CJUE  : une réduction de prix annoncée par un professionnel doit être calculée sur la base du prix de référence

Aux termes d’un arrêt rendu le 26 septembre dernier, la Cour de justice de l’Union européenne affirme qu’une réduction de prix doit être déterminée sur la base du prix le plus bas pratiqué au cours des 30 derniers jours.

Publié le 
23/10/2024
CJUE  : une réduction de prix annoncée par un professionnel doit être calculée sur la base du prix de référence
 

Ce prix le plus bas, plus communément appelé prix de référence, ne doit pas seulement être mentionné dans l’annonce de réduction de prix : il doit être la base du calcul de la réduction.

Rappel sur la réglementation

Avant l’adoption de la directive (UE) 2019/2161 du 27 novembre 2019, dite « Directive Omnibus », les affichages des réductions de prix étaient peu réglementés, conférant une plus grande liberté d’action aux professionnels.

Poursuivant un objectif de transparence, la Directive Omnibus, modifiant la directive 98/6 (CE) du 16 février 1998 relative à la protection du consommateur, et transposée en droit français fin 2022, a introduit des règles en la matière.

Désormais, au sens de l’article 6 bis de la directive 98/6 modifiée, paragraphes 1 et 2, et de l’article L.112-1-1 du Code de la consommation issu de la transposition, toute annonce de réduction de prix doit indiquer le prix antérieur appliqué pendant une durée déterminée avant la réduction de prix.

Ce prix antérieur, correspond au prix le plus bas pratiqué par le professionnel à l’égard de tous les consommateurs, au cours des 30 derniers jours précédant l’application de la réduction de prix.

Pour rappel, un professionnel effectue une annonce de réduction de prix lorsqu’il indique, ou laisse entendre au consommateur moyen, que le prix qu’il propose est inférieur au prix qu’il proposait antérieurement. Cette annonce peut être proposée en magasin, sur un site internet ou via une plateforme en ligne.

L’affichage de la réduction de prix est laissé à la libre appréciation du professionnel et peut notamment prendre la forme d’un pourcentage (15% de réduction), d’une valeur absolue (20 euros de réduction), d’un prix barré à côté du nouveau prix.

En principe, les allégations marketing générales, telles que « prix bas » ou « prix choc », promouvant l’offre du professionnel ne sont pas concernées, sauf si elles créent l’impression d’une réduction de prix, et notamment si elles sont accompagnées de signes tels que des prix barrés ou des flèches orientées vers le bas.  

Le contexte de l’affaire

Deux annonces de réduction de prix proposées par le discounter Aldi Süd dans son prospectus hebdomadaire ont été contestées par une association allemande de consommateurs, devant le tribunal régional de Düsseldorf.

L’association considère que ces réductions seraient déloyales en ce sens qu’elles ne sont pas déterminées sur la base du prix le plus bas pratiqué au cours des 30 derniers jours, ce dernier étant seulement mentionné.

Plus précisément, les offres concernent, pour l’une, une réduction sous la forme d’un pourcentage pour des bananes, et pour l’autre, un prix choc pour des ananas.

Plusieurs prix sont mentionnés sur la publicité :

  • Un prix au milieu, étant le nouveau prix applicable ;
  • Un prix dans le coin inférieur barré, étant le prix appliqué avant la réduction ;
  • Un prix correspondant au prix le plus bas pratiqué par l’enseigne au cours des 30 derniers jours.

La particularité réside dans le fait que, pour les bananes, le prix affiché est de 1,29€, après la réduction de 23% par rapport au prix de 1,69€. Or, le prix le plus bas pratiqué au cours des 30 derniers jours est 1,29€.

Ne partageant pas la position de l’association de consommateurs et considérant que l’article 6 bis détermine uniquement les informations devant être fournies aux consommateurs, sans préciser la manière dont elles doivent être fournies, le tribunal a posé deux questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne.

Examinées ensembles, les deux questions visaient à déterminer si l’article 6 bis, paragraphe 1 et 2 de la directive 98/6 doit être interprétée en ce sens qu’il exige qu’une réduction de prix d’un produit annoncée par un professionnel, sous la forme soit d’un pourcentage, soit d’une mention publicitaire visant à mettre en avant le caractère avantageux du prix annoncé, soit déterminée sur la base du « prix antérieur » au sens du paragraphe 2 de cet article.

La position de la Cour de justice

Pour répondre, la Cour de justice a pris en compte les objectifs poursuivis par la directive 98/6 et l’article 6 bis de ladite directive, et relève que :

  • De manière générale, la directive vise à « améliorer l’information des consommateurs et à faciliter la comparaison des prix de vente des produits offerts par des professionnels aux consommateurs, de manière à permettre à ceux-ci d’opérer des choix éclairés » (point 22).
  • Quant à l’article 6 bis, il vise spécifiquement à « empêcher les professionnels d’induire en erreur le consommateur, en augmentant le prix pratiqué avant d’annoncer une réduction de prix et en affichant ainsi de fausses réductions de prix » (point 25)

A ce titre, la Cour indique que l’objectif poursuivi par l’article 6 bis ne serait pas atteint s’il suffisait, dans une annonce de réduction de prix, de mentionner le « prix antérieur » à titre de simple information, sans que la réduction soit déterminée sur la base de ce prix.

Ainsi, la Cour de justice considère qu’une réduction de prix d’un produit annoncée par un professionnel sous la forme, soit d’un pourcentage, soit d’une mention publicitaire visant à mettre en avant le caractère avantageux du prix annoncé, doit être déterminée sur la base du “ prix antérieur ”, au sens du paragraphe 2 de l'article 6 bis de la directive 98/6.

Si cette décision paraît inédite, elle est pour autant conforme :

  • A la position de la Commission européenne, dans ses orientations publiées en 2021, considérant que « toute réduction indiquée en pourcentage doit être fondée sur le prix « antérieur » »
  • A la position du MEDEF qui, dans sa FAQ sur les annonces de réduction de prix publiée en 2022, indiquait que le professionnel « doit se référer au prix le plus bas qu’il a pratiqué au cours des 30 jours précédant la réduction ».

Ainsi, les professionnels appliquant déjà ces règles ne seront en théorie pas impactés par cette décision, sauf à être vigilants lorsqu’ils utilisent des formules et allégations marketing.  

Les implications sur la sanction du non-respect des règles relatives aux annonces de réduction de prix

En droit français, le non-respect des règles relatives aux annonces de réduction de prix peut être sanctionné, pénalement, sur le fondement des pratiques commerciales trompeuses. En effet, cette pratique est mentionnée au 2° c) de l’article L.121-2 du Code de la consommation, énonçant les catégories de pratiques commerciales trompeuses.

Pour autant, elle ne figure pas au sein de la liste des « Pratiques commerciales réputées trompeuses en toutes circonstances », établie par la directive 2005/29/CE du 11 mai 2025 relative aux pratiques commerciales déloyales, et transposée en droit français au sein de l’article L.121-4 du Code de la consommation.

Il résulte de ces éléments que la démonstration du caractère trompeur est a priori requise.

Cependant, la Cour de justice de l’Union européenne indique que l’article 6 bis de la directive « régit spécifiquement les aspects liés à l’indication, dans une annonce de réduction de prix, du prix antérieur et à la définition de celui-ci », si bien que la pratique commerciale doit être appréciée au regard de cet article, et non au regard de la directive sur les pratiques commerciales.

Ainsi, une annonce de réduction de prix non conforme à la réglementation pourrait en réalité être sanctionnée indépendamment de son caractère trompeur.

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