L'Autorité de la concurrence ne peut, en vertu de l'article L. 462-7 du Code de commerce, être saisie de faits remontant à plus de cinq ans s'il n'a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction. L'article L. 462-7 comporte également un plafond : la prescription est acquise lorsqu'un délai de dix ans s'est écoulé depuis la cessation de la pratique anticoncurrentielle sans que l'Autorité de la concurrence ait statué. Le délai de dix ans est suspendu jusqu'à la notification à l'Autorité de la concurrence d'une décision juridictionnelle irrévocable lorsque l'ordonnance délivrée dans le cadre d'une enquête lourde fait l'objet d'un appel ou lorsque le déroulement des opérations de visites et saisies fait l'objet d'un recours, à compter du dépôt de cet appel ou de ce recours, mais aussi lorsque la décision de l'Autorité déclarant la saisine irrecevable fait l'objet d'un recours, à compter du dépôt de ce recours (art. L. 462-7, al. 4). Selon une pratique constante de l'Autorité, si les faits prescrits ne peuvent être qualifiés et donner lieu à des poursuites, il est cependant possible de les relater afin de permettre la compréhension des griefs retenus relatifs à des faits non prescrits. Toutefois, l'Autorité doit clairement limiter dans le temps les faits qualifiés et sanctionnés sur le fondement des articles L. 420-1 et L. 420-2. Ainsi, elle ne peut soumettre à sa décision des faits antérieurs à l'enquête diligentée par la DGCCRF, mais peut se prononcer sur des faits couverts par la prescription lorsqu'elle est saisie pour avis.
Seuls des actes de recherche, de constatation ou de sanction interrompent la prescription. Tel est le cas des actes suivants :
- la saisine de l'Autorité par le ministre de l'Économie ou l'autosaisine de l'Autorité ;
- la demande d'avis à une autorité administrative et l'avis subséquent ;
- les procès-verbaux établis au cours de l'enquête administrative ;
- la plainte avec constitution de partie civile et l'enquête qui en résulte ;
- les ordonnances d'autorisation de visite et de saisie ;
- les actes d'instruction effectués pour les besoins d'une décision ultérieurement annulée, lorsque la nullité ne les affecte pas ;
- la convocation par le rapporteur à des auditions, l'audition du plaignant ou la demande de communication de pièces ;
- la notification des griefs ;
- les actes par lesquels une personne mise en cause dans une procédure conteste la validité de celle-ci ou d'une décision intervenue dans ce cadre ;
- les actes interruptifs de la prescription publique.
En revanche, ne sont pas interruptifs de la prescription la désignation des rapporteurs successifs, qui constitue une mesure d'administration interne ou l'échange de correspondance entre le rapporteur et le représentant de l'entreprise mise en cause, des constats d'huissiers de justice et la saisine des juridictions civiles. De même, l'impossibilité d'agir de l'entreprise saisissante, du ministre de l'Économie ou du commissaire du Gouvernement n'a aucun effet interruptif. Autrement dit, l'inaction du rapporteur ne suspend pas la prescription. Enfin, tant les pourvois en cassation formés contre les ordonnances d'autorisation judiciaire, que les décisions rendues sur ces pourvois, ne sont pas suspensifs dans la mesure où ils ne tendent pas à la recherche de la preuve, mais au contraire empêchent l'utilisation d'investigations irrégulièrement mises en œuvre. L'interruption est également exclue s'agissant de la séance de l'Autorité au cours de laquelle est discutée la recevabilité de la saisine, ou de la convocation pour assister à cette séance, aucune décision n'étant prise à l'issue de cette séance. Ni le jugement de sursis à statuer dans l'attente de la décision définitive de l'Autorité, rendu par un tribunal de commerce, ni la transmission de la notification de griefs par l'Autorité à la cour d'appel ne produisent d'effet interruptif.
Par ailleurs, s'agissant de la période postérieure à la saisine de l'Autorité, toute prescription dont la conséquence est de rendre irrecevable une action ou d'interdire la sanction d'un fait, recommence à courir après qu'elle ait été interrompue, sous réserve d'une éventuelle cause de suspension de son cours. Enfin, l'Autorité étant saisie de pratiques d'entente dans leur ensemble, l'interruption de la prescription produit effet à l'égard de toutes les parties impliquées, y compris celles qui n'ont pas été entendues dans ce délai. De même, des actes d'instruction réalisés à l'égard d'abus de position dominante peuvent produire un effet d'interruption de la prescription relative aux poursuites engagées à l'égard d'ententes, dès lors qu'il existe un lien de connexité entre ces infractions en raison de leur objet.
Comme en matière pénale, le point de départ de la prescription diffère selon le caractère instantané ou non de l'infraction. Pour l'infraction instantanée, le point de départ de la prescription est le lendemain de l'acte constitutif de l'infraction. En revanche, la prescription des infractions à caractère continu ne commence à courir que le lendemain du jour où le comportement infractionnel a cessé. On distingue encore les infractions continues permanentes, qui sont des infractions consommées en un seul acte, mais dont les effets et le résultat se prolongent dans le temps et dont le régime de prescription est celui des infractions instantanées, et les infractions continues successives, caractérisées par la réitération de la volonté infractionnelle dans le temps et dont le régime de prescription est celui des infractions continues. Les effets anticoncurrentiels de conventions conclues en temps prescrit, mais dont l'application s'est poursuivie, sont donc susceptibles d'être sanctionnés. Les pratiques présentant un caractère continu ne commencent à se prescrire qu'à la date à laquelle elles ont pris fin. Le point de départ de la prescription a été fixé à la date de réception de la lettre de saisine de l'Autorité, date à laquelle celle-ci prend connaissance des faits dénoncés.