Les principes généraux de l’action civile en contrefaçon de marque
L’action civile en contrefaçon obéit à la fois aux règles de droit commun de la procédure civile et aux règles spéciales relatives au droit de la propriété intellectuelle. Le demandeur à l’action en contrefaçon doit présenter, conformément à l’article 31 du Code de procédure civile, un intérêt à agir. En plus de l’intérêt à agir, le demandeur doit posséder des droits sur la marque dans les conditions fixées par l’article L. 716-4-2 du Code de la propriété intellectuelle. Si l’ancien titulaire d’une marque qui ne l’a pas renouvelée demeure recevable à agir pour les faits antérieurs à son non-renouvellement, le déposant ne peut pas agir en contrefaçon tant que son signe n’est pas enregistré, les faits antérieurs à la publication de la marque n’étant pas considérés comme ayant porté atteinte aux droits attachés à la marque (art. L. 716-4-1 CPI). Toutefois, lorsqu’une copie de la demande d’enregistrement est notifiée au prétendu contrefacteur, les faits postérieurs à celle-ci pourront être constatés et poursuivis, le tribunal saisi sursoyant à statuer jusqu’à la publication de l’enregistrement (art. L. 716-4-1, al. 2, CPI).
Le rôle du licencié dans l’action en contrefaçon de marque
L’action civile en contrefaçon peut également être engagée par le licencié de la marque, avec le consentement du titulaire, sauf disposition contraire dans le contrat de licence. Le bénéficiaire d’un droit exclusif peut agir en contrefaçon sans le consentement du titulaire de la marque si, après mise en demeure, celui-ci n’exerce pas ce droit dans un délai raisonnable (art. L. 716-4-2, al. 1, CPI). Lorsqu’une partie à un contrat de licence engage une instance en contrefaçon, toute partie au contrat de licence est recevable à intervenir dans l'instance afin d'obtenir la réparation du préjudice qui lui est propre (art. L. 716-4-2, al. 4, CPI).
Le délai de prescription de l’action en contrefaçon
L'action en contrefaçon se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l'exercer (art. L. 716-4-2, al. 6, CPI). Lorsque l’action en contrefaçon est fondée sur le dépôt d’une marque seconde, la prescription ne commence à courir qu’à compter du jour où le signe litigieux cesse d’être inscrit au registre national des marques.
La condition d’usage sérieux pour agir en contrefaçon
L’action en contrefaçon est irrecevable si le titulaire de la marque première ne peut prouver qu’elle a fait l’objet, pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et qui sont invoqués à l’appui de la demande, d’un usage sérieux au cours des cinq années précédant la date à laquelle la demande en contrefaçon a été formée (art. L. 716-4-3, 1° CPI), ou, à défaut, qu’il existait de justes motifs pour son non-usage (art. L. 716-4-3, 2° CPI). La notion d’usage sérieux correspond à celle de l’article L. 714-5 du Code de la propriété intellectuelle relatif à la déchéance des droits du titulaire sur sa marque (art. L. 716-4-3, 1° CPI).
La forclusion par tolérance : une fin de non-recevoir pour le demandeur
La forclusion par tolérance permet au défendeur à une action en contrefaçon d’en soulever l’irrecevabilité lorsque le titulaire de la marque première a toléré l’usage de la marque prétendue contrefaisante, en connaissance de cet usage, pendant cinq années consécutives (art. L. 716-4-5, 1° CPI). La forclusion par tolérance ne concerne que les seules marques enregistrées sur le territoire national sur lequel l’action est engagée, et les seuls produits et services pour lesquels l’usage a été toléré. Elle ne peut pas être invoquée si le dépôt de la marque seconde a été effectué de mauvaise foi (art. L. 716-4-5, 1° CPI), à charge pour celui qui se prévaut de la mauvaise foi d’en apporter la preuve. L’irrecevabilité de l’action en contrefaçon pour forclusion ne peut être soulevée par le défendeur que si l’action en contrefaçon est dirigée contre une marque, et non contre une dénomination sociale. Seul le titulaire d’une marque antérieure peut se voir opposer l’irrecevabilité de son action en contrefaçon pour forclusion (art. L. 716-4-5, 1° CPI). La forclusion pour tolérance d’usage nécessite d’établir que le demandeur à l’action en contrefaçon a eu connaissance de l’usage de la marque prétendue contrefaisante et a toléré cet usage pendant cinq ans. La forclusion par tolérance d’usage doit être prouvée par celui qui s’en prévaut. Elle constitue une fin de non-recevoir, et ne peut pas être invoquée par le titulaire de la marque seconde qui agirait au principal à titre préventif. Elle n’a pas pour effet de priver le titulaire de la marque antérieure de ses droits sur celle-ci, mais a pour objet de l’empêcher d’engager une action, de sorte que la marque antérieure et la marque seconde continuent de coexister.