Obligation de livraison et réception dans les contrats d’entreprise
Le maître d'ouvrage est tenu de prendre livraison de la chose et de “réceptionner” le travail de l'entrepreneur. L'obligation de prendre de livraison, qui n'a lieu d'être que lorsque le contrat d'entreprise porte sur une chose corporelle, consiste pour le maître d'ouvrage dans l'acte matériel de venir la retirer chez l'entrepreneur, sauf stipulations contraires mettant la livraison à la charge de ce dernier. Le manquement à cette obligation de retirement est sanctionné par la loi. Lorsque le contrat d'entreprise porte sur un meuble destiné à être façonné, réparé ou nettoyé, une loi du 31 décembre 1903 relative à la vente de certains objets abandonnés permet à l'entrepreneur de saisir la justice pour faire vendre aux enchères les objets non retirés passé un certain délai, et se faire ainsi payer, sur le produit de la vente, sa prestation et les éventuels frais de conservation de la chose. Le propriétaire peut s'opposer à la vente par exploit signifié au professionnel, sachant que cette opposition emporte de plein droit citation à comparaître à la première audience de la juridiction qui a autorisé la vente.
La réception : acte d’acquiescement au travail exécuté
La réception consiste pour le maître d'ouvrage à acquiescer au travail exécuté par l'entrepreneur. Si, lorsque le contrat d'entreprise porte sur un objet mobilier corporel, la livraison se confond en pratique avec la réception, la jurisprudence distingue entre les deux lorsque le contrat porte sur un immeuble. Selon la Haute juridiction, la réception ne consiste pas seulement dans la livraison de l'ouvrage, mais aussi dans l'approbation du travail réalisé par le maître d'ouvrage. La réception, qui est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage, avec ou sans réserves, a pour objet de consacrer l'accord des parties sur sa conformité aux termes du contrat tandis que la livraison, qui est le fait pour le constructeur de mettre son cocontractant en possession de l'immeuble, se caractérise par la remise effective des clés et suppose que les travaux pouvant rester à achever ou à reprendre ne lui interdisent pas d'y habiter dans des conditions normales. La réception peut être intégrale ou partielle. La réception définitive de l'ouvrage ne peut intervenir qu'après l'achèvement des travaux par la suppression des malfaçons.
Les conséquences juridiques de la réception
La réception emporte différentes conséquences. D'abord, c'est à compter de la réception définitive des travaux que le maître d'ouvrage est tenu de régler le prix ou le solde du prix des travaux réalisés par l'entrepreneur. En l'absence de réception, il ne saurait y avoir transfert de la garde de l'ouvrage et des risques. En effet, à défaut de réception de l'ouvrage, la charge des risques doit être supportée par l'entrepreneur, même si la destruction de la chose constitue pour lui un cas de force majeure imprévisible et irrésistible. En outre, la réception sans réserves couvre les défauts de conformité apparents. Par ailleurs, la réception de l'ouvrage - avec ou sans réserves - met fin au contrat d'entreprise et marque le point de départ des garanties dues par l’entrepreneur en faisant courir les délais des actions en responsabilité contre lui.
La réception et ses différentes formes : expresse, tacite, judiciaire
La réception peut prendre différentes formes : elle peut être expresse, tacite ou judiciaire. La réception tacite a donné lieu à un contentieux abondant. Selon la Haute juridiction, la prise de possession ne vaut réception tacite que si, intervenant après l'achèvement des travaux, elle révèle l'approbation du maître d'ouvrage. Cette prise de possession doit être caractérisée par une volonté non équivoque du client d'accepter les travaux. La réception tacite est présumée, lorsque la prise de possession se cumule avec le paiement intégral des travaux facturés par l'entrepreneur. En l'absence de réception amiable, la réception judiciaire peut être ordonnée si les travaux sont en état d'être reçus, c'est-à-dire s'il satisfait à sa destination, ce qui n'exclut pas l'existence de réserves.