Epuisement du droit de marque

 

Droit français de la distribution

Le droit de propriété sur la marque conféré à son titulaire par l'article L. 713-1 du Code de la propriété intellectuelle est limité par les dispositions de l'article L. 713-4 relatives à l'épuisement des droits. Selon cette théorie, initialement consacrée par la Cour de justice pour assurer la libre circulation des marchandises au sein de l'Union, le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d'interdire l'usage de celle-ci pour des produits qui ont été commercialisés sous cette marque dans l'Espace économique européen (EEE) avec le consentement du titulaire, directement ou par un intermédiaire.

Du fait de l'épuisement des droits du titulaire de la marque, la commercialisation par un revendeur non agréé de produits, même acquis irrégulièrement, n'est pas à elle seule susceptible de constituer un usage illicite de marque. Le promoteur du réseau qui a mis en circulation les produits revêtus de la marque au sein de l'EEE doit, pour écarter l'épuisement des droits, justifier de motifs légitimes. Tel est le cas lorsqu'il est fait un usage anormal de la marque, que les produits appréhendés sont contrefaits et non authentiques, revendus aux consommateurs dans des conditions affectant négativement la valeur de la marque et ternissant l'allure et l'image de prestige des produits de luxe en cause ou encore mis en circulation en violation de l'article L. 442-2 (ancien art. L. 442-6, I, 6°) du Code de commerce, qui sanctionne le fait de participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles de concurrence. L'épuisement des droits ne se limite pas aux opérations de commercialisation, mais concerne l'ensemble des mises sur le marché. Le titulaire d'une marque ne peut ainsi en interdire l'usage au détenteur légitime de produits authentiques revêtus de cette marque, déjà commercialisés sur le territoire de l'Union européenne et régulièrement acquis afin d'annoncer au public et d'assurer la diffusion de ces produits dans le cadre d'une loterie. Toutefois, il appartient au tiers non agréé qui commercialise des produits faisant l'objet d'un réseau de distribution sélective de prouver qu'ils ont été mis en circulation dans l'Espace économique européen avec le consentement du titulaire de la marque à moins, comme en matière de distribution exclusive, que cette preuve soit susceptible de permettre au titulaire de la marque d'identifier les fuites dans son réseau et de cloisonner les marchés. Il en va ainsi, notamment, lorsque le tiers revendeur établit l'existence d'une interdiction de ventes passives au sein du réseau. En revanche, le tiers ne peut pas justifier la commercialisation en France de produits non destinés au marché européen par un approvisionnement en Europe, dès lors que cette circonstance ne suffit pas à établir le consentement du fabricant.

Lorsque le fabricant démontre l'absence de risque de cloisonnement notamment en prouvant la réalité de ventes passives, la charge de la preuve revient au tiers revendeur. Des factures portant sur des ventes ponctuelles et des sommes négligeables sur une période de cinq ans, sur des produits de la marque qui ne sont pas ceux en cause, ou sur des ventes à des canaux de commercialisation différents, ne démontrent pas l'absence de risque de cloisonnement du marché. En revanche, des emails datés de plus de cinq ans ou des faits qui remontent au début des années 1990 peuvent être invoqués pour établir un risque de cloisonnement du marché lorsque l'animateur d'un réseau de distribution exclusive n'établit pas avoir changé de pratique depuis lors.

Enfin, lorsqu'un produit faisant l'objet d'un réseau de distribution sélective a été régulièrement commercialisé par son fabricant dans un pays étranger avant d'être réimporté, sans autorisation, dans un État membre de l'Union, le fabricant dispose d'un droit de suite et de contrôle jusqu'à l'acquéreur final.

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