Principe de libre révocabilité du mandat
La révocation est encadrée par les articles 2004 à 2006 du Code civil. L'article 2004 du Code civil dispose que “le mandant peut révoquer sa procuration quand bon lui semble et contraindre, s'il y a lieu, le mandataire à lui remettre soit l'écrit sous seing privé qui la contient, soit l'original de la procuration, si elle a été délivrée en brevet, soit l'expédition, s'il en a été gardé minute”. Postulant que le contrat de mandat, conçu comme un service d'ami, repose sur la confiance et qu'il est conclu dans le seul intérêt du mandant, ce texte pose le principe de la libre révocabilité du mandat par le mandant. Lorsque la confiance a disparu, le mandant se trouve autorisé à révoquer son mandataire, “quand bon lui semble”, sans avoir à se justifier, exerçant ainsi son droit de révocation “ad nutum”. Selon la Cour de cassation, la révocation ad nutum s'entend d'une décision de résiliation prise sans que des motifs aient à être précisés. La révocation du mandat peut certes être justifiée par les manquements du mandataire à ses obligations. Mais lorsque la raison même du maintien du mandat a cessé d'exister, la révocation est fondée, même en l'absence de faute du mandataire.
Abus de droit dans la révocation du mandat
En cas de mandat révocable ad nutum, la responsabilité du mandant peut être engagée s'il y a eu abus de son droit de révocation. Dans cette hypothèse, il appartient au mandataire de prouver que son mandant a abusé du droit de révocation et lui a causé un préjudice dont il lui doit réparation. La révocation d’un mandataire qui résulte du seul comportement versatile du mandant, revêt un caractère abusif. Selon la Cour de cassation, les conditions de la révocation du mandat doivent être appréciées à la date où celle-ci est intervenue, les juges du fond n'ayant pas à prendre en considération des éléments postérieurs à cette date.
Indemnités en cas de révocation : exceptions et clauses
La révocation à la discrétion du mandant s'opère, en principe, sans indemnités. Cependant cette règle souffre d’exceptions. Outre l'abus dans le droit de révocation, qui permet au mandataire de prétendre à une indemnisation, et hors le cas particulier du mandat d'intérêt commun, qui n'est pas librement révocable et ne peut être révoqué sans indemnité que par le consentement mutuel des parties ou pour une cause légitime reconnue en justice, les parties peuvent avoir stipulé une clause d'irrévocabilité, qui contrairement à sa dénomination, n'exclut pas le principe de la révocation, mais le fait que celle-ci s'opère sans indemnité. Selon la jurisprudence, les dispositions de l'article 2004 du Code civil étant supplétives, la stipulation d'une indemnité en cas de révocation du mandat ne représente que le prix de la faculté de résiliation unilatérale, en dehors de toute notion d'inexécution, de sorte qu'elle ne revêt pas le caractère d'une clause pénale. Pour être valide, une clause d'irrévocabilité doit être expresse et ne saurait résulter de la seule stipulation d'une exclusivité ou de la nature spéciale du mandat. Les juges excluent toutefois l'application d'une telle clause, et partant l'indemnité contractuellement prévue, lorsque la révocation du mandat est rendue nécessaire par un manquement imputable au mandataire, sans pour autant revêtir le caractère d'une faute grave.
Opposabilité de la révocation aux tiers et au mandataire
L'article 2005 précise que “la révocation notifiée au seul mandataire ne peut être opposée aux tiers qui ont traité dans l'ignorance de cette révocation, sauf au mandant son recours contre le mandataire”. Il appartient au mandant d'établir que le tiers qui a traité avec son mandataire était informé de la révocation du mandat. Par ailleurs, la révocation du mandat n'est opposable au mandataire qu'au jour où celui-ci a eu connaissance de la volonté du mandant, et non au jour où cette volonté s'est exprimée. Partant, le mandant doit assumer toutes les obligations résultant des actes conclus par le mandataire, en son nom, avant la prise d'effet de la révocation du mandat. Lorsqu'il apporte des restrictions aux pouvoirs précédemment accordés à son mandataire, le mandant procède à une révocation partielle du mandat, qui, selon l'article 2004 du Code civil, peut intervenir à son gré, de sorte que ces restrictions s'imposent au mandataire, dès qu'elles ont été formulées, sans avoir à être acceptées par ce dernier, même si celui-ci dispose de la possibilité de renoncer au mandat ainsi modifié. En outre, le mandat donné d’un commun accord par plusieurs indivisaires, ne peut être révoqué par l’un d’eux sans l’accord des autres, sauf convention contraire.