Selon la pratique décisionnelle de l'Autorité de la concurrence, “est susceptible de constituer un abus le fait, pour une entreprise disposant d'un monopole légal, c'est-à-dire un monopole dont l'acquisition n'a supposé aucune dépense et est insusceptible d'être contesté, d'utiliser tout ou partie de l'excédent des ressources que lui procure son activité sous monopole pour subventionner une offre présentée sur un marché concurrentiel, lorsque la subvention est utilisée pour pratiquer des prix prédateurs ou lorsqu'elle a conditionné une pratique commerciale qui, sans être prédatrice, a entraîné une perturbation durable du marché qui n'aurait pas eu lieu sans elle”. Selon elle, une subvention croisée peut, à elle seule, par sa durée, sa pérennité et son importance, avoir un effet potentiel sur le marché.
L'Autorité estime que tous les transferts de ressources d'une activité vers une autre ne sont pas nécessairement illicites. Pour être en présence d'une subvention croisée illicite, il faut que l'activité en monopole dégage des ressources et que la subvention permette d'offrir un bien ou un service sur le marché concurrentiel à un prix qui ne couvre pas les coûts incrémentaux liés à cette activité, c'est-à-dire les coûts qui n'auraient pas été engagés si ce service n'avait pas été offert. Plus le pouvoir de marché de l'entreprise publique sur le marché directement concerné par la pratique est important, plus un prix inférieur au coût incrémental moyen risque d'éliminer ou de dissuader l'entrée de concurrents efficaces.