Recours en annulation

 

Droit européen de la concurrence

Toute personne physique ou morale peut former, en application de l'article 263 TFUE, un recours en annulation contre les décisions dont elle est le destinataire et contre celles qui, bien que prises sous l'apparence d'un règlement ou d'une décision adressée à une autre personne, la concernent directement et individuellement. L'exercice du recours en annulation contre une décision de la Commission est soumis à plusieurs conditions :

  • Actes attaquables : seuls les actes qui arrêtent, de manière non équivoque, une mesure qui produit des effets juridiques affectant les intérêts des personnes concernées en modifiant leur situation juridique et qui s'impose obligatoirement à elles sont susceptibles de recours en annulation. Une décision implicite de refus ne constitue pas une décision attaquable : le défaut de réponse à une demande de communication de pièces ou à une demande de mesures conservatoires ne peut faire l'objet d'un recours en annulation. Tel est également le cas de la prise de position provisoire de l'article 7 du règlement 773/2004 ou de la simple opinion écrite d'une institution européenne. Il en va de même de l'acte par lequel les agents de la Commission prennent copie de documents ou demandent des explications orales au salarié d'une entreprise au cours de l'inspection, qui constitue une mesure d'exécution de la décision d'inspection qui ne peut être contestée que dans le cadre d'un recours en annulation contre la décision finale ou contre une décision prise sur le fondement de l'article 23, paragraphe 1, du règlement 1/2003, pour sanctionner un refus de coopération de l'entreprise. En revanche, la lettre de rejet de la plainte qui met fin à l'enquête arrête la position de la Commission et clôture le dossier produit des effets juridiques obligatoires. Le juge européen s'attache davantage à la nature de l'acte qu'à sa forme pour le qualifier d'acte attaquable. Il vérifie d'abord si, matériellement, l'objet de l'acte correspond, directement ou indirectement, à un objet qui est susceptible d'être rempli par une décision attaquable (interdiction, exemption assortie de conditions et charges, adoption de mesures provisoires, demande de renseignements). Il cherche ensuite si, sur un plan formel, l'acte présente par lui-même les caractères d'une décision, c'est-à-dire d'un commandement émanant de l'institution.
  • Objet du recours : il est strictement défini par l'article 263 TFUE. Le juge européen a pour mission de vérifier la compétence de l'institution en cause, le respect des formes substantielles, le respect des dispositions du Traité ou de toute règle de droit relative à son application, ou l'existence d'un détournement de pouvoir. Il ne peut être demandé au juge européen d'adresser des injonctions aux autres institutions européennes. En matière de concurrence, la violation des formes substantielles et celle du Traité sont les moyens le plus souvent soulevés. Au titre de la violation des formalités substantielles, qu'il peut soulever d'office, le juge européen vérifie la motivation de la décision et le respect des droits de la défense. En dehors de ces moyens d'ordre public, la compétence de pleine juridiction du Tribunal ne lui impose pas de relever d'office des moyens d'annulation de la décision de la Commission que les parties n'auraient pas soulevés.
  • Intérêt à agir : le recours en annulation peut être formé par le destinataire de la décision ou par toute personne concernée directement et individuellement par celle-ci. Dans tous les cas, le requérant doit avoir un intérêt né et actuel à l'annulation de l'acte attaqué. Le recours doit, par son résultat, être susceptible de lui procurer un bénéfice. Les entreprises victimes d'une entente ou d'un abus de position dominante sont sans aucun doute admises à introduire un recours en annulation. Le plaignant est également recevable à agir contre le rejet de sa plainte dès lors que cet acte fixe clairement et définitivement la position de la Commission. En revanche, la seule participation à une procédure administrative ne suffit pas à conférer la qualité de personne directement et individuellement concernée. De même, le client d'une entreprise condamnée pour entente, qui agit en annulation contre la décision de la Commission, n'est pas recevable en son intervention dès lors que le recours a pour seul objet de contrôler la légalité de la décision et non de permettre ou faciliter l'exercice d'actions civiles en dommages-intérêts pour les victimes de pratiques anticoncurrentielles.
  • Prescription : l'article 263 TFUE fixe un délai de deux mois qui court à compter de la notification au requérant, ou de la publication de la décision s'il n'est pas partie. Il s'applique à toute personne quelle que soit sa situation au jour de la publication de l'acte. La notification est valablement effectuée par l'envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception postale. Le délai ne court que si l'accusé de réception est dûment daté et signé de son destinataire, c'est-à-dire par une personne habilitée à recevoir un courrier recommandé. Le recours en annulation formé à l'expiration du délai de deux mois est irrecevable sauf à apporter la preuve d'une erreur excusable de l'entreprise requérante. Lorsqu'un délai de recours prend fin un dimanche, l'expiration en est reportée le jour ouvrable suivant.
  • Conditions de forme : la requête doit contenir les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels le recours en annulation se fonde. Une entreprise ne peut, en cours d'audience, invoquer un moyen nouveau par rapport à ceux de sa requête. Si des renvois peuvent être faits aux annexes, il ne faut pas que le juge soit contraint d'y chercher et identifier les moyens et arguments qui constituent le fondement de l'action. A plus forte raison, des arguments et griefs uniquement développés en annexe sont-ils irrecevables. Le recours est en revanche admissible même si les requérants n'ont pas précisé dans leur requête la date de notification ou le nom des autres parties à la procédure.
  • Examen du recours : le juge exerce un contrôle de légalité restreint en raison du pouvoir discrétionnaire de la Commission en matière de concurrence : il doit limiter son contrôle à la matérialité des faits et à la qualification juridique qui leur est attribuée par la Commission. Le contrôle juridictionnel doit, en effet, respecter les appréciations complexes auxquelles l'autorité européenne se livre en matière économique. Le Tribunal de l'Union peut constater l'existence d'infractions non retenues par la Commission dans sa décision et n'est pas autorisé à instruire lui-même le dossier pour combler les lacunes de celle-ci. En matière d'amendes, il dispose en revanche d'une compétence de pleine juridiction (Règl. 1/2003, art. 31). Le Tribunal peut notamment supprimer ou réduire l'amende, sans être lié ni par les calculs de la Commission ni par ses lignes directrices, ni, le cas échéant, par les conclusions des avocats généraux. Le juge européen procède à l'examen du recours dans un délai raisonnable. Lorsqu'il viole cette obligation, en l'absence d'indication que la durée critiquée a eu une incidence sur la solution du litige, les parties en cause ne peuvent demander l'annulation de l'arrêt ou une réduction du montant de l'amende, mais doivent introduire un recours en réparation, non devant la Cour de justice dans le cadre du pourvoi, mais devant le Tribunal lui-même, qui se prononcera dans une autre formation que celle qui a connu du litige.

Si le recours est fondé, le juge déclare nul et non avenu l'acte contesté. L'arrêt d'annulation a une autorité absolue. Cependant, la décision de la Commission ne peut être annulée qu'en ce qui concerne les parties au litige : elle demeure contraignante à l'égard des destinataires qui n'ont pas formé de recours en annulation. L'absence d'effet erga omnes des arrêts d'annulation prononcés par le Tribunal ne suffit pas à rendre la procédure suivie en matière d'infractions au droit de la concurrence contraire à l'article 6 CEDH et à l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union.

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