Consommation
Aux termes de l'article 1643 du Code civil, le vendeur “est tenu des vices cachés, quand bien même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie”. Le Code civil reconnaît ainsi au dispositif légal un caractère supplétif et valide les clauses de non-garantie des vices cachés, dont il réserve, cependant, l'opposabilité au cas où le vendeur ne connaissait pas l'existence du vice. Le champ d'application des clauses de non-garantie est toutefois extrêmement limité. En effet, la jurisprudence fait peser sur les vendeurs professionnels une présomption de connaissance des vices cachés qui leur interdit de se prévaloir d'une telle clause, sauf, sous certaines conditions, à l'égard d'un professionnel de même spécialité. En outre, l'article R. 212-1 du Code de la Consommation répute abusives de manière irréfragable les clauses par lesquelles un professionnel supprime ou réduit le droit à réparation du préjudice subi par un non-professionnel ou un consommateur en cas de manquement à l'une quelconque de ses obligations. Aussi, les clauses de non-garantie concernent-elles principalement les ventes entre non-professionnels, à condition que le vendeur ne soit pas de mauvaise foi et que l'acheteur les ait expressément acceptées. De manière résiduelle, elles peuvent s'appliquer aux ventes entre professionnels de même spécialité, dès lors que le vice n'est pas indécelable et que le vendeur ne s'est pas rendu coupable de dol.
La qualification de “clause de non-garantie” ou de “clause limitative de garantie” n'est pas toujours aisée. Constitue une clause de non-garantie celle qui exclut de manière non équivoque la garantie des vices cachés. Tel n'est pas le cas, notamment, de celle par laquelle l'acheteur déclare accepter la chose dans l'état dans lequel elle se trouve. En revanche, la clause qui prévoit que toute action fondée sur un vice de la chose est prescrite six mois après la livraison, valable entre professionnels de même spécialité, s'oppose aux demandes formées par le vendeur intermédiaire contre le vendeur originaire, passé ce délai, sur le fondement de la garantie des vices cachés. Il en va de même de la clause qui limite à deux ans la garantie des défauts de toute nature susceptibles d'affecter le fonctionnement de la chose vendue, qu'ils proviennent de la conception, d'un montage défectueux ou d'une mauvaise qualité des pièces, dès lors qu'elle englobe nécessairement les vices cachés au sens de l'article 1641 du Code civil.
Bien que le texte de l'article 1643 du Code civil, en précisant que le vendeur qui ne connaissait pas les vices peut limiter son obligation à garantie, réserve l'hypothèse de la bonne foi du vendeur, la jurisprudence fait peser sur ce dernier, lorsqu'il s'agit d'un professionnel, une présomption irréfragable de connaissance des vices. Celle-ci lui interdit d'opposer une clause qui limite ou écarte son obligation de garantir les vices cachés à l'égard de l'acheteur profane ou de spécialité différente s'il s'agit d'un professionnel. En revanche, une telle clause est opposable à l'acheteur professionnel de même spécialité que le vendeur. Le caractère irréfragable de la présomption a pour conséquence que la preuve, par le vendeur professionnel, de sa bonne foi au moment de la vente est sans incidence sur la mise en œuvre de la clause limitative. La question de la conformité de cette solution au droit de l'Union a été soulevée devant la Cour de justice. Celle-ci a déclaré la présomption conforme au droit de l'Union dès lors que son caractère irréfragable est pleinement justifié par la protection de l'acheteur.
Le vendeur professionnel peut toutefois contourner la rigueur de la solution jurisprudentielle. D'une part, il peut essayer de démontrer qu'il n'est pas, en réalité, un vendeur professionnel. Ainsi, la Cour de cassation a pu admettre qu'un entrepreneur de démolition qui vend un camion est en droit d'opposer à son acheteur une clause d'exclusion de garantie dès lors qu'il n'a pas la qualité de professionnel de la vente de véhicules. D'autre part, si sa qualité de vendeur professionnel ne peut être utilement remise en cause, le vendeur peut s'efforcer d'établir qu'il n'est pas un spécialiste du secteur. Tel est le cas, en matière immobilière, de la société dépourvue de connaissance technique particulière en matière de vente immobilière qui cède un élément du patrimoine immobilier de sa société mère ou de la compagnie d'assurances qui cède son patrimoine immobilier.
La présomption irréfragable de connaissance des vices, qui empêche le vendeur d'opposer à son acheteur une clause limitative ou exclusive de garantie des vices cachés lorsqu'il est face à un profane ou un professionnel de spécialité différente, ne pèse pas sur le vendeur occasionnel. Encore faut-il que ce dernier ne se comporte pas comme un professionnel. Pour faire échec à l'application de la clause, l'acheteur doit démontrer la faute lourde ou les manœuvres dolosives du vendeur ou, de façon plus classique, sa mauvaise foi au moment de la vente.
Par ailleurs, le vendeur ne peut opposer à son acheteur une clause limitative ou exclusive de la garantie des vices cachés s'il ne démontre pas qu'elle a été acceptée par ce dernier. Selon la Cour de cassation, une clause du contrat de vente par laquelle l'acquéreur néophyte déclare prendre la chose dans l'état où elle se trouve ne l'engage pas au-delà de ce qu'un simple examen visuel permet de révéler. En outre, la clause doit figurer de manière apparente dans les documents fournis à l'acheteur, à plus forte raison lorsque les parties n'entretenaient pas de relations suivies. Des conditions générales de vente qui excluent la garantie des vices cachés ne peuvent être opposées à l'acquéreur lorsque le vendeur est dans l'impossibilité de justifier d'un document contractuel ou de tout autre document démontrant que ce dernier en aurait eu connaissance et aurait accepté en pleine connaissance de cause ces exclusions. En revanche, la clause qui figure sur les factures et bons de livraison du vendeur au recto, en gras et en majuscules, est opposable à l'acheteur qui y a apposé son cachet à réception des marchandises. Il en va de même de celle qui est imprimée au dos de l'accusé de réception de la commande, lorsqu'elle est également reproduite dans les conditions générales de vente du vendeur.
Le sous-acquéreur, titulaire d'une action directe de nature contractuelle contre le vendeur originaire de la chose, peut se voir opposer, par ce dernier, tous les moyens de défense qu'il aurait pu opposer à son propre acquéreur, comme l'existence d'une clause limitative de garantie. A l'inverse, une clause que le vendeur originaire ne peut invoquer à l'encontre du vendeur intermédiaire, en raison de sa qualité de professionnel de spécialité différente, ne peut être opposée au sous-acquéreur. En revanche, la clause de non-garantie contenue dans le contrat qui lie le vendeur intermédiaire à son propre acquéreur ne peut pas faire obstacle à l'action directe de ce dernier contre le vendeur initial lorsqu'aucune clause de non-garantie n'a été stipulée lors de la première vente.