Une enquête de phase 1 menée par la CMA
La Competition and Market Authority (CMA), l’autorité de la concurrence britannique, a annoncé, le jeudi 8 août 2024, qu’elle allait procéder à une enquête concernant la fusion réalisée entre le géant Amazon et Anthropic. L’investissement réalisé par Amazon dans cette start-up s’élève à 4 milliards de dollars.
Il s’agit d’une enquête de « phase 1 », intervenant après que les parties prenantes ont présenté leurs observations à l’autorité le 24 avril dernier. Les résultats de cette enquête pourront ensuite donner lieu à une enquête plus approfondie, dite de « phase 2 ».
Une enquête qui intervient après la fusion d’Amazon et Anthropic
Cette enquête intervient après la réalisation de la fusion entre Amazon et Anthropic, ce qui singularise le contrôle des concentrations de droit anglais par rapport au contrôle des concentrations de droit français. Au Royaume-Uni, le contrôle des concentrations peut, comme en France, intervenir a priori, c’est-à-dire avant la réalisation de l’opération, mais seulement sur notification volontaire des parties.
La CMA peut néanmoins pratiquer un contrôle ex post, dans les quatre mois de la réalisation de l’opération. Un contrôle des concentrations peut intervenir dans deux hypothèses :
- l’acquisition porte sur des actifs d’une valeur au moins de 70 millions de livres,
- la nouvelle entité détient une part de marché supérieure à 25% sur le marché britannique.
L’autorité anglaise vigilante à l’égard des killer acquisitions
Cette enquête intervient dans un mouvement plus large de contrôle par la CMA des rapprochements réalisés entre les GAFAM et les start-ups spécialisées dans l’intelligence artificielle.
En effet, l’autorité de contrôle britannique cherche à surveiller de près les « killer acquisitions », intervenant dans les secteurs innovants, comme le secteur du numérique, et risquant d’entraîner une trop forte concentration du marché.
Elle a notamment mené une enquête à l’encontre du partenariat conclu entre Microsoft et Mistral AI, une société française elle aussi spécialisée dans l’intelligence artificielle. Elle avait décidé de ne pas l’approfondir, comme Microsoft n’avait pas acquis une influence telle que l’opération pouvait s’apparenter à une fusion.
La CMA a néanmoins ouvert une deuxième procédure à l’encontre de Microsoft dans le cadre, cette fois-ci, de son rapprochement avec Inflection AI, à la suite de l’embauche d’anciens employés de cette start-up.
Inscrivez-vous à la newsletter Livv
et recevez chaque semaine des informations exclusives en droit des affaires. En savoir plus
Un droit de la concurrence anglais proactif dans le secteur du numérique
De manière générale, le droit de la concurrence britannique cherche à préserver le fonctionnement concurrentiel de son marché, en particulier sur le marché de l'économie numérique. Il est même considéré comme l’un des corpus de règles les plus stricts à l’égard des géants de la tech.
Il tend en effet à préserver une « concurrence dynamique », se traduisant par la coexistence sur le marché d’entreprises déjà existantes et de nouveaux venus, réalisant des efforts d’innovation importants. Il estime que la réalisation d'opérations entre ces deux types d’acteurs pourrait conduire à réduire cette concurrence.
En avril 2022, le Royaume-Uni indiquait vouloir renforcer le contrôle des « killer acquisitions » en consacrant de nouveaux seuils de contrôle des concentrations. Deux conditions cumulatives (et non plus alternatives) seraient requises pour procéder à ce contrôle :
- Le chiffre d'affaires pris en compte serait, non plus celui de la cible, mais celui de l’acquéreur, et s’élèverait à 350 millions de livres, réalisé au Royaume-Uni.
- L’entité résultante de l’opération devrait détenir une part de marché supérieure à 33% au Royaume-Uni.
Ces nouveaux seuils permettraient de ne contrôler que les opérations impliquant un géant du Web et une start-up spécialisée dans le secteur des nouvelles technologies.