Droit français de la concurrence
Saisie par le ministre de l'Économie, par les entreprises, par les collectivités territoriales, les organisations professionnelles et syndicales, les organismes chargés de la défense des consommateurs, les chambres d'agriculture, les chambres de métiers ou les chambres de commerce et d'industrie territoriales, la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet et les présidents des observatoires des prix, des marges et des revenus de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de La Réunion, du Département de Mayotte, des îles Wallis et Futuna et de Saint-Pierre-et-Miquelon, pour toute affaire qui concerne les intérêts dont ces organismes ont la charge, l'Autorité examine si les pratiques entrent dans le champ d'application des articles L. 420-1, L. 420-2, L. 420-2-1, L. 420-2-2 ou L. 420-5, sont contraires aux mesures prises en application de l'article L. 410-3 ou peuvent se trouver justifiées par application de l'article L. 420-4. Il lui appartient donc de qualifier les faits dont elle est saisie. Par conséquent, elle n'est pas liée par les qualifications juridiques proposées par l'Administration ou les parties dans l'acte de saisine. On dit que l'Autorité est saisie in rem. Le pouvoir de qualification dévolu à l'Autorité lui permet de décider la jonction de l'instruction de dossiers.
L'Autorité de la concurrence peut, par décision motivée, déclarer la saisine irrecevable pour défaut d'intérêt ou de qualité à agir de l'auteur de celle-ci, ou si les faits sont prescrits au sens de l'article L. 462-7, ou si elle estime que les faits invoqués n'entrent pas dans le champ de sa compétence (art. L. 462-8, C. com.). Elle peut également clore dans les mêmes conditions une affaire pour laquelle elle s'était saisie d'office. Pour l'application de ce texte, le rapporteur général est autorisé à fixer des délais pour la production des mémoires, pièces justificatives ou observations (art. R. 463-8, C. com.). Dès lors, la production de documents de nature à étayer la réalité des faits peut être valablement faite par une transmission distincte de la lettre de saisine. L'Autorité notifie à l'auteur de la saisine et au ministre sa décision relative à la recevabilité de la saisine (art. R. 464-8, 2º, C. com.).
Le rapporteur général nomme, pour l'examen de chaque affaire, un ou plusieurs agents des services d'instruction aux fonctions de rapporteur (art. L. 450-6, al. 1, C. com.). Leur mission consiste à instruire les dossiers à charge et à décharge. Aussi, sont-ils autorisés à procéder aux enquêtes nécessaires à la recherche de la preuve de l'infraction alléguée (art. L. 450-1, C. com.). Sur la demande écrite du rapporteur général, le ministre de l'Économie doit, sans délai, mettre à sa disposition les fonctionnaires habilités nécessaires à la réalisation des opérations d'enquête lourde, pour la durée et le nombre indiqués.
Après ces investigations, le rapporteur a la possibilité soit d'établir une notification des griefs, soit de proposer un non-lieu à poursuivre la procédure.
Au vu des observations présentées par les parties et par le commissaire du Gouvernement sur la notification des griefs, et sauf mise en œuvre de la procédure simplifiée, le rapporteur rédige un rapport dont la rédaction n'est soumise à aucun délai. Il contient l'exposé des faits et griefs finalement retenus à la charge des intéressés, ainsi qu'un rappel des autres griefs (C. com., art. R. 463-11). Le rapporteur est libre de retenir les griefs qu'il souhaite. Il peut ainsi abandonner des griefs postérieurement à la notification du rapport sans porter atteinte au principe du contradictoire. Le rapport constitue l'acte d'instruction. Il est notifié aux parties, au commissaire du Gouvernement et aux ministres intéressés (art. L. 463-2). Sont joints à ce rapport les documents sur lesquels le rapporteur s'est fondé et, le cas échéant, les observations des parties. Celles-ci disposent d'un nouveau délai de deux mois pour présenter un mémoire en réponse qui peut être consulté par les intéressés dans les quinze jours précédant la séance de l'Autorité. Les ministres intéressés peuvent présenter des observations dans le même délai ; cet avis est transmis à l'Autorité par l'intermédiaire du commissaire du Gouvernement.
La procédure d'instruction devant l'Autorité prend fin avec les mémoires en réponse au rapport. L'Autorité convoque alors les parties par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, trois semaines au moins avant le jour de l'audience (art. R. 464-6, C. com.). L'entreprise ou l'organisme qui ne défère pas à une convocation s'expose à injonction assortie d'une astreinte dans la limite de 5 % du chiffre d'affaires journalier moyen, par jour de retard (art. L. 464-2, C. com.). Les séances de l'Autorité de la concurrence ne sont pas publiques (art. L. 463-7) : seuls peuvent y assister les parties et le commissaire du Gouvernement. Les parties peuvent être entendues. Elles sont autorisées à se faire représenter ou assister. L'Autorité peut entendre toute personne dont l'audition lui semble susceptible de contribuer à son information (art. L. 463-7, al. 2). Cependant, le respect du principe du contradictoire et des droits de la défense implique que les parties ou leurs représentants puissent préalablement aux débats avoir connaissance du nom et de la qualité des témoins que l'Autorité prévoit d'entendre. De même, les parties doivent avoir la faculté de demander à l'Autorité, qui en apprécie l'utilité, l'audition d'autres témoins. Le rapporteur général, le ou les rapporteurs généraux adjoints et le commissaire du Gouvernement peuvent également présenter des observations. Cette faculté est également reconnue au rapporteur qui a instruit l'affaire par l'article R. 464-6 du Code de commerce. Au cours de la séance, les rapporteurs ne sont pas tenus de reprendre à l'identique l'opinion exprimée dans leur rapport et peuvent modifier leur appréciation des faits à condition qu'aucun élément absent du dossier ne soit allégué à la charge des mis en cause et que ceux-ci puissent répliquer dans des conditions conformes au principe du contradictoire.
Après les débats, l'Autorité délibère. La décision définitive est adoptée à la majorité absolue des voix, le président de l'Autorité ayant voix prépondérante en cas de partage. Le délibéré est secret. La violation du secret entraîne la nullité de la décision. Les textes précisent que le rapporteur général, ou le rapporteur général adjoint désigné par lui, et le rapporteur assistent aux délibérés, sans voix délibérative, sauf lorsque l'Autorité statue sur des pratiques dont elle est saisie en application de l'article L. 462-5 (art. L. 463-7, al. 4), à savoir des pratiques d'ententes, d'abus de domination ou de prix abusivement bas.