Les contrôleurs d’accès et le DMA
Depuis le 6 septembre 2023, la Commission a désigné six entreprises (Apple, Alphabet, Amazon, ByteDance, Meta et Microsoft) de « gatekeepers », leur imposant une vingtaine d’obligations et interdictions listées aux articles 5, 6 et 7 du DMA.
Un contrôleur d’accès doit avoir un impact significatif sur le marché intérieur, assurer un service de plateforme essentiel qui constitue une passerelle importante permettant aux utilisateurs professionnels d’atteindre les utilisateurs finaux et jouir d’une position bien établie et durable dans ses activités. En qualité de gatekeeper, Apple est tenu de se soumettre aux règles du DMA.
Les constatations préliminaires relatives aux règles d'orientation d'Apple dans l'App Store
Après une première enquête, la Commission a relevé plusieurs points de non-conformité imputables à Apple concernant la gestion de l'App Store. La boutique d’application est accusée d'imposer des restrictions injustes aux développeurs et de favoriser ses services au détriment de la concurrence.
La Commission indique que les développeurs qui distribuent leurs applications par l'intermédiaire de l'App Store devraient pouvoir :
- informer leurs clients sur d'autres possibilités d'achat moins coûteuses,
- les orienter vers ces offres et
- leur permettre d'effectuer des achats, et ce gratuitement.
La Commission a relevé que les conditions commerciales régissant les relations avec les développeurs d’application :
- ne permettent pas aux développeur d’orienter librement leurs client ;
- ne permettent d’orienter les utilisateurs qu’au moyen de liens, un processus imposé par Apple qui empêche les développeurs d'applications de communiquer, de promouvoir des offres et de conclure des contrats par le canal de distribution de leur choix ;
- facturent à la charge des développeurs des commissions qui vont au-delà de ce qui est strictement nécessaire en matière d’acquisition initiale d’un nouveau client.
Des constatations préliminaires laissant à Apple la possibilité de se défendre
Il ne s’agit cependant que de constatations préliminaires de la Commission. Celles-ci sont sans préjudice de l’issue de l’enquête. Apple a désormais la possibilité d'exercer ses droits de la défense en répondant par écrit aux constatations préliminaires de la Commission.
Face à ces conclusions, la Commission a décidé d'ouvrir une nouvelle enquête pour examiner plus en profondeur les pratiques d'Apple. Cette enquête pourrait aboutir à des sanctions sévères, y compris une amende potentielle qui pourrait atteindre jusqu'à 10% du chiffre d'affaires mondial de l'entreprise, soit environ 30 milliards d'euros.
Une telle pénalité serait l'une des plus importantes jamais infligées par l'Union européenne dans le cadre du DMA.
Pour rappel, la Commission avait déjà infligé à Apple une amende de plus de 1,8 milliard d'euros en raison des règles abusives liées à l'App Store imposées aux fournisseurs de services de diffusion de musique en continu en mars 2024.
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La nouvelle enquête pour non-respect portant sur les conditions contractuelles d'Apple
La Commission a également ouvert une enquête pour non-respect portant sur les nouvelles conditions contractuelles imposées par Apple aux développeurs comme condition d'accès à certaines des nouvelles fonctionnalités :
notamment l'offre de boutiques d'applications alternatives ou la possibilité de proposer une application par l'intermédiaire d'un autre canal de distribution. Jusqu'à présent, Apple a conservé la possibilité de souscrire aux conditions précédentes, qui ne permettent en aucune manière d'accéder à d'autres canaux de distribution.
Est également visée la «Core Technology Fee» d'Apple, la commission d'un montant de 50 centimes d'euro que les développeurs de boutiques d'applications et d'applications tierces doivent payer par application installée.
Thierry Breton, commissaire chargé du marché intérieur, a déclaré :
Le nouveau mot d’ordre chez Apple devrait être d’«agir différemment». Aujourd’hui, nous prenons de nouvelles mesures pour garantir qu’ Apple respecte les dispositions du DMA. Nous avons des raisons de penser que les règles relatives à l’ App Store ne permettant pas aux développeurs d’applications de communiquer librement avec leurs propres utilisateurs sont contraires au DMA. Nous ouvrons également un nouveau dossier concernant les nouvelles conditions commerciales d’Apple relatives à iOS. Sans préjudice des droits de la défense d’ Apple, nous sommes déterminés à utiliser la panoplie d’outils bien établis et efficaces offerte par le DMA pour enfin ouvrir de réelles possibilités au bénéfice des innovateurs et des consommateurs.
La vice-présidente exécutive chargée de la politique de concurrence, Margrethe Vestager, a de son côté réitéré son engagement à maintenir un marché numérique ouvert et équitable pour tous les acteurs, grands ou petits.