Cette action fait suite à une intensification des activités concurrentielles entre les deux géants du numérique, tout particulièrement dans le domaine des services cloud où Microsoft domine avec sa plateforme Azure.
Le cloud comme terrain de bataille entre les deux géants
Le cloud computing, domaine au cœur des divergences entre Microsoft et Google, correspond à la fourniture de services informatiques (notamment les serveurs, le stockage, les bases de données, la gestion réseau, les logiciels, les outils d’analyse et la veille) via Internet (le cloud) dans le but d’accélérer l’innovation, d’offrir des ressources flexibles et de profiter d’économies d’échelle. Il diffère de l’approche traditionnelle que les entreprises adoptent en matière de ressources informatiques.
Les entreprises et les particuliers paient pour accéder à un pool virtuel de ressources partagées, y compris des services de calcul, de stockage et de mise en réseau, qui sont situés sur des serveurs distants détenus et gérés par des fournisseurs de services.
Les pratiques reprochées à Microsoft
Google reproche à Microsoft de verrouiller le marché en abusant de sa position dominante sur le marché du cloud. L’une des principales accusations porte sur les contrats de Microsoft avec ses clients. Ceux-ci incluraient des conditions défavorisant le recours à d'autres prestataires de services cloud, tels que Google Cloud.
Autrement dit, Google affirme que Microsoft incite les entreprises utilisant Windows Server (qui représente plus de 70% des systèmes d'exploitation pour serveurs) à choisir sa plateforme cloud Azure, au détriment de celles de ses concurrents, par des pratiques anticoncurrentielles.
Microsoft imposerait une surcharge de 400 % aux clients utilisant des clouds concurrents pour continuer à utiliser Windows Server, tout en exemptant les utilisateurs d'Azure, et ralentirait également l'application des correctifs de sécurité.
Microsoft, en exploitant sa position dominante et sa large base d'utilisateurs, est accusé de limiter artificiellement la concurrence, empêchant les autres acteurs de croître sur un marché de plus en plus stratégique pour l’économie numérique mondiale.
Amit Zavery, directeur général et vice-président de la plateforme Google Cloud, a notamment déclaré que Google pensait :
"que cette action auprès du régulateur est la seule façon de mettre un terme au verrouillage pratiqué par Microsoft, de permettre aux clients d'avoir un choix et de créer des conditions de marché équitables pour les concurrents."
Inscrivez-vous à la newsletter Livv
et recevez chaque semaine des informations exclusives en droit des affaires. En savoir plus
Multiplication des plaintes similaires contre Microsoft
Il ne s'agit pas de la première plainte déposée contre Microsoft concernant le marché du cloud. Google ne s’était toutefois pas associé à d’autres acteurs, tels qu'OVH et le CISPE (une organisation regroupant des fournisseurs européens, dont Amazon), dans une plainte similaire adressée à Bruxelles en 2023.
Cette dernière a été retirée en juillet après que Microsoft a conclu un accord à l'amiable avec ces concurrents, évitant ainsi une enquête formelle de l'Union européenne.
De son côté, l'Association espagnole des start-up (AES), qui représente 700 jeunes entreprises, a déposé une plainte contre Microsoft auprès de l'Autorité espagnole de la concurrence en mai dernier et a exprimé son soutien à l’initiative de Google.
Du côté de Microsoft, on ne semble pas trop craindre les issues de cette plainte. En effet, un porte-parole de la firme a réagi en affirmant que :
"Microsoft a trouvé un accord pour répondre à des préoccupations similaires soulevées par des fournisseurs de cloud européens, alors que Google espérait que ces derniers poursuivent le contentieux. N'ayant pas réussi à convaincre les entreprises européennes, nous pensons que Google ne réussira pas non plus à convaincre la Commission européenne"
Les suites éventuelles de l'affaire
Cette plainte intervient dans un contexte où l’Union européenne examine de plus près les pratiques des grandes entreprises du numérique.
Le dossier revêt une importance particulière, car les enjeux du cloud computing dépassent le simple cadre des entreprises technologiques, impactant également d'autres industries fortement dépendantes des services numériques pour leur fonctionnement quotidien.
Pour Google, l’objectif de cette démarche est de rétablir une concurrence équitable sur le marché du cloud. Le géant américain espère que la Commission européenne agira pour mettre fin à ce qu'il perçoit comme des pratiques anticoncurrentielles, tout en incitant Microsoft à revoir ses stratégies commerciales.
De son côté, Microsoft a rejeté ces allégations, affirmant que ses pratiques respectent les règles de la concurrence en vigueur en Europe et à l’international. La Commission européenne a pris acte de la plainte et va désormais procéder à son évaluation.