Le 28 juin 2024, elle a publié un avis sur l’impact de l’IA générative sur les marchés. L’Autorité établit dans un premier temps le périmètre de son avis et indique que ce dernier :
“vise à fournir aux acteurs du secteur une analyse concurrentielle du fonctionnement de ce marché en plein développement”
Elle souligne les risques associés à la domination des géants du numérique dans ce secteur en pleine expansion et son avis se divise en trois axes :
- Le secteur de l’IA générative ;
- Le fonctionnement concurrentiel du secteur ;
- Ses recommandations.
Le secteur de l’IA générative
La définition de l’IA, selon le Parlement européen, correspond à tout outil utilisé par une machine « afin de reproduire des comportements liés aux humains, tels que le raisonnement, la planification et la créativité”.
L’IA générative est, quant à elle, capable de créer de nouveaux contenus tels que des images, des sons, des textes ou encore des vidéos.
Une attention particulière portée à l’IA générative
L’IA est devenue une priorité croissante des pouvoirs publics au regard des initiatives lancées à son sujet tant au niveau national qu’européen (par exemple : une stratégie française pour l’IA avec « France 2030 », un règlement européen « AI Act », le DMA et le DSA qui impactent déjà le secteur, la déclaration commune de Bletchley au Royaume-Uni).
Dans son avis, l’Autorité décrit le fonctionnement du secteur ainsi que les différents acteurs impliqués.
Le fonctionnement du secteur de l’IA générative
Il existe deux phases différentes dans la modélisation de l’IA générative.
- L’entraînement
Il fait référence au processus d’apprentissage initial du modèle (aussi appelé “modèle de fondation” incluant les grands modèles de langage ou LLM pour Large Language Model en anglais).
Cette phase nécessite une puissance de calcul très importante ainsi qu’un volume de données considérable. Elle peut, dans certains cas, être complétée par une phase de spécialisation qui fera appel à un volume de données généralement plus restreint, voire à de l’expertise humaine.
- L’inférence
Il correspond à l’utilisation du modèle entraîné pour créer du contenu et peut être mis à disposition des utilisateurs à l’aide d’applications. C’est notamment le cas pour ChatGPT ou encore Le Chat de Mistral AI.
Les acteurs du marché de l'IA générative
L’Autorité dresse ensuite un portrait des acteurs du secteur de l’IA générative en répertoriant d’un côté les grands acteurs du numériques (Alphabet, Microsoft, Meta etc.) et de l’autre les développeurs de modèles (des startups ou laboratoires de recherches qui ont souvent conclu des partenariats avec les premiers cités).
Elle indique également que plusieurs acteurs sont présents à l’amont tels que les fournisseurs de composants informatiques et les fournisseurs de services d’informatique en nuage plus communément appelé “cloud”. Pour conclure sur les acteurs du secteur, il est mentionné qu’à l’aval de nombreux acteurs commercialisent des services fondées sur l’IA.
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Le fonctionnement concurrentiel du secteur de l’IA générative
L’Autorité soulève plusieurs préoccupations concernant le fonctionnement concurrentiel du secteur.
En effet, malgré les bénéfices apportés par l’IA générative - et notamment depuis le lancement de ChatGPT en 2022 - l'Autorité exprime des préoccupations quant aux barrières à l’entrée élevées, aux effets de réseau puissants et à l’accès privilégié aux données massives qui pourraient conférer un avantage démesuré aux grandes entreprises du numérique.
Cette situation pourrait limiter l’innovation et restreindre l’accès au marché pour les nouveaux entrants ainsi que les acteurs de taille moyenne n’ayant pas accès aux intrants nécessaires pour développer de l’IA générative.
Elle identifie, par exemple, des risques de collusion entre les entreprises du secteur par l’utilisation parallèle d’algorithmes individuels distincts ou le recours à des algorithmes d’apprentissage automatique.
Elle mentionne également à plusieurs reprises les risques liés à l’accès à une main-d'œuvre qualifiée attirée par les salaires attractifs appliqués dans le secteur. Outre les accords de fixation de salaires entre entreprises, des accords de non débauchage ou le recrutement d’équipes entières peuvent s’analyser comme des pratiques anticoncurrentielles.
Autre exemple donné : les partenariats conclus entre acteurs du secteur qui, s’ils peuvent permettre aux start-ups d’obtenir des moyens favorisant l’innovation, présentent également des risques importants. Ils peuvent affaiblir l’intensité concurrentielle entre les partenaires et entraîner des effets verticaux ainsi qu’un renforcement de la transparence sur le marché ou un verrouillage de certains acteurs.
Des recommandations ne nécessitant pas d’initiative législative
Plus largement, l’Autorité formule plusieurs séries de recommandations visant à favoriser la dynamique concurrentielle du secteur. Cette série de recommandations se compose de 10 propositions.
L’autorité invite notamment à :
- rendre plus efficace le cadre réglementaire applicable au secteur ;
- en cas d’atteinte à la concurrence, mobiliser les outils rapides et efficaces du droit de la concurrence et du droit des pratiques restrictives de concurrence ;
- encourager l’innovation en assurant un meilleur accès à la puissance de calcul ;
- assurer un équilibre entre juste rémunération des ayants-droits et accès des développeurs de modèles aux données nécessaires pour innover et
- renforcer la transparence sur les prises de participation des géants du numérique.
L’Autorité insiste ainsi sur la nécessité de fixer un cadre réglementaire européen harmonisé, capable de répondre aux enjeux spécifiques de l’IA générative. Elle encourage la coopération entre les autorités nationales et les institutions européennes et prône le renforcement des moyens d'investigation et de sanction pour dissuader les comportements abusifs.
Pour plus d'informations, vous pouvez retrouver l’avis complet de l’Autorité en cliquant sur ce lien.