Droit français de la concurrence
L'Autorité de la concurrence peut infliger une sanction pécuniaire applicable soit immédiatement, soit en cas d'inexécution des injonctions ou des engagements qu'elle a acceptés (C. com., art. L. 464-2). La fixation de la sanction pécuniaire dépend de critères d'évaluation que l'Autorité doit précisément énumérer dans sa décision. Les sanctions sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme professionnel et doivent être motivées. Ces sanctions sont de nature administrative ; elles ne revêtent aucun caractère pénal, et le principe de la personnalité des peines n'est applicable que dans une certaine mesure.
La lourdeur des sanctions encourues n'a cessé de s'accroître avec le temps. La loi NRE a aggravé le montant de l'amende susceptible d'être infligée aux contrevenants en doublant notamment le plafond qui est passé de 5 à 10 % de leur chiffre d'affaires mondial. Par ailleurs, l'article L. 464-5-1 du Code de commerce prévoit que les sanctions pécuniaires prononcées en application des articles L. 464-2, L. 464-3 et L. 464-5 peuvent faire l'objet d'une majoration, dans la limite de 10 % de leur montant, afin de financer l'aide aux victimes. Enfin, l'ordonnance de transposition de la directive ECN+ a considérablement augmenté le poids de la sanction pour les organismes professionnels, qui encouraient jusqu'alors un maximum de 3 millions d'euro d'amende, et qui désormais peuvent se voir infliger, comme les entreprises, une amende représentant 10 % de leur chiffre d'affaires mondial. Le caractère répressif de la sanction empêche d'appliquer les nouvelles dispositions plus sévères aux faits commis antérieurement à leur entrée en vigueur. Réciproquement, depuis l'ordonnance du 9 mars 2017, l'Autorité de la concurrence peut décider de réduire le montant de la sanction pécuniaire infligée lorsque le contrevenant a, en cours de procédure devant l'Autorité, versé à la victime de la ou des pratiques anticoncurrentielles sanctionnées une indemnité due en exécution d'une transaction au sens de l'article 2044 du Code civil.
L'Autorité de la concurrence avait, dans un communiqué en date du 16 mai 2011, expliqué la méthode qu'elle suivrait en pratique pour déterminer les sanctions pécuniaires et synthétisé les principaux aspects de sa pratique décisionnelle. Directive au sens de la jurisprudence administrative, le communiqué, dans un souci de transparence, portait à la connaissance des intéressés “la façon concrète dont l'Autorité exerce son pouvoir de sanction, à l'intérieur du cadre prévu par le I de l'article L. 464-2 du Code de commerce” et permettait aussi aux juridictions de contrôle d'en vérifier la détermination. En raison des modifications significatives du mode de calcul de l'amende introduites par l'ordonnance de transposition de la directive ECN+ (alignement des sanctions encourues par les entreprises et les “organismes professionnels”, désormais désignés comme des “associations d'entreprises”, disparition du critère du dommage à l'économie,...), ce document a été abrogé et remplacé par un nouveau communiqué en date du 30 juillet 2021. Néanmoins, en vertu de l'article 6 de l'ordonnance du 26 mai 2021, les nouvelles règles relatives aux associations d'entreprises ne seront pas applicables aux pratiques qui ont cessé d'être mises en oeuvre avant le 28 mai 2021 et les nouveaux critères de détermination de la sanction ne seront applicables qu'aux griefs notifiés après cette date.
Ce communiqué, qui engage l'Autorité, peut lui être opposé, à moins qu'elle n'explique, dans sa décision, les circonstances particulières ou les raisons d'intérêt général justifiant qu'elle s'en écarte pour infliger une amende forfaitaire (Communiqué du 30 juillet 2021, pt. 6). La méthodologie de l'Autorité consiste à déterminer la sanction en fonction de divers critères appliqués dans un ordre précis : elle détermine d'abord le montant de base de la sanction pécuniaire, qu'elle pondère ensuite pour prendre en considération les éléments propres au comportement et à la situation individuelle de chaque entreprise ou organisme, à l'exception de la réitération dont la loi a fait un critère autonome. Enfin, ce montant est comparé au maximum légal, avant d'être réduit pour tenir compte de la clémence ou d'une transaction, puis ajusté à la capacité contributive de l'entreprise ou de l'organisme qui en fait la demande.