Le cadre juridique des droits voisins
Les droits voisins ont pour objectif d’assurer une rémunération équitable aux éditeurs de presse pour l’utilisation de leurs contenus en ligne. Ces droits s’appliquent aux plateformes numériques qui reprennent ou indexent des extraits d’articles, notamment via des moteurs de recherche ou des réseaux sociaux.
En contrepartie, les entreprises du numérique doivent conclure des accords financiers avec les éditeurs concernés pour partager les revenus générés par ces contenus.
La mise en œuvre de ces obligations a cependant donné lieu à des tensions croissantes entre les géants de la technologie et la presse. En France, plusieurs éditeurs de presse, principalement régionaux, reprochent à Microsoft, via son moteur de recherche Bing, de ne pas respecter ces engagements.
Ces éditeurs dénoncent un manque de transparence et un défaut de négociation, ce qui les a conduit à engager des actions judiciaires contre la firme américaine.
Des éditeurs mobilisés pour faire valoir leurs droits
L’action intentée contre Microsoft s’inscrit dans un contexte plus large de mobilisation des médias contre les grandes plateformes numériques. Après X, LinkedIn, Google et Meta, également visés par des contentieux similaires, c’est au tour de Microsoft de devoir répondre à des accusations de manquements.
Selon les éditeurs de presse, Bing, tout comme d’autres services du groupe américain, exploite des contenus journalistiques sans qu’une rémunération adéquate ne soit versée en retour.
Pour les éditeurs, la question des droits voisins ne se limite pas à une simple compensation financière. Ils y voient un moyen de rééquilibrer les rapports de force avec les entreprises du numérique, qui captent une part écrasante des revenus publicitaires.
Les médias, notamment régionaux, qui subissent de plein fouet la baisse des recettes publicitaires traditionnelles, peinent à maintenir leur activité face à la domination des plateformes.
Un enjeu économique et stratégique
Les éditeurs de presse soulignent que leurs contenus alimentent une part importante du trafic des plateformes, contribuant ainsi à leur attractivité. En retour, ils estiment qu’une juste rémunération est essentielle pour préserver l’écosystème de l’information, un secteur stratégique pour la démocratie.
La presse régionale, particulièrement touchée, espère que ces démarches judiciaires permettront de garantir la pérennité de son modèle économique.
Les sommes en jeu sont conséquentes, bien que souvent difficiles à estimer précisément. Pour les éditeurs, l’obtention de ces rémunérations pourrait représenter un levier important afin de moderniser leurs infrastructures et investir dans de nouveaux formats numériques. Ces investissements sont nécessaires pour maintenir leur compétitivité face à une audience toujours plus connectée.
Inscrivez-vous à la newsletter Livv
et recevez chaque semaine des informations exclusives en droit des affaires. En savoir plus
Multiplication des actions en justice
Les contentieux se multiplient en France et dans d’autres pays. Les procédures intentées contre Microsoft, LinkedIn, Google, X, ou encore Meta, illustrent les efforts des éditeurs pour faire appliquer les dispositions légales relatives aux droits voisins.
Ces actions en justice pourraient aboutir à des décisions structurantes pour l’ensemble du secteur, renforçant, ou non, la position des médias face aux géants de la tech.
En parallèle, des négociations sont en cours à l’échelle européenne pour clarifier et uniformiser l’application des droits voisins. Ces discussions visent notamment à définir des critères objectifs pour le calcul des rémunérations et à renforcer les obligations de transparence des plateformes.
Une bataille cruciale pour l’avenir de la presse
La lutte pour les droits voisins dépasse le simple cadre juridique. Elle soulève des questions fondamentales sur le partage de la valeur dans l’écosystème numérique.
Alors que les plateformes tirent d’importants revenus des contenus journalistiques, les éditeurs de presse tentent de préserver un modèle économique qui garantit une information de qualité et indépendante.
Cette bataille judiciaire reflète donc un défi plus large pour la souveraineté numérique et la pluralité de l’information. Les prochaines décisions des tribunaux, mais aussi les avancées réglementaires, seront déterminantes pour tracer les contours des relations entre la presse et les géants du numérique dans les années à venir.