cas d'une entreprise contrôlant 25 % du marché. Selon l'Autorité de la concurrence, l'existence d'une concurrence potentielle doit être analysée au stade de la détermination de la position dominante plutôt qu'à celui du marché pertinent, puisque la contrainte concurrentielle d'une entrée potentielle peut produire un effet d'affaiblissement du pouvoir de marché des entreprises présentes sur le marché. L'importance des investissements publicitaires et commerciaux requis pour pénétrer ou se développer sur le marché concerné, ou les contraintes techniques ou réglementaires constituent les barrières à l'entrée (ou des facteurs de mobilité, si les entreprises se trouvent déjà présentes sur le marché) les plus fréquemment relevées.
  • structure de l'entreprise : il doit être tenu compte de l'ensemble des éléments qualitatifs et quantificatifs qui lui sont propres, tels qu'une supériorité dans la gestion, l'innovation technique ou l'action commerciale, les capacités de stockage, le nombre de convois pour une entreprise de pompes funèbres, les familles de produits pour la grande distribution ou le nombre de clients. Parmi les indices permettant de corroborer la position dominante de l'entreprise, les autorités de concurrence retiennent aussi son leadership, sa qualité d'opérateur historique ou son image de marque. La disproportion des moyens financiers d'un opérateur avec ses concurrents ou les facilités d'approvisionnement peuvent également constituer un facteur d'appréciation de la position dominante. La puissance financière résulte notamment de l'appartenance à un groupe, qui est en elle-même un indice de position dominante. La notoriété des produits ou de l'entreprise ou la détention de droits de propriété intellectuelle ou d'un droit spécial ou exclusif, constituent également des facteurs de position dominante. Il en va de même de la large diffusion des produits de l'entreprise sur l'ensemble du territoire national ou du fait de disposer d'une organisation commerciale vaste et sophistiquée ou d'une gamme de produits étendue et diversifiée, ou d'une base de données exhaustive et régulièrement mise à jour nécessitant un investissement important et continu constitutif d'une réelle barrière à l'entrée.
  • comportements : les autorités de concurrence considèrent que les conditions dans lesquelles une entreprise met en œuvre les moyens dont elle dispose peuvent être prises en considération pour apprécier l'existence d'une position dominante. Une politique de prix consistant pour un fournisseur à cantonner les profits des distributeurs aux remises qui leur sont accordées en fin d'année ou l'existence d'un contrat exclusif, d'un contrat de parrainage ou d'un contrat de franchise constituent des indices ou des facteurs de domination.
  • performances : du fait de leur ambiguïté, les critères de performance ne se voient reconnaître en droit français qu'une portée extrêmement limitée. La diminution de la part de marché d'une entreprise, ou ses pertes financières, ne suffisent pas en principe à réfuter l'existence d'une position dominante, car elle peut s'expliquer par d'autres causes. Le maintien d'une part de marché importante durant plusieurs années, en dépit d'un niveau de prix supérieur à celui des concurrents, est en revanche considéré comme un indice de domination. De même, le pouvoir d'augmenter ses prix sur un marché en régression, malgré la baisse continue et sensible du tonnage vendu, combiné à une part de marché de 75 %, ou la possibilité de pratiquer des prix supérieurs à ceux de ses concurrents, constituent des facteurs de position dominante. Un ajustement de prix sur les concurrents n'exclut cependant pas la domination, s'il permet à l'entreprise, tout en conservant une part substantielle du profit qu'elle réalisait antérieurement, de maintenir sa part de marché à un niveau très supérieur à celui des autres opérateurs. L'augmentation du chiffre d'affaires du principal concurrent ne suffit pas à caractériser une absence d'indépendance de comportement et ne saurait exclure la position dominante d'une entreprise. De même, un opérateur dont la part de marché dépasse 80 %, ne peut invoquer, pour contester sa position dominante, la progression de son principal concurrent.
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