Anti-suit injunctions

 

Droit européen des affaires

Le règlement 1215/2012, en dehors de quelques exceptions limitativement énumérées à l'article 45 relatif à la reconnaissance et à l'exécution des décisions, n'autorise pas le contrôle de la compétence d'une juridiction d'un État membre par celle d'un autre État membre. Le principe de non-ingérence s'oppose au prononcé d'une injonction “anti-suit”, qui permet, notamment aux juridictions anglaises, d'interdire à une partie à la procédure pendante devant elle d'introduire ou de poursuivre une action en justice devant la juridiction d'un autre État membre quand bien même cette partie agirait de mauvaise foi dans le seul but d'entraver la procédure. En effet, ce type d'injonction produit plusieurs conséquences négatives : elle a pour effet de porter atteinte à la compétence de la juridiction étrangère pour résoudre le litige, de limiter l'application des dispositions du règlement et de priver de leur effet utile les mécanismes spécifiques prévus par le règlement en cas de litispendance et de connexité. Même si la procédure d' “anti-suit injonction” concerne une procédure d'arbitrage, matière qui ne relève pas du règlement 1215/2012, la Cour de justice s'oppose à sa mise en œuvre, dès lors que la procédure d'injonction, en empêchant une juridiction d'un État membre d'exercer les compétences qui lui sont attribuées en vertu du règlement, fait obstacle à la réalisation des objectifs d'unification des règles de conflit de juridictions en matière civile et commerciale et de libre circulation des décisions poursuivis par le texte.

Sous l'empire du règlement 44/2001, seules des procédures introduites devant les juridictions d'Etat tiers, pouvaient faire l'objet d"anti-suit injunctions". Le règlement 1215/2012 a repris le même principe tout en limitant sa portée. En prévoyant des règles régissant un conflit entre une procédure pendante dans un Etat tiers et une autre dans un Etat membre aux articles 33 (en cas de litispendance) et 34 (en cas de connexité), le nouveau règlement admet la possibilité qu'un juge d'un Etat membre puisse surseoir à statuer au profit du juge d'un État tiers, saisi en premier selon les règles d'attribution de compétence prévues aux articles 4, 7, 8 ou 9 du règlement, s'il s'attend à ce que le juge de l'État tiers rende une décision susceptible d'être reconnue et, le cas échéant, exécutée et que ce dernier est convaincu que le sursis à statuer est nécessaire pour une bonne administration de la justice. En revanche, lorsque la compétence du juge d'un Etat tiers n'est pas fondée sur les règles de compétence précitées, le juge de l'Union n'a aucune obligation de surseoir à statuer, ce qui, indirectement, restreint le champ d'application des injonctions anti-suit introduites devant les juridictions d'Etats tiers.

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