Soumissions concertées

Droit français de la concurrence

Les autorités de concurrence ont défini les soumissions concertées comme la pratique par laquelle des entreprises qui soumissionnent à un marché public donnant lieu à un appel d'offres public se concertent préalablement au dépôt de leurs offres (Rapport de la Commission de la concurrence, 1987). Cette pratique permet à chaque entreprise soumissionnaire de disposer d'informations sur le contenu des propositions d'autres compétiteurs et de calculer son offre non plus en considération des seules conditions dans lesquelles elle pourrait répondre au plus juste à la demande formulée, mais en fonction de ce qu'elle sait des propositions d'autres entreprises consultées. Les échanges d'informations entre entreprises soumissionnaires à un même marché préalablement au dépôt effectif de leurs offres, hormis le cas où cet échange se traduit par le dépôt d'une offre conjointe et solidaire des entreprises qui y ont participé, sont de nature à limiter l'intensité de la concurrence entre les entreprises qui y participent, que cet échange porte sur les prix susceptibles d'être proposés, sur les moyens techniques qu'il est prévu d'employer ou encore sur la réalité du désir de remporter le marché.

L'Autorité de la concurrence estime que les soumissions concertées poursuivent un objet anticoncurrentiel qui la dispense de vérifier l'existence d'un effet sur le marché. Elle distingue la soumission de l'offre présentée par l'entreprise désignée pour être la moins-disante sur le marché et qui aura, sinon la certitude, du moins la plus grande chance de l'emporter et celles des autres entreprises, qualifiées d' “offres de couverture”. Ces offres sont conçues pour être rejetées par le maître d'ouvrage soit parce qu'elles sont financièrement moins avantageuses que celle de l'entreprise prédésignée, soit parce qu'elles répondent imparfaitement aux conditions posées par l'appel d'offres. Le dépôt d'une offre de couverture s'explique par les compensations que l'entreprise pourra ou espérera obtenir pour des marchés ultérieurs et qui pourront prendre la forme d'offres de couverture en sa faveur.

La jurisprudence distingue également entre offre de couverture et offre de principe ou offre “carte de visite”. Une offre de principe est une offre irréaliste, rédigée de façon telle que l'entreprise qui la dépose sait qu'elle n'obtiendra pas le marché. Elle n'implique pas nécessairement un échange d'informations ou une entente préalable entre l'entreprise considérée et les autres soumissionnaires. Le dépôt de telles offres se justifie lorsque l'entreprise qui n'entend pas être retenue, notamment du fait de son plan de charge, craint qu'une abstention pure et simple conduise la personne publique qui passe les marchés à la juger comme n'étant plus intéressée par le type de travaux proposés et donc à ne plus consulter dans l'avenir. Le dépôt d'une telle offre, qui n'est pas anticoncurrentiel en soi, le devient lorsque l'entreprise en cause en avertit les autres soumissionnaires.

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